Le documentaire "William et les Fantômes" retrace le parcours de William Deligny, figure iconique du mouvement skin, dans la France des années 80. Pendant 52 minutes, il raconte sa vision de la France, ses combats, sa jeunesse, ses idéologies... et comment il a fini par devenir moine hindouiste.
Avoir 15 ans dans les années 80, cela impliquait forcément de choisir son camp. Et les choix étaient limités : Mitterrand ou Chirac ? Le nihilisme du mouvement post punk à l’extrême gauche, ou la haine bête et méchante des Skins d’extrême droite ?
En 1980, William Deligny est un môme pétri d’une colère qui semble contaminer une partie de la jeunesse française de ces années post punk, grises et plombées.
"William et les fantômes" de Jean-Marie Châtelier
Une coproduction Scotto Productions et France Télévisions
A (re)découvrir ce jeudi 5 octobre 2023 à 22h50 sur France 3 Normandie.
Ou quand vous voulez, pendant un mois sur notre site internet.
Pour éloigner leur fils de la violence de la cité, les parents de William Deligny décident de l'inscrire au lycée Saint Sulpice à Paris. C'est dans ce contexte qu'il va rencontrer une poignée de skinheads extrémistes et va former avec eux le groupe "Evil Skins".
Dans le documentaire, il raconte : "Un jour, je suis sorti de l'appartement de mes parents, j'étais habillé en SS, avec une rune d'Odal sur la tête. Mes parents étaient amis avec une famille juive qui habitait juste en face et à ce moment-là, Cathy, que je connaissais depuis mon enfance, sort avec son enfant. Je suis là, en face d'elle.
Elle me regarde, elle me dit bonjour, mais je sens sa voix qui tremble. Je ne dis rien, j'avance. On s'arrête à l'ascenseur, j'appuie. J'ouvre la porte, elle entre avec son bébé, je suis devant. Et je sens les camps de concentration, je sens sa peur... c'était quelque chose de très fort. Je suis sorti en me disant : "c'est pas grave" et puis 20 minutes après..."
Je prends le métro. Je prenais quatre places à moi tout seul, je dévisageais tout le monde, je faisais peur à tout le monde. Arrivé à Barbès, un maghrébin d'une cinquantaine d'années me dit : "je peux m'asseoir à côté de toi ?" Il me regarde avec de la bonté et ses paroles m'ont touché. Il m'a dit : "pourquoi tu t'habilles comme ça ?" Et là, je me suis levé, mais j'ai rien pu faire. D'habitude, je l'aurais défoncé mais je suis parti.
William Deligny, dans le documentaire "William et les fantômes"
"En fait, c'était une période où j'étais complètement perdu, je ne savais plus quoi faire. J'étais partagé : est-ce que je devais arrêter cette folie ou continuer ?
Mais quand j'étais dans le doute, j'en faisais encore plus. J'ai été même jusqu'à me tatouer un aigle nazi. Et puis après, je regrettais. J'étais perdu au point que ma violence est partie. J'avais un look terrible et à l'intérieur, j'étais devenu gentil, j'arrivais même plus à frapper les gens."
10 ans. 10 ans d'ultra violence avant d'en arriver là. Finalement, dans les années 90, il découvre la religion hindouiste et décide de devenir moine.
Aujourd’hui, il vit à Saint-Etienne-du-Rouvray, dans le temple vaisnaviste qu’il a créé en 2003, au milieu des tours HLM.
"William et les fantômes" a obtenu l'étoile du documentaire de la SCAM en novembre 2022.
Ce documentaire réalisé par Jean-Marie Châtelier retrace pendant 52 minutes le parcours de William Deligny et met en scène la parole de cet homme qui n’est plus la bête enragée qu’il a été.