Le saviez-vous ? Quand vous lavez votre linge à la machine, vous polluez la mer

Laver son linge c’est un geste quasi quotidien. Lors des cycles de lavage, nos vêtements perdent de leurs fibres. Une étude franco-britannique menée dans la Baie des Veys et en baie de Seine a repéré de nombreuses fibres textiles dans les fleuves et rivières, et dans l’eau de mer. Certaines de ces microfibres, même à faible dose, pourraient irriter les huîtres et perturber leur métabolisme.

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L’eau des rivières normandes du côté de la Baie des Veys a été passée au peigne fin, ou plutôt au filet de pêche maille XXS. Depuis 2020, des scientifiques ont mené des campagnes de prélèvements d’eau, afin d’y repérer des microparticules de plastique. Parmi elles, ils ont trouvé des fibres issues de nos vêtements.

"Les lavages en machine usent les vêtements, on ne le voit pas toujours mais à chaque cycle, l’eau de lavage contient des fibres textiles. Ca peut être des microfibres de polyesther quand les tissus sont synthétiques, ou des fibres naturelles", constate Florence Menet, chercheuse à la station d’Ifremer de Port-en-Bessin.

Elle a participé à l’étude européenne Interreg Preventing Plastic Pollution. Un projet qui a permis pendant 3 ans de faire des prélèvements d’eau de mer et de rivières coté Tamise, côté breton et normand (dans la baie des Veys et dans la baie de Seine).

Ce sont justement ces fibres dites naturelles qui ont été étudiées par Camille Détrée, maître de conférence en biologie marine à l’université de Caen.

Concrètement les micro-fibres issues de la laine ou du coton auraient une action mécanique plus irritante que leurs consœurs synthétiques sur les organismes des huitres. Et ce ne serait pas une question de concentration.

"Nous n’avons pas observé plus d’effets sur les huîtres exposées à de fortes ou de faibles concentrations en microfibres. Cela suggère qu'une faible dose environnementale est suffisante pour déclencher des effets sur leur santé", explique Camille Détrée sur le site d’Ifremer .

Ce sont surtout la digestion et l’immunité de l’huitre qui sont atteintes par ces microfibres naturelles d'après l'étude, mais  "attention, il ne faut pas en déduire que les fibres naturelles sont plus nocives que les fibres synthétique", précise la maitre de conférence.

Filtrer l'eau qui s'évacue des machines à laver le linge

Si les fibres naturelles ne sont pas sans effet sur les organismes marins, leur durée de vie est bien plus courte que celles des fibres issues de la chimie : quelques mois au pire pour les naturelles contre des centaines d’années pour les synthétiques.

D'ailleurs, l'établissement public de gestion et d'aménagement de la baie de Douarnenez a mis au point, en collaboration avec l'agence Desind, un prototype de filtre. Celui-ci se place à la sortie d’évacuation d’eau des machines à laver. "C’est simple : il permet de retenir les microfibres avant qu’elles ne rejoignent le réseau d’eau usée. Cela évite de les retrouver dans la nature" explique Florence Menet. Il faut penser à nettoyer le filtre régulièrement,  "et pas sous le robinet d’eau bien entendu. Il faut le laisser sécher et jeter à la poubelle les fibres récoltées" précise-t-elle.

La législation doit imposer aux constructeurs de machines la pose de filtres à la sortie des machines à laver, ou toute autre solution au 1er janvier 2025. Selon l'Epab, seules les stations d’épuration les plus récentes filtrent ces microfibres avant leur rejet. 

D’ici 2025, Florence Menet donne quelques conseils : "il s’agit de laver moins fréquemment son linge. Nous vivons dans une société trop hygiéniste. On peut aussi limiter la vitesse d’essorage en veillant à ne pas utiliser les 1400 ou les 1200 tours/minutes."

La baie de Seine 10 fois plus polluée aux microplastiques que la baie des Veys

L’étude Preventing Plastic Pollution a aussi relevé pour la première fois la quantité des microplastiques présents. Et là, les résultats varient énormément entre ceux contenus dans les eaux normandes au large d’Isigny, et ceux dans l’estuaire de la Seine.

"En moyenne, la baie des Veys contient 0,3 microplastique par m3 d’eau. Est-ce peu ou pas ? On sait que c’est 10 fois moins que la quantité relevée en baie de Seine. C’est plutôt une bonne nouvelle, mais cela indique aussi qu’il y a des traces de pollution même dans une zone qui peut sembler très préservée et peu industrialisée." précise la scientifique.  

On ingère l'équivalent d'une carte bancaire de plastique par an

Les microplastiques sont souvent indétectables à l’œil nu. Les plus gros ont la taille d’une tête de punaise, et les plus petits font le diamètre d’un cheveu. Ces particules de déchets de bouteilles en plastiques, d’emballages et même de fibres textiles flottent et se déposent dans le milieux marin.

Les huitres mais aussi les poissons les consomment, c’est ainsi qu’on les retrouve dans nos assiettes. Selon Ifremer, 2 millions de tonnes de microfibres sont rejetées dans les océans chaque année.

  

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