RENTRÉE. La Justice rejette leur demande d'autorisation d'instruction à domicile : "Je vais essayer de forcer mon fils à aller à l'école"

Une dizaine de familles de l'Eure et de la Seine-Maritime n'ont pas obtenu du Rectorat l'autorisation de faire l'école à domicile, et se sont alors tournées vers la Justice. Le Tribunal Administratif de Rouen vient de rejeter leur demande. Les enfants devront aller à l'école.

Marie Jaskulski avait prévenu : si elle n'obtenait pas l'autorisation d'instruire son fils Gaspard à la maison, elle serait prête à quitter le territoire français. Ce mardi 22 août, le Tribunal Administratif de Rouen a pourtant rejeté sa demande, validant la décision du Rectorat. Onze familles de l'Eure et de la Seine-Maritime réunies au sein de Collect'IEF sont concernées par ce refus. IEF, pour instruction en famille. Un choix d'éducation parfois délibéré, d'autres fois contraint par la situation particulière d'un enfant.


À 3 ans et demi, Gaspard n'a jamais été scolarisé. Marie est à la fois sa mère et son instructrice.
"Il s'avère qu'il a une QI de 134, il est donc en Haut Potentiel Intellectuel, et on s'est aperçu qu'il avait une haute sensibilité auditive et tactile, et tout un tas d'hypo et d'hyper sensibilités...donc il a vraiment besoin d'aménagements et d'adaptations au quotidien" analyse Marie. Le rectorat avait autorisé la famille à faire l'école à la maison l'année dernière, mais leur a refusé ce droit pour cette rentrée.

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Le rectorat de Rouen refuse l'école à domicile à une dizaine de famille dans l'Eure et la Seine-Maritime ©FranceTV
Aurélie Jacquel se battait, elle aussi, pour que son fils Aloïs, 4 ans, puisse étudier à la maison. Elle est encore ce matin assommée par la décision du tribunal. "On accuse le coup, c'est un peu difficile. Les arguments du tribunal sont les mêmes que ceux du rectorat. Le conseil d'Etat a donné le rôle au rectorat de déterminer s'il faut forcer certains enfants à aller à l'école".
Cette famille de trois enfants n'a pourtant pas de posture dogmatique. S'ils préconisent l'école à la maison pour Aloïs, en cours de diagnostic pour suspicion de troubles autistiques, ils savent déjà que la petite dernière ira à l'école, tout comme l'aîné. "Je vais essayer de forcer mon fils à aller à l'école" doit se résoudre cette maman.
Une situation d'autant plus incompréhensible qu'elle aussi avait obtenu l'autorisation l'année dernière, et même des félicitations pour la qualité de son instruction à la maison. Entre-temps, la loi qui encadre l'instruction à domicile a changé.

Des conditions plus restrictives

Si l'instruction à domicile est autorisée par la loi française, ses conditions ont été durcies.
Auparavant, il suffisait d'une simple déclaration des parents pour établir l'école à la maison, sans autorisation administrative préalable. Ce système a pris fin à la rentrée scolaire 2022, avec l'application de la loi sur le séparatisme du 24 août 2021. Il faut dorénavant une autorisation préalable de l'état, donc du rectorat, pour prétendre à l'instruction à domicile.
Depuis, l'IEF n'est autorisée que pour certains motifs.

"Ce qu'ils nous expliquent dans la lettre de refus, c'est qu'ils estiment que Gaspard n'a pas de situation propre, poursuit Marie Jaskulski, on a l'impression d'être traités comme des criminels, car cette loi à la base était contre le séparatisme islamique, ce que nous ne sommes pas, et donc on est assez en colère".
Le rectorat de Normandie assure que le nombre d'enfants instruits en famille a progressé de 30% en 3 ans. Les parents du collectif qui regroupe ces 11 familles déboutées, estiment que le nombre de dossiers refusés à exploser. Dans l'Eure par exemple, on estime à 400 le nombre d'enfants instruits en famille.
"Nous, on respecte les motifs. Pour le motif 4 on demande un projet éducatif, je peux vous montrer j'ai fait un dossier de 130 pages, tout ce qui est demandé par la loi, je l'ai fourni, argumente Aurélie Jacquel de Collect'IEF. 

J'ai été inspectée l'année dernière et j'ai eu les félicitations de l'inspecteur. Il n'y avait pas de raison de nous dire non soudainement

Aurélie Jacquel, membre du collectif Collect'IEF

Pour ces familles, ces refus seraient aussi liés à des positions idéologiques et politiques : l'école de la République se doit d'être inclusive, et d'accueillir tous les enfants.
Certaines familles du collectif se disent pourtant prêtes à se pourvoir en cassation, même s'ils savent que les délais sont longs et les frais élevés. En attendant, les enfants feront leur rentrée des classes dans leur école de secteur.

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