En complément des sirènes, "FR-Alert" est un dispositif innovant qui utilise le réseau des téléphones portables. Il a été testé avec succès le 28 juin 2022, lors d'un exercice attentat au Zénith de Rouen.
Un spectacle au Zénith de Rouen pris pour cible par des terroristes avec tuerie de masse : voilà le scénario de l'important exercice qui a eu lieu le mardi 28 juin 2022.
Réalisé avec d'importants moyens et 300 figurants (dont des élèves de l'école de police de Oissel) cet exercice a mobilisé toutes les forces de sécurité, les pompiers, les secours médicaux et les autorités judiciaires.
Pourquoi ce choix d'exercice ? La menace d'attentat a été préférée au scénario d'un incident industriel. Selon le préfet de Normandie, la menace terroriste existe toujours (le plan Vigipirate est toujours activé) et le "risque attentat" est moins connu en Seine-Maritime par les équipes de secours que les risques technologiques dans un département qui compte 42 sites SEVESO seuil haut, 27 sites SEVESO seuil bas et deux centrales nucléaires.
Les habitants alertés sur leur téléphone portable
En marge de cette simulation, très réaliste, d'un attentat au Zénith de Rouen, un nouveau dispositif d'alerte de la population a été testé pour la première fois en Normandie.
Dans un rayon d'1,5 kilomètre autour du Zénith, les téléphones portables des habitants se sont mis à sonner de façon stridente (avec une sonnerie ne ressemblant à aucune autre) et un message s'est affiché pour indiquer qu'il ne fallait pas s'approcher du Zénith et qu'un exercice attentat était en cours.
L'alerte téléphonique a été reçue par une vingtaine de milliers de personnes, et même par certaines se trouvant au-delà de la zone ciblée, via la propagation des ondes de certaines antennes relais se trouvant en hauteur.
Un questionnaire était ensuite proposé pour donner son ressenti et permettre des améliorations ultérieures.
Ce test est donc un succès et le dispositif FR-Alert (c'est son nom) pourra désormais être utilisé par le préfet de la Seine-Maritime en cas de crise, soit dans une zone géographique précisément délimitée (un quartier, une ville, un canton) soit sur la totalité du territoire du département.
Envisagé et attendu après l'incendie de l'usine Lubrizol de Rouen en 2019, ce système d'alerte par téléphone a mis un peu de temps à arriver car il a fallu transposer en droit français une directive européenne et veiller -juridiquement- au respect des données personnelles dans le cadre du RGPD.
Il a fallu aussi, sur le plan technique, travailler avec l'ensemble des opérateurs de téléphonie mobile. Parmi plusieurs solutions techniques possibles, celle retenue (le "Cell Broadcast + LB-SMS) est la plus efficace indique Pierre-André Durand, préfet de la Normandie et préfet de la Seine-Maritime :
"Cela a été long à mettre en place car la France a fait le choix du dispositif le plus sophistiqué, le plus complet, impliquant la totalité des opérateurs, complété par des SMS géolocalisés. Et c'est cet ensemble constitué qui fait que la France dispose d'un des systèmes les plus performants d'Europe."
Comment ça marche ?
En cas de risque majeur (attentat, accident industriel ou risque de cause naturelle) la cellule de crise du centre opérationnel départemental, dirigée par le préfet, peut, en quelques secondes, déclencher le système "FR-Alert" sur une zone précise. L'avantage du dispositif est qu'il permet de "toucher tout le monde, et qu'il peut être utilisé de façon efficace de nuit, au domicile des habitants pendant qu'ils dorment, contrairement aux sirènes" explique le préfet de la Seine-Maritime.
"Le système FR-Alert est quand même beaucoup plus performant que les sirènes, notamment en zone urbaine : il correspond bien à la vie moderne d'aujourd'hui, une vie très connectée et les citoyens souhaitent avoir une information précise, avec une marche à suivre qui leur est délivrée à domicile."
Pierre-André Durand, préfet de la région Normandie et préfet de la Seine-Maritime
Une fois le système activé, les téléphones reçoivent alors un message en rapport avec le risque en cours, accompagné de consignes sur les comportements à tenir et les gestes à ne pas faire.
Ces messages d'alertes "forcent" les téléphones, même si une communication est en cours ou si le téléphone en mode "silence".
En revanche, "FR-Alert" ne fonctionne pas sur les téléphones éteints ou en "mode avion".
Mises à jour, vieux téléphones et zones blanches
Le test grandeur nature réalisé au sud de Rouen le 28 juin 2022 (sans le réseau de l'opérateur Free) a permis de constater quelques petites difficultés qui seront corrigées à l'automne.
Dès la fin de l'été, tous les opérateurs (et donc Free) diffuseront les messages. En attendant, il est fortement conseillé aux habitants de faire les mises à jour des systèmes d'exploitation de leur téléphone.
Pour les téléphones non reliés à la 4 et 5G, des SMS seront envoyés. Pour certains modèles anciens ou rares (tels que le Windows Phone) mais aussi les téléphones sécurisés, des solutions techniques sont en cours de réalisation pour qu'ils reçoivent eux-aussi des SMS d'alerte.
Quid des "zones blanches" non couvertes par les antennes de téléphonie mobile ? En cas de risque majeur, le préfet de la Seine-Maritime précise que les moyens "traditionnels" seront alors utilisés : les sirènes et les voitures équipées de sonorisation parcourant les rues pour diffuser un message lu au micro.
"La culture du risque"
Considérant qu'une grande partie de la population ignore la signification des sirènes d'alerte et des comportements à suivre (comme se confiner, ne pas téléphoner ou aller chercher ses enfants à l'école) et constatant que la culture du risque n'est pas prise en compte par les habitants de la Seine-Maritime, et surtout chez les jeunes, la préfecture va mener des actions de sensibilisation en milieu scolaire et organiser en octobre 2022 une grande journée de "prévention du risque".