Coronavirus : les insomnies plus nombreuses en période de confinement ?

Tout porte à croire que cette période de confinement est favorable aux troubles du sommeil. "Les consultations médicales de ce type n'étant pas prioritaires, "c'est une plainte que l'on va supposer" nous affirme Marc Martin, spécialiste du sommeil au CHU de Rouen. Explications et conseils.

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Le changement de rythme, imposé dans nos vies par la nécessité de se confiner, peut avoir des répercussions sur notre moral mais aussi sur le bon fonctionnement de notre horloge biologique et sur la qualité de notre sommeil. 

"Depuis une dizaine de jours, mes insomnies se sont intensifiées. Dernièrement, j'ai rêvé de gel hydro alcoolique", raconte Karina.

"Je m'endors vers 23 heures et je me réveille vers 3 heures du matin. Je reste ainsi sans dormir jusqu'à à l'aube et me réveille fatigué", nous confie Frédéric.

Or bien dormir, c'est évidemment important. Particulièrement en cette période où le sommeil doit être un allié de notre de notre système immunitaire pour faire face à l’épidémie du Covid-19.

Selon le docteur Marc Martin, spécialiste du sommeil au CHU de Rouen, aucun chiffre, aucune étude, ne permet actuellement de dire si les Français souffrent plus qu’avant d’insomnie.

Et pour cause : les consultations médicales de ce type ne sont pas jugées prioritaires. Elles ont donc été annulées une semaine avant le confinement, de façon à permettre aux hôpitaux de se préparer, à l’arrivée importante de malades du Coronavirus. Actuellement "les gens doivent se débrouiller seuls" regrette le docteur Martin.

Pour ma part, et comme tous mes collègues médecins, le nombre de mes consultations a chuté de 60 à 70%.
Docteur Marc Martin, spécialiste du sommeil au CHU de Rouen

Mais il est vrai que les éléments sont réunis pour que les troubles du sommeil, les insomnies soient en augmentation.
"Encore faut-il s’entendre sur ce qu’est une insomnie", nous indique le médecin rouennais. "Il faut prendre en compte deux éléments : le manque de sommeil et la fatigue. Certains dormiront peu mais n’en éprouveront pas pour autant de la fatigue. D’autres auront des troubles du sommeil ponctuels."

Le stress, la durée et parfois les conditions de notre confinement sont des éléments qui contribuent actuellement à une perturbation de notre rythme de sommeil. Ils s’ajoutent à ceux habituellement dénoncés : l’usage trop important des écrans informatiques ou de télévision.

"Les informations angoissantes prises auprès des médias ou des réseaux sociaux nous renvoient à la crise sanitaire actuelle. Le nombre de morts et de personnes hospitalisées créent un climat inévitable d’angoisse et de stress dans la population. Pour certains, c’est même une souffrance psychologique qui nuit à leur sommeil."
 

 

"Il faut donner du rythme à nos vies"

En cette période difficile pour bon nombre d’entre nous, Marc Martin, médecin attaché à l’unité du sommeil dans le service de Neurophysiologie du CHU de Rouen, nous donne quelques conseils :

Le confinement est une période où le temps s’arrête presque. Notre rythme aussi. C’est sur ce premier point que notre spécialiste nous donne ses conseils. Des conseils simples. Presque évidents mais que la situation nous a fait oublier parfois.

  • Il ne faut pas rester au lit ou en pyjama toute la journée. Il faut faire en sorte d’avoir un semblant d’activité aussi petit soit-il. Avoir des horaires et des activités régulièrement et à heures fixes. Avoir une forme dynamique dans notre emploi du temps, même si beaucoup de temps libre s’offre à nous.
 
  • Il ne faut pas se lever trop tard. Le matin à l’heure du petit déjeuner, la douche et une activité physique d’entretien pour bien commencer la journée.

Les repas sont des synchronisateurs, des donneurs d’ordres sur nos vies sociales explique-t-il. Il rythme nos journées. Il est donc important de les conserver à heures régulières : vers 12 ou 13 heures et le soir vers 19 heures.  

  • Il est important de continuer à suivre des conseils déjà donnés avant cette nouvelle vie de confinés. Il faut éviter le grignotage en journée à la maison. L’anxiété peut amener à un comportement addictif néfaste.
 
  • Une personne stressée ou angoissée par la situation actuelle devra s’imposer de ne plus regarder les informations au-delà de 21h30.

Ces conseils s’adressent évidemment à nos enfants. Il faut aussi donner du rythme à leur confinement. Ne pas les laisser dormir trop tard sous prétexte qu’il n’a rien à faire. Ne faut pas trop les laisser s’occuper seuls mais les inciter à alterner temps de pause, repas et activités. Les faire bouger aussi.
 

Eviter de les laisser trop longtemps devant les écrans de télévision ou d’ordinateur reste un conseil toujours d’actualité.

Les femmes et les hommes inégaux devant le sommeil

Pour faire simple : pour des raisons génétiques et hormonales, les femmes auraient tendance à se coucher plus tôt et à se lever plus tôt, à l’inverse des hommes. Ce décalage entre les deux sexes incite donc souvent les femmes à se caler sur le rythme des hommes. De ce fait, elles peuvent se sentir plus fatiguées.

Prendre le soleil

Parmi les autres conseils pour aider votre organisme à retrouver le sommeil : s’exposer (avec prudence) à la lumière du jour entre 11 heures et 15 heures. Quand la luminosité est la plus forte.
Exposé au soleil, notre corps sécrète de la mélatonine (l’hormone dite du sommeil). Celle-ci agit toujours en décalage, 12 heures plus tard, durant la nuit, en réponse au manque de lumière naturelle. Il est donc important d’aider notre corps en produisant naturellement cette hormone.
 

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A noter qu’à partir de 50 ans, le taux de mélatonine a tendance à diminuer. Même quand on s’expose beaucoup au soleil. En ce cas, Marc Martin vous incite à prendre conseil auprès de votre pharmacien qui pourra vous procurer de la mélatonine en comprimés.

Les somnifères : la fausse bonne idée ? 

Marc Martin l’avoue d’emblée. "Je suis un médecin qui privilégie les thérapies naturelles. Depuis 20 ans que je suis au CHU de Rouen, je puis vous l’affirmer : il n y a pas de médicaments miracles contre les troubles du sommeil."

Il met même en garde certaines croyances :

Attention à ces somnifères qui peuvent se révéler au final être des drogues.

Il fait référence aux médicaments contenant des Benzodiazépines. Ce mélange de molécules donne l’illusion que l’on dort mieux. Il n’en est rien en fait, selon notre spécialiste normand.

"Ces produits à base de benzodiazépines parviennent à tromper notre cerveau. Ils effacent le souvenir de notre nuit. Vous pensez avoir bien dormi alors que ce n’est pas forcément le cas puisque, à votre réveil les souvenirs de votre nuit sont effacés."
 

"Il y a un risque de dépendance à ce type de produits qui au final pourrait s’avérer être une drogue. Une drogue qui sur le long terme est suspectée de favoriser la maladie d’Alzheimer. "

La nécessité de rêver

"Je suis un grand défenseur des rêves !". Et effectivement, le docteur Martin rappelle la nécessité de bien dormir.

"Lors de notre sommeil, notre cerveau continue de travailler. Il cherche des solutions à nos problèmes rencontrés durant notre sommeil. Ce sont nos rêves. La fixation de nos souvenirs se fait à ce moment là.  La nuit, on a donc besoin de rendre disponible notre cerveau pour ce travail."
 

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Pour aller plus loin

En l’absence de possibilité de pouvoir consulter un spécialiste du sommeil, le docteur Martin nous invite à consulter le site de l’INSV, l'Institut National du Sommeil et de Vigilance. Vous y trouverez d’autres conseils et des réponses à d’autres questions.
 
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