Avec le soutien du syndicat CGT, un piquet de grève a été installé à Saint-Etienne du Rouvray (Seine-Maritime) pour défendre les droits de livreurs salariés d'un sous-traitant d'Amazon.
C'est au sud de Rouen qu'une mobilisation a été organisée le jeudi 28 avril 2022 par le syndicat CGT à l'entrée de l'entrepôt d'Amazon de Saint-Etienne-du-Rouvray. Comme la veille à Grand-Quevilly (avec les poseurs de fibre optique qui travaillent pour le compte d'Orange), c'est le système de sous-traitance et de ses effets pervers qui était à l'origine du rassemblement syndical et de la distribution de tracts.
En cause : le cas de 9 salariés. Embauchés en CDI, ils se sont fait licencier - oralement - après plusieurs mois de travail acharné passés à livrer des colis pour le compte d'Amazon, via la société Lumina Services. En 2020, pendant les fêtes de fin d'année, ils ont connu des conditions de travail particulièrement difficiles avec plus de 200 colis à livrer par jour.
"Au mois de février, à notre grande surprise, la responsable nous a fait savoir qu'elle ne voulait plus de nous !"
Patrick Djanal, un des livreurs de Lumina Services
Sur le plan administratif, huit de ces salariés sont sans papiers. Une situation qui était connue de l'employeur puisque selon les témoignages recueillis sur place par notre journaliste Marion Chevalet, Lumina Services aurait recruté ces livreurs expérimentés en leur faisant miroiter des papiers en règle, en récompense de leur investissement.
Une promesse non tenue d'où la décision de mener une grève et d'alerter sur leur situation. Contactée par téléphone, la dirigeante de Lumina Services n'a pas souhaité répondre à nos sollicitations.
Le géant, de son côté, indique "investiguer ces remontées". Vendredi 29 avril, le service presse d'Amazon nous a fait parvenir ce communiqué :
Les sociétés de livraison avec lesquelles travaille Amazon embauchent et gèrent leurs propres équipes. Nous sommes intransigeants sur le fait que ces dernières se doivent de respecter les lois en vigueur, ainsi que le code de conduite des fournisseurs Amazon. Nos équipes auditent régulièrement ces sociétés afin de s’assurer de leur conformité. Nous sommes actuellement en train d’investiguer ces remontées et nous prendrons les mesures appropriées si notre partenaire de livraison ne respectait pas ces exigences.
Service presse d'Amazon
Précarité et "sociétés écrans"
Pour les représentants syndicaux, cette situation est inacceptable et est un exemple de la précarisation de l'emploi et de mauvaises pratiques de la sous-traitance par certaines entreprises, comme l'a expliqué Pierre Louvard, de l'Union locale CGT de Rouen, à notre journaliste Marion Chevalet :
"Il faut dire que ce sont des sociétés qui n'ont pas de réalité. Elles n'ont pas véritablement de véhicules : elles en louent avec la caution d'Amazon. Les salariés ont des badges d'Amazon. Les salariés ont des smartphones Amazon pour faire les livraisons. Ce sont donc des sociétés totalement écrans qui n'ont pas de bureaux, qui n'ont pas de dépôts ni de véhicules, qui servent en fait à sous-payer les livreurs d'Amazon !"
La CGT accompagne ces livreurs dans la reconnaissance de leur droit : ils espèrent obtenir le règlement des salaires non payés par leur employeur, la régularisation de leurs papiers et une promesse d'embauche suite à la signature de leurs contrats.
Les 9 livreurs figureront en tête du cortège de la CGT lors de la traditionnelle manifestation du 1er mai.