L'an dernier, dans l'Eure, près d'un établissement de pisciculture sur deux avait été la cible de vols de poissons... Un phénomène qui prend de l'ampleur et s'étend désormais à la Seine-Maritime : début janvier, les bassins de Saint-Wandrille ont été visés par une tentative de pillage de truites d'élevages.
Comment contrer les voleurs de truites ? Pourquoi un tel trafic ? A Rives-en-Seine (Seine-Maritime), sur l'ancienne commune de Saint-Wandrille-Rançon, Adélie Martin Wagner, gérante de la la pisciculture Normand'Truites, s'inquiète : d'autant que 14 vols similaires ont été comptabilisés en 2023 dans l'Eure.
Plusieurs centaines de kilogrammes de truites menacées
Les intrus, non identifiés à ce stade, ont pénétré sur la propriété dans la nuit du 4 au 5 janvier, armés d'épuisettes. "On a reçu un appel en pleine nuit. Les gendarmes sont intervenus - ça crée forcément une tension à laquelle on ne se prépare jamais très bien", avoue Adélie Martin Wagner.
Une fois que l'on a été visité et que l'on constate que l'objectif était de voler une grande quantité de poisson, on imagine que les intrus vont revenir, que notre site et notre production sont en danger. C'est une vraie question qui se pose.
Adélie Martin Wagner, propriétaire de Normand'Truitesà France 3 Normandie
Si la tentative de pillage se solde par un échec et que le butin est abandonné sur place, le vol de ces poissons aurait pu avoir un impact sévère sur l'activité de la pisciculture : "si l'on se réfère à ce que l'on a retrouvé une fois l'opération avortée, on peut supposer qu'ils étaient là pour voler une grosse quantité de poissons", assure l'éleveuse, précisant "qu'une dizaine de sacs" d'une capacité de 20 à 30 kg ont été retrouvés sur les lieux.
200 à 300 kg de truites auraient ainsi pu disparaître de l'exploitation. Une manne financière pouvant atteindre plusieurs milliers d'euros.
"On ne maîtrise plus la chaîne de revente"
De nombreuses questions restent désormais en suspens. Pourquoi ce vol ? Est-ce le fruit d'une organisation rodée, la même qui sévit dans le département voisin ? "On n'est pas sur un vol de voisinage. On était déjà en alerte puisque nos collègues de l'Eure ont été victimes des mêmes intrusions. On a un produit de qualité, fortement demandé par une clientèle d'amateurs", relève Adélie Martin Wagner.
"Où les poissons sont-ils commercialisés, revendus, transformés ?", s'interroge désormais l'exploitante, ajoutant que ces phénomènes posent "des problèmes de traçabilité" sur les produits : "on ne maîtrise plus la chaîne de revente !"
Le 15 décembre dernier, une réunion avait été organisée à l’initiative du sous-préfet de Bernay afin de faire le point sur ce phénomène inquiétant. Les témoignages évoquent des poissons "assommés" avant d'être enfermés dans des sacs.
Les truites arc-en-ciel ou fario peuvent atteindre 70 euros/kg à la revente. Il s'agit également d'un produit plébiscité par les Français, notamment sur les tables de fête : selon le bilan des ventes de fin d'année de NielsenIQ, à Noël et au jour de l'an, les ventes de saumon fumé en volume ont reculé de 6,7% tandis que celles de la truite fumée ont progressé de 11%.