Un ancien agent de la cellule anti-blanchiment Tracfin, Olivier Thérondel, comparaît vendredi devant le tribunal correctionnel de Paris pour avoir révélé et critiqué sur un blog l'attitude de sa hiérarchie dans l'affaire du compte bancaire caché de Jérôme Cahuzac.
Poursuivi pour violation du secret professionnel, le prévenu revendique le statut de lanceur d'alerte et espère la clémence de la 17e chambre correctionnelle. Sur un blog hébergé par Mediapart, Olivier Thérondel avait publié les 22 et 26 avril deux billets, retirés depuis, qui mettaient en cause les consignes de sa hiérarchie dans le suivi du dossier de Jérôme Cahuzac, l'ancien ministre du Budget contraint à la démission après des mois de mensonge sur sa possession d'un compte bancaire à l'étranger.
Selon l'agent, une banque, dont il n'a pas communiqué l'identité, avait transmis à Tracfin, le 5 avril, une déclaration de soupçon. Elle indiquait qu'elle devait recevoir sur un compte français détenu par Jérôme Cahuzac, 685.000 euros en plusieurs virements, en provenance d'un autre établissement à Singapour. Selon son récit, M. Thérondel avait enregistré cette déclaration, mais lorsqu'étaient parvenues les informations relatives aux transferts effectifs, son supérieur direct l'avait enjoint oralement de ne plus effectuer d'opérations liées aux comptes de Jérôme Cahuzac.
A ce moment-là, le juge Renaud van Ruymbeke était déjà saisi d'une information judiciaire contre l'ancien ministre. Ce dernier avait affirmé sur son blog, le 2 avril, qu'il avait "donné les instructions nécessaires pour que l'intégralité des actifs" de son compte à l'étranger, "soit environ 600.000 euros, soient rapatriés sur (son) compte bancaire à Paris".
Avec la loi contre la fraude fiscale, qui avait été décidée par le gouvernement justement après le scandale Cahuzac, les lanceurs d'alerte sont aujourd'hui mieux protégés. Ils ne peuvent notamment être sanctionnés s'ils ont dénoncé de bonne foi un délit. En septembre, Olivier Thérondel a été suspendu de Tracfin et a été réaffecté aux douanes, son corps d'origine, en région parisienne. Il fait aussi l'objet d'une procédure disciplinaire.