Dès son entrée au ministère de l'Ecologie, Ségolène Royal a annoncé qu'elle souhaitait une "remise à plat" de l'écotaxe en France. La commission parlementaire sur le développement durable de l'Assemblée Nationale qui rend aujourd'hui un rapport désavoue la ministre.
La mission d'information propose de l'aménager mais pas de l'abandonner et juge "désastreux" un éventuel abandon de la taxe poids-lourds. Le dispositif a été suspendu par le gouvernement après une vague de manifestations notamment en Bretagne mais aussi en Poitou-Charentes. Les parlementaires propose non pas de l'abandonner mais de l'aménager, notamment par l'instauration d'une franchise kilométrique et en le renommant "éco-redevance poids lourds".Le dispositif doit être conservé, mais aménagé pour moins pénaliser les entreprises du secteur du transport, et être mieux accepté, plaide la mission d'information dans son rapport publié mercredi.
La mission, qui travaille depuis novembre dernier sous la présidence du député (PS) Jean-Paul Chanteguet, a formulé 13 propositions pour faire évoluer le dispositif.
Elle a également écarté plusieurs solutions, dont celle évoquée par la ministre de l'Écologie Ségolène Royal, de mettre à contribution les sociétés d'autoroutes.
Un péage plutôt qu'une taxe et un changement de nom
Ainsi, l'écotaxe devrait être renommée "éco-redevance poids lourds", car il s'agit d'un péage plus que d'une taxe. Prélevée sur les camions qui empruntent certaines routes, elle sera affectée à leur entretien, et au financement de projets d'infrastructures ferroviaires ou fluviales, ou de transports en commun.Ce changement de nom doit permettre une meilleure acceptation d'un dispositif destiné, à terme, à favoriser le report vers le ferroviaire ou le fluvial, ou éviter que des camions ne circulent en étant partiellement vides.
Une franchise kilométrique de 400 km par mois et des exonérations
La principale mesure du rapport est l'instauration d'une franchise kilométrique, qui permettrait aux poids lourds effectuant des trajets courts de ne pas être pénalisés par ce système. Une franchise de 400 kilomètres par mois pourrait être accordée aux transporteurs ne faisant que des trajets de proximité.La mission s'oppose également à la proposition de Ségolène Royal de taxer uniquement les routiers étrangers en expliquant qu'elle est en contradiction avec le droit européen.
Des exonérations sont par ailleurs imaginées pour certains types de poids lourds.
Les exonérations prévues dans le précédent système, comme les véhicules de collecte de lait, sont conservées dans ce rapport, de même que les abattements tarifaires prévus pour les régions périphériques, et notamment la Bretagne, terre de la révolte des "Bonnets Rouges". En revanche selon nos confrères de RTL, l'idée d'exonérer certaines régions au-delà des 50% de décote déjà accordés à la Bretagne serait abandonnée.
Parmi les propositions du rapport, figure également la création d'un fonds destiné à la modernisation du parc de poids lourds.
Un contrat trop coûteux à abandonner
Par ailleurs, le contrat avec la société Ecomouv' - chargée de la mise en place du système et de la collecte - qui est l'objet d'une commission d'enquête menée au Sénat, serait maintenu, car, en tout état de cause, beaucoup trop coûteux pour l'Etat à abandonner.Les députés proposeraient de commencer la mise en place de "l'éco-redevance" par une simulation, "une marche à blanc" de quelques mois destinée à tester le système, sans que les montants calculés ne soient facturés. L'éco-redevance pourrait ainsi commencer au 1er janvier.
Ségolène Royal toujours opposée à l'écotaxe
Interrogée le 30 avril par cette mission d'information, Ségolène Royal avait indiqué "qu'au mois de juin, les choses se feront". La ministre de l'écologie avait affirmé en avril devant les députés qu'elle attendrait les résultats du rapport pour prendre des décisions sur l'écotaxe, une redevance qui devait rapporter plus de 800 millions d'euros par an à l'Etat.«La commission part du principe que l'écotaxe va être appliquée. Moi, je pense le contraire», déclare Ségolène Royal dans une interview à Paris Match à paraître jeudi. "Rien ne ne me parait aller de soi dans cette affaire. Ni le contrat signé avec Ecomouv qui, je le rappelle, date du gouvernement Fillon. Ni le but poursuivi. Le mot même d'écotaxe est pour moi condamné".
Ce mercredi à la sortie du conseil des ministres, Ségolène Royal est revenu sur ce dossier en déclarant "le gouvernement va regarder l'ensemble des propositions et prendra une décision courant juin sans doute".