Alors que l'Assemblée Nationale commence aujourd'hui l'examen de la loi santé qui doit notamment généraliser le tiers payant, les syndicats de médecins appellent à une journée santé morte. Ils incitent également les généralistes à augmenter eux-mêmes le tarif de leurs consultations, de 23 à 25 euros
Après avoir été plusieurs fois reporté, l'examen de la loi santé, chère à Marisol Touraine, doit commencer ce mardi et devrait durer deux semaines.
Ce sera une première lecture en procédure accélérée dont le vote est fixé au 14 avril.
Ce projet de loi devrait faire l'objet de multiples attaques de la part des élus de droite. En revanche ceux de gauche devraient le soutenir sans problème.
Mais l'étude du texte sera perturbée par un nouveau mouvement de grogne des médecins. Ils devraient se rassembler devant le palais Bourbon et fermer leurs cabinets ce mardi.
Très remontés contre la généralisation programmée du tiers payant en 2017, ils entendent ainsi mettre la pression sur les parlementaires.
La CSMF (médecins libéraux), suivie par MG France (généralistes) et la FMF (Fédération des médecins de France), ont appelé à une "journée santé morte".
Leur mobilisation, ainsi que celle des cliniques qui craignent d'être écartées du service public hospitalier, n'a pas cessé depuis la présentation du projet de loi en octobre.
Marisol Touraine maintien le cap malgré tout
Bien qu'étant la cible d'attaques personnelles répétées, la ministre de la santé, épaulée par Manuel Valls, veut faire voter cette loi.
Elle prévoit que la dispense d'avance de frais sera mise en place par étapes puis étendue jusqu'à devenir un droit pour tous les assurés au 30 novembre 2017.
Les députés socialistes ont demandé à Marisol Touraine de ne pas céder sur cette mesure de "justice sociale", promesse de campagne de François Hollande.
Une réforme également chère aux écologistes, qui souhaitent même son "accélération", ainsi qu'aux radicaux de gauche et au Front de gauche, qui tient à ce qu'il soit une obligation pour les médecins.
La droite radicalement contre le projet
A l'inverse, la droite, et le président de l'UMP Nicolas Sarkozy au premier chef, s'est largement fait le relais des revendications du personnel soignant.
L'opposition promet à l'Assemblée de combattre vigoureusement le projet du gouvernement qui va "occasionner une surconsommation médicale" et demander "davantage de travail administratif pour les médecins", selon le chef de file des députés UMP Christian
Jacob.
Son homologue à l'UDI Philippe Vigier dénonce "l'obstination sans fin" de Marisol Touraine sur ce tiers payant.
La droite regrette par ailleurs l'absence de "réforme structurelle" dans ce projet de loi "fourre-tout".
Moderniser le système de santé
En abordant dans le texte de nombreux autres sujets, l'ambition du gouvernement est de "moderniser notre système de santé", en s'appuyant notamment sur la prévention (lutte contre le tabagisme, contre l'alcoolisation des jeunes, information nutritionnelle...) et sur les soins de proximité (tiers payant généralisé, mais aussi médecin traitant pivot...).
Les 57 articles du projet de loi ont déjà été amplement complétés en commission par des amendements principalement du gouvernement et des cinq rapporteurs. Notamment sur le droit à l'oubli pour les anciens malades du cancer, le don d'organes ou encore la suppression du délai de réflexion pour une IVG.
Près de 2.400 amendements ont été déposés pour la séance, d'autant que de nombreux parlementaires eux-mêmes médecins ou pharmaciens s'investissent en matière de santé.
Ces sujets sont aussi propices aux interventions des lobbies de l'agroalimentaire, du tabac ou de l'alcool.
Les points chers à chaque parti
Outre le point dur du tiers payant, l'UMP entend batailler contre une "étatisation" de la santé, une logique "punitive" en matière d'alimentation, et encore l'expérimentation de salles de shoot.
Pour leur part, les socialistes entendent enrichir le projet avec notamment l'amendement d'Olivier Véran visant à interdire le recours à des mannequins dénutris.
Les écologistes voudraient eux introduire davantage de santé environnementale et les radicaux de gauche souhaitent davantage de démocratie sanitaire. Ces deux groupes préviennent qu'ils
pourraient globalement s'abstenir s'ils n'obtiennent pas satisfaction.
De leur côté, les députés du Front de gauche déplorent un manque d'ambition en raison de la baisse du budget de l'Etat alloué à la santé. Ils n'ont pas encore arrêté leur position sur leur vote.