À la veille du blocage annoncé d'Angoulême et un an après l'acte 1 du mouvement des Gilets jaunes, portrait d'un homme et d'une femme, militants de la première heure. Leurs vies ont été bouleversées par cette mobilisation, ils racontent comment.
Un gilet jaune en signe de protestation. Un emblème pour des français à bout de souffle, pour qui les fins de mois sont synonymes d’angoisses. Mais un an après le mouvement, que sont devenus ces hommes et ces femmes, qui, pour exprimer leur colère, se donnaient rendez-vous le samedi sur les ronds-points ?
"Je ne remplissais plus le frigo"
Aya et Yoan font partis de ceux que l’on a appelé les oubliés ou les invisibles. Dès le début du mouvement des Gilets jaunes, ils se sont sentis concernés. Aujourd’hui, ces deux militants de la première heure ont plus ou moins pris leur distance. Un an après son "premier rond-point", Yoan se souvient de ce qui l’a poussé à enfiler son gilet jaune.Le samedi 17 novembre 2018, des milliers de français se rassemblent pour protester contre la hausse du prix du carburant. Parmi eux, Aya, militante de la première heure.« Je ne remplissais plus le frigo, je payais de plus en plus de choses et je perdais tout ce qui m’appartenait, le peu qui m'appartenait. J’allais me retrouver sans rien ! »
- Yoan Lotellier
Pour moi, le déclic ça a été la taxe sur les carburants, mais pas uniquement. Je suis sortie pour un ensemble de choses, un ras-le-bol général et un manque de confiance envers le gouvernement.
- Aya
Une lutte aux lourdes conséquences
Un an après ce samedi qui en appellera de nombreux autres, l’étiquette de Gilets jaunes ne semble pas toujours facile à porter. Pour Yoan, cette lutte a eu un prix encore plus lourd...Yoan a été placé en détention provisoire pendant un mois et a été condamné à quatre mois de prison avec sursis, pour des dégradations volontaires en réunion. Un événement qui l’a poussé à être plus prudent aujourd’hui.Après le mouvement, j’ai perdu principalement ma femme, mes enfants que je suis aujourd’hui en bonne voie de reconquérir et je me bats tous les jours pour ça. J’ai aussi perdu des amis, des personnes en qui j'avais confiance et peut-être également la confiance en moi. J’avais confiance dans le côté juste de ce combat. Mais après, la justice m’a rappelé que la méthode que j’ai utilisée pour manifester ma colère, n’est pas adaptée à la société d’aujourd’hui.
- Yoan Lotellier
Rêver de révolution
Le 17 novembre dernier, leur priorité c'était avant tout être ensemble, refaire le monde et des cabanes, filtrer la circulation, rêver de révolution. Un engagement que ne regrette ni Yoan, ni Aya.Aujourd’hui, Aya et Yoan ont pris des chemins différents. Lui, participe encore à chaque samedi de mobilisation, mais désormais en tant qu'observateur. Il filme et anime des directs sur internet. Elle, est devenue une militante engagée dans des actions de désobéissance citoyenne.Ça a été une période très intense, où j’ai noué des liens avec des personnes que je n’aurais pas forcément côtoyées sinon. Ce qui ressort vraiment, c’est la solidarité qui est restée entre nous. C’est une valeur importante que j'ai redécouvert pendant le mouvement.
- Aya
Mais, tous deux espèrent maintenant une convergence des luttes, pour une meilleure efficacité politique.
Retrouvez ici le dossier réalisé par Marie-Ange Christofari, Émilie Sizarols, Martine Sitaud et Elsa Pelletier.