Le ras-le-bol de la police touche aussi les agents bordelais. Ils se sont retrouvés place de la République à 22 heures mercredi, faisant face au palais de justice. Ils dénoncent des conditions de travail qui se dégradent et les violences dont ils font de plus en plus souvent l'objet.
Malgré la promesse du gouvernement d'étudier les revendications des policiers, dont les mobilisations se multiplient partout en France, la colère reste forte au sein de la profession.
Les premiers rassemblements ont eu lieu dans l'Essonne lundi soir et à Paris où 300 agents en civil ont marché sur les Champs-Elysées, scandant "Cazeneuve t'as perdu, la police est dans la rue!".
Ce mouvement, qui s'est depuis étendu à plusieurs grandes villes françaises, s'est déclenché suite à l'attaque d'une voiture de police le 8 octobre dernier à Viry-Châtillon. Un adjoint de sécurité et une gardienne de la paix avaient été très gravement blessés.
Mardi et mercredi soir des centaines de policiers se sont mobilisés à Marseille, Nice, Nancy ou encore Toulouse pour dire leur malaise.
La patte du FN
A quelques mois de la présidentielle, la fronde a viré à la polémique politique. Le patron des socialistes Jean-Christophe Cambadélis a dénoncé la "patte" du Front National dans ces actions "hors la loi".
De son côté, Julien Dray proche de François Hollande, a estimé qu'il "faut réfléchir au statut de ces policiers et surtout des conditions de travail. Bref pas tout réduire à une manipulation même s'il est vrai que le FN a une implantation électorale forte" sur sa page Facebook jeudi matin.
Calmer le jeu
Sous le feu des critiques, l'exécutif s'est employé à calmer le jeu. François Hollande a réaffirmé son "soutien" aux policiers et appelé au "dialogue".
Le ministre de l'Intérieur Bernard Cazeneuve a reçu "en urgence" dans l'après-midi les syndicats, à leur demande, pour leur annoncer le lancement dès lundi de concertations dans les départements sur les revendications policières.
Les conclusions seront remises "en décembre pour mise en oeuvre immédiate dès 2017".
Un plan "de sécurité publique" sera lancé en novembre et "complété des résultats de la concertation", a assuré Bernard Cazeneuve, promettant un "dialogue riche", sur la dotation en nouveaux matériels ou l'amélioration des conditions de travail.
Les policiers à bout
Les syndicats, confrontés eux-mêmes à la colère de la base, ont ensuite été reçus longuement par le garde des Sceaux.
Alors que les policiers dénoncent régulièrement "l'impunité" dont jouiraient leurs agresseurs, Jean-Jacques Urvoas a promis "la plus grande fermeté".
A la sortie, le secrétaire général adjoint du syndicat Alliance, Frédéric Lagache, s'est cependant dit "déçu" par l'absence de "réponse", notamment sur un changement des règles de la légitime défense.
Le syndicat demande désormais "une audience au président de la République". Mais Yves Lefebvre, d'Unité-Police SGP-FO, s'est félicité d'"un bon dialogue". Ce syndicat a appelé à une manifestation silencieuse, "une marche de la colère policière et citoyenne", le mercredi 26 octobre.
Alors que les forces de l'ordre sont très sollicitées en pleine lutte antiterroriste, les policiers exigent des renforts et des moyens, et se plaignent d'un surplus de gardes dites statiques.
Mobilisation illégale
Cette contestation qui semble se généraliser a pris de court les autorités.
Le directeur général de la police nationale (DGPN), Jean-Marc Falcone, qui avait rencontré mardi soir des policiers de l'Essonne à Évry, a dit comprendre "l'exaspération, les craintes et les angoisses" des agents, tout en déplorant que certains aient "utilisé des véhicules" et des "moyens" de la police "pendant leurs heures de service".
Le patron de la police, qui avait adressé mardi un ferme rappel à l'ordre à ses troupes, était reparti dans la soirée sous les huées de quelque 400 fonctionnaires venus soutenir leurs collègues menacés de sanctions.