Émotion aujourd'hui au tribunal de Bordeaux avec le témoignage de la fille de l'assassin présumé d'Edith Muhr, puis les jurés ont écouté experts, témoins alignant des preuves accablantes pour l'accusé.
Dans la salle d'audience tout le monde retient son souffle et la fille de l'accusé, dont la sidération reste intacte, étrangle un sanglot.
"Je suis horrifiée", dit-elle, longue chevelure brune ramassée sur le côté, blouson en cuir féminin, jean et bottes montantes, une étudiante presque comme les autres.
Cet homme là "je ne le reconnais pas". "Le père que j'ai connu c'était un père gentil, attentionné, qui me demandait tous les jours comment cela s'est passé à l'école". Ce qu'il a fait "c'est impossible".
Sur sa droite, dans cette grande salle de cour d'assises de Bordeaux, le père reste le regard rivé sur le sol. Michel Regaldo, le président, lui demande alors si elle pense qu'il a été atteint d'un problème mental "majeur", l'une des interrogations sur lesquelles la défense, qui a voulu ce procès en appel, semble vouloir s'appuyer. "C'est la seule explication que j'ai", répond-t-elle. "Je n'en ai pas d'autre".
"Quand vous le voyez en prison, de quoi vous parlez ?", demande encore le président: "Du temps, des saisons qui passent". La salle reste en silence.
L'avocate de l'accusé, Me Christine Maze, a du mal elle aussi, à réprimer son émotion. Puis la jeune C. quitte la salle, le visage rougi par les larmes, après avoir expliqué qu'elle a passé un concours pour devenir officier dans la Marine et aussi comme "greffière des services judiciaires".
Après cette parenthèse d'humanité, les jurés ont écouté mercredi experts et témoignages accablants pour l'accusé, qui, lui a semblé absent, sans être honteux. Ainsi, une kinésithérapeute, entendue par vidéoconférence.
Ce 10 septembre, elle était venue soigner la mère de l'accusé. "En me dirigeant vers la maison, j'ai entendu les cris d'une femme", en provenance de la grange attenante, dit-elle. Il était environ 13h00. Sa patiente, la mère de l'accusé, qu'elle voyait deux fois par semaine, n'entend pas. Mais la kinésithérapeute est tellement surprise qu'au bout de dix minutes elle ressort, car elle a encore entendu des cris. "J'ai appelé". "Il est sorti. Je lui ai dit : j'entends crier. Il a répondu, non, tout va bien. Son comportement était tout à fait normal". "C'était des cris plaintifs... ah, pas les cris d'une femme en bonne santé. Elle était en souffrance". "Le chien était comme fou. Il s'est planté en direction de la grange", répète plusieurs fois Morgane Kervarrec, visiblement traumatisée.
Le biologiste Christian Doutremepuich, dont le laboratoire est souvent sollicité dans les enquêtes complexes est formel, en détaillant une liste d'objets sur lesquels du sang correspondant à l'ADN de la victime a été retrouvé dans la grange et à proximité: hachoir, scie, couteaux, échelles.
Bien avant, la famille de l'accusé avait quitté la salle.
Le procès se tient jusqu'à vendredi.
Le 10 septembre 2009, Edith Muhr, une Allemande de 68 ans qui vivait à Verdon (Dordogne), a disparu en milieu de journée alors qu'elle circulait à pied sur une route de campagne.
Yves Bureau, l'accusé, avait avoué le crime en garde à vue et a été condamné en première instance en septembre 2011 à la réclusion criminelle à perpétuité, assortie d'une période de sûreté de 20 ans.