Grève record annoncée dans l’Éducation nationale : le cri d’alarme d’une directrice d’école au bord de la crise de nerfs

Alors que l’Éducation nationale s’attend à un "jeudi noir" avec 75% de grévistes dans le premier degré selon une estimation du syndicat majoritaire, le SNUipp-FSU, nous avons recueilli le témoignage d’une directrice d’école en première ligne pour l’application des protocoles sanitaires. La profession vit un profond malaise depuis le début de la pandémie.

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"Je n’ai pas compris pourquoi les écoles ont rouvert le 3 janvier après les vacances", lance Christine Archaimbault, directrice d’une école maternelle à Tonnay-Charente (17). Pour elle, la mise en place des nouveaux protocoles à l’école nécessitait au moins quelques jours de préparation pour les chefs d’établissement et leurs équipes pédagogiques.

 

L'annonce gouvernementale qu’elle découvre alors dans les médias résonne comme la provocation de trop.

 

"La fameuse goutte d’eau qui fait déborder le vase. L’accumulation de ces deux années de m....". 

"Limite, le burn-out"

 

Au même moment, ses douleurs aux cervicales, latentes depuis déjà quelques semaines, deviennent insupportables. La directrice se résout à consulter son médecin qui lui prescrit un arrêt maladie. Mais sa souffrance physique cache un malaise plus profond. 

 

Son mari, attentif, le résume en quelques mots : "C’est limite le burn out". Sa fille tient aussi à la défendre et à la protéger dans cette épreuve. Comme pour désamorcer tous les préjugés envers une profession dite privilégiée : "Elle est plutôt du genre à être malade pendant ses vacances"

 

Les nerfs ont lâché. Et les mauvaises nouvelles continuent : "Là, on apprend par la radio qu’on n'a plus besoin de tests PCR pour les enfants et qu’il suffit d’un autotest et d’une attestation des parents.(soupir). C’est aberrant, on n'a aucun message de la part du ministère sur ce qui est réellement fait."

 

La seule communication reçue hier de sa hiérarchie émanait du secrétaire général de la direction académique. Il invitait, selon elle, les directeurs d’écoles à ne plus déclarer les cas de Covid. Un numéro de téléphone restait à leur disposition pour les conseiller. 

Le ministre gère ça n’importe comment, il faut qu’on regarde BFM TV pour avoir les informations

Christine Archaimbault, directrice d'école

Christine Archaimbault soutient le mouvement de grève qui se tiendra jeudi même si elle ne pourra raisonnablement pas y assister en raison de son arrêt de travail. Mais pour elle, les motifs de ce mouvement sont clairs. Elle dresse la liste : 

1- L’incohérence des protocoles sanitaires et le manque de soutien de l’administration pour les appliquer correctement.

2- L’absence de protections efficaces contre le virus : "On a toujours les mêmes masques en tissu. Les FFP2 ne vont aller qu’aux personnes vulnérables."

3- Le mépris du ministre de l’Éducation nationale, Jean-Michel Blanquer : "Il y a appel à sa démission au niveau des syndicats. Il gère ça n’importe comment, il faut qu’on regarde BFM TV pour avoir les informations."

 

En première ligne, parmi les « derniers de cordée » face à la crise du Covid, elle avoue qu’elle n’aurait pas tenu sans l’aide de ses proches et de ses collègues.

 

"Je ne suis pas seule. À la maison, ma famille est toujours présente et, à l’école, j’ai une équipe qui fonctionne très bien et des parents d’élèves majoritairement compréhensifs."

Mal-être à l'école et crise des vocations

Elle est aussi investie dans son syndicat, le SNUipp, où elle suit notamment le dossier social. Depuis quelques temps, elle reçoit de plus en plus de professeurs d’école avec un certain mal-être. 

 

"Au niveau du syndicat, j’ai beaucoup de demandes de calcul de retraite ou de départ pour construire un nouveau parcours professionnel. Ces personnes ne se voient pas continuer encore longtemps dans l’Éducation nationale."

 

Ce phénomène de crise des vocations était déjà présent avant la pandémie mais celle-ci n’a fait qu’amplifier la tendance à vouloir quitter la sacro-sainte institution. 

 

Pour Christine Archaimbault, l’heure de la retraite va bientôt sonner. Par anticipation. La pandémie l’a décidée à partir un peu plus tôt que prévu. 

 

"Ce sera pour 2023, j’aurai 59 ans et demi. J’ai eu trois enfants donc j’ai le droit de partir en retraite. Même si ce sera avec une belle décote".

 

Son quotidien de directrice d’école à l’heure du Covid a chassé ses derniers doutes. C’est une décision qu’elle prend sans regret. Elle va bientôt tourner la page d’une vie d’institutrice et de directrice. Pour elle aussi, c’était "le plus beau métier du monde".

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