Mercredi 20 novembre, les agriculteurs ont mené plusieurs actions en Charente. Ceux emmenés par les Jeunes agriculteurs ont déversé du fumier et des pneus devant les services de l'État basés à Angoulême. La Coordination rurale, de son côté, a lancé le blocage de la centrale d'achats de Leclerc à Ruffec.
Ce jeudi matin, Angoulême s’est réveillée avec une forte odeur de campagne. Une campagne particulièrement malodorante. Fumier, lisier, assaisonnés de pneus, une quarantaine de tracteurs sous la bannière des Jeunes agriculteurs (JA) de Charente ont fait le tour des services de l’État, dès la veille. Préfecture, Office français de la Biodiversité (OFB), Direction départementale des territoires (DDT), les agriculteurs ont exprimé vigoureusement leur mécontentement.
"Nous visons les instances du gouvernement pour maintenir la pression que nous appliquions l’année dernière. Car rien ne s’est passé depuis un an, détaille Jérémy Richard, président des JA 16. Il y a eu le mouvement avec les pancartes [En début de semaine, la FNSEA a bâché et démonté des panneaux portant le nom de communes, NDLR] mais au JA, nous nous sommes dits que cela ne suffisait pas."
À la DDT, particulièrement arrosée de lisier, les agriculteurs ont soulagé leur colère.
"Ce sont eux qui nous imposent les normes qui asphyxient notre métier", explique l’un des manifestants.
À Ruffec, dans le nord de la Charente, la Coordination rurale est entrée dans la danse. L’objectif de cet autre syndicat, encore plus à droite que la FNSEA, est de bloquer, sur le long terme, la SCACHAP, la centrale d’achats du groupe Leclerc qui approvisionne 36 supermarchés de Poitou-Charentes.
"Nous allons tenir plusieurs jours, plusieurs semaines, nous n’avons plus rien à perdre, déclare Eric Menanteau de la CR86. Beaucoup de nos collègues sont dans une situation très désespérée."
Le manque de revenus, les accords de libre-échange, dont le Mercosur, les normes contraignantes, la surcharge administrative, le coup de grâce a été donné cette année par la pluie qui a empêché les semis et fait pourrir les récoltes.
"Une majorité de nos collègues sont dans une situation très délicate économiquement, poursuit Eric Menanteau. Les banques ne veulent pas financer les réensemencements. Certains vont certainement être obligés d’arrêter leur activité, car ils n’ont pas les moyens de réensemencer."
Les agriculteurs ont installé un préfabriqué pour tenir longtemps. "Nous sommes tous solidaires, confie Cathie Cailleton, de la CR16. Il y a un an, j’étais sur la RN 141. Pour nous faire taire, ils ont lâché qu’ils allaient nous aider un peu, mais au final, il n’y a rien. Les aides de la PAC diminuent, nous croulons sous les papiers. Nous sommes dans les bureaux au lieu d’être dans les champs. Mais l’âme d’un agriculteur, c’est d’être dans les champs. Et j’ai un fiston de 19 ans qui est mordu par le métier et je me bats pour lui aujourd’hui."
La Coordination rurale de Charente étend son mouvement en ciblant d'autres centrales d’achats, celle d’Intermarché, à Roullet-Saint-Estèphe, et celle de Lidl, à Vars.
Vendredi, ce sera au tour de la Confédération paysanne de faire parler d’elle. Elle a prévu une mobilisation à Bressuire dans les Deux-Sèvres.