"Le pot de terre peut gagner contre le pot de fer" s'est félicité Paul françois après l'arrêt de la cour d'appel de Lyon confirmant le jugement qui avait reconnu la responsabilité du groupe américain Monsanto dans l'intoxication de l'agriculteur charentais. C'est une première en France.
Le géant chimique américain avait été condamné en première instance à Lyon en 2012 à "indemniser entièrement" l'agriculteur, partiellement handicapé et qui souffre d'importantes séquelles. Le groupe américain avait fait appel du jugement mais après l'arrêt de la cour d'appel, il devra donc bien l'indemniser "entièrement".
Un herbicide dangereux
A l'audience en mai dernier, Monsanto avait répété que son produit "n'était pas dangereux" et que "les dommages invoqués n'existent pas". Paul François est lui convaincu que la firme américaine connaissait les dangers du Lasso bien avant son interdiction en France en novembre 2007. Cet herbicide avait en effet été jugé dangereux et retiré du marché au Canada dès 1985 et depuis 1992 en Belgique et au Royaume-Uni.
10 ans de procédures
En 2005, Paul François avait demandé la reconnaissance de son état de santé en maladie professionnelle, qu'il obtiendra après 5 ans de procédure. Il a lancé au cours de la même période une procédure en responsabilité contre Monsanto qu'il a remporté en première instance par un jugement du 13 février 2012. La firme américaine avait alors déposé un appel. Mais la victoire de l'agriculteur charentais est confirmée par la cour d'appel de Lyon.
Pourvoi en cassation vraisemblable
"La décision est très surprenante eu égard aux inexactitudes et aux erreurs qui émaillent la thèse de Paul François. Mais ça n'est qu'une étape et la discussion va se poursuivre, le combat va se poursuivre", a réagi l'avocat de Monsanto, Me Jean-Daniel Bretzner, laissant entendre que le géant américain des semences et de l'agrochimie formera "vraisemblablement" un pourvoi en cassation.
Intoxiqué en nettoyant une cuve
La vie de Paul François a basculé le 27 avril 2004 alors qu'il vérifie une cuve ayant contenu du Lasso, "un herbicide pour le maïs que j'utilisais depuis au moins 15 ans" et qu'il inhale des vapeurs toxiques, explique Paul françois.Pris de malaise, il a juste le temps d'expliquer ce qui vient de se produire à son épouse avant de finir aux urgences, crachant du sang: "tout ce qui est arrivé après, je ne m'en souviens pas". Après cinq semaines d'arrêt, il reprend son travail mais souffre d'importants problèmes d'élocution, d'absences, de maux de tête violents. Fin novembre, il s'effondre sur le carrelage de sa maison, où ses filles le découvriront inconscient.
Le monochlorobenzène incriminé
S'ensuit une longue période d'hospitalisation durant laquelle les médecins craindront plus d'une fois pour sa vie, sans jamais faire le lien avec l'herbicide de Monsanto.Il faudra attendre mai 2005 pour identifier le coupable : le monochlorobenzène, solvant répertorié comme hautement toxique et entrant à 50% dans la composition de l'herbicide."D'examen en examen, de coma en coma, on a fini par trouver une importante défaillance au niveau cérébral. Là, ma famille a commencé à faire son enquête sur le Lasso", à ses frais, explique l'agriculteur.
Paul François sera à 19h l'invité du journal de France 3 Poitou-Charentes. Il répondra aux questions de Sophie Goux.