Anne Barsacq, 71 ans, Corrézienne d'adoption, entamait un voyage en camping-car vers le Portugal lorsqu'elle s'est retrouvée coincée par le confinement à Brive. Depuis sept semaines, elle vit confinée avec ses deux chiens sur une aire d'accueil déserte.
Elle en a vu d’autres. Mais cette situation de confinement est évidement une première. Voici l’histoire d’Anne Barsacq.
A 71 ans, cette femme est piégée depuis le 17 mars à Brive-La-Gaillarde, en Corrèze, sur une aire de camping-car déserte, en compagnie de ses deux chiens.
Une vaste étendue bitumée qui fait penser à un no man’s land. Derrière le complexe de cinéma. Prise en otage en quelque sorte.
Confinée, piégée dans une dizaine de mètres carrés.
Son périple a débuté à Sarran, en Corrèze. Il devait la conduire au Portugal. L’étape briviste en a décidé autrement.
Je me suis arrêtée ici le 15 mars pour faire des examens médicaux. L’annonce de Macron m’a pris de court.
« La ville a fermé l’aire d’accueil des camping-cars. Heureusement, la municipalité a été compréhensive et m’a permis de rester. En plus, elle m’a dit que je ne devais pas payer le stationnement et l’électricité. J’ai envoyé une lettre au maire pour le remercier », explique la naufragée de la route.
Corrézienne d’adoption
Pour beaucoup d’entre nous, le confinement est difficile à vivre. Pourtant, Anne fait face à l’isolement.
Pour comprendre comment, il faut remonter le cours du temps, de son temps.
D’emblée le jugement peut tomber, sans recul : une solitaire, à l’écart de la société. C’est tout le contraire.
Parisienne de naissance, ancienne directrice d’un centre d’hébergement et de réinsertion sociale à Marseille, mère de trois enfants, Anne et son mari choisissent de changer de vie. Ils posent leurs valises à Sarran, en Corrèze. Dans leur nouvelle maison transformée en chambre d’hôtes pour y recevoir les touristes. . Un lieu calme, en campagne, où ils s’occupaient aussi d’handicapés mentaux en tant qu’accueillants familiaux. Pendant dix ans. Et puis un déclic. De nouveau tailler la route, vers d’autres horizons.
Ça sera le Portugal. Mais seule. Enfin pas tout à fait. Prinz et Kaline, respectivement berger australien et croisé Husky/loup tchèque l’accompagnent.
J’ai acheté un camping-car que je revendrai sur place. J’ai choisi de m’établir au Portugal, dans une maison, dans les terres. Là-bas, les gens me semblent plus solidaires, plus conviviaux. Ils n’ont pas la même approche de la vie que nous les français. Les valeurs familiales sont plus fortes.
Confinement et littérature
Mais avant, il y a eu cette étape briviste forcée, depuis deux mois. Une galère ? Pas vraiment :
Je sors mes chiens plusieurs fois par jour. Et je vais faire des courses à l’hypermarché qui est tout près. Je ne trouve pas le temps long. Il faut essayer de se projeter vers l’avenir. A 71 ans, J’ai la chance d’être en bonne santé. Je suis à la fois optimiste et réaliste.
Pas de télé ? Peu importe. Sa passion de la lecture la nourrit. Actuellement Beaumarchais partage l’étagère avec le journaliste Mohamed Sifaoui. Ils sont à ses côtés.
Le 11 mai, si tout se passe comme prévu, elle reprendra la route.
« Comme les directives vont l’imposer, je ne vais pas pouvoir dans un premier temps aller au-delà de 100 kilomètres. Je vais faire étape chez une amie à Périgueux ». Et puis après le Portugal : « De toute façon, lorsque je décide de quelque chose après réflexion, rien ne m’arrête ».
La vie d’Anne Barsacq pourrait être source à roman. Il n’en sera rien. En tout cas pour l’instant. Peut-être aura-t-elle un jour l’envie de se raconter. Le Covid 19, elle l’a vécu. Mais elle ne l’aura pas subi. Au jour le jour, comme une combattante du quotidien, même lorsqu’il est exceptionnel.