Deuxième jour de blocage ce mardi 13 avril pour les bénévoles du Refuge animalier bortois. Ils s'opposent à l'euthanasie des six chiens qui avaient gravement blessé une retraitée en octobre 2020 à Lamazière-Basse. Pour sauver les molosses un recours a été déposé et les bénévoles montent la garde.

"Le maire et la préfète ne veulent pas lâcher et moi et les bénévoles ont ne veut pas lâcher." Dialogue de sourds à Bort-le-Orgues. Depuis mercredi 7 avril et cet arrêté exécutoire pris par le maire Eric Ziolo pour euthanasier les six chiens, le ton monte entre les autorités et les bénévoles du refuge animalier bortois. Depuis lundi matin 12 avril, une trentaine de bénévoles a dressé un barnum et tendu des banderoles devant l'entrée du refuge pour protester contre cette décision.

On n'ira pas à l'affrontement mais on ne participera pas à la mise à mort de ces chiens

Alexandre Chauvet, responsable du refuge

 

Lundi 12 avril, la propriétaire des animaux a déposé un recours en référé pour demander l'annulation de cet arrêté d'euthanasie. Une audience publique se tiendra le 20 avril devant le tribunal administratif de Limoges pour réexaminer les faits.  Le maire de Bort-les-Orgues l'assure,  il attendra cette nouvelle décision de justice et s'y conformera.  " Dans un recours en annulation il faut des arguments de fond. Donc on va voir ce que le juge répond à ceux de la propriétaire. Il faut des éléments et le premier c'est la morsure gravissime d'une dame de 71 ans qui est encore hospitalisée. C'est un élément qui compte quand même. Mais je comprends aussi l'opposition viscérale à l'euthanasie des défenseurs de la cause animale. Donc j'attends de voir si ça tient ou pas et on exécutera la décision du juge".

Il faut qu'on ait tous les éléments pour statuer et je suivrai la décision du tribunal

Eric Ziolo, maire de Bort-les-Orgues

Ce sursis n'a pourtant pas fait chuter la pression devant le refuge animalier bortois où les bénévoles refusent de baisser la garde. "Je me méfie, confie Alexandre Chauvet, le bénévole responsable du refuge. On n'est pas sûrs que le recours soit suspensif. On a peur d'un passage en force".

Alors au deuxième jour de la mobilisation, la vigilance ne faiblit pas devant le refuge où se relaient une trentaine de bénévoles. Ces amis des animaux se sont pris d'affection pour les cinq cané-corsos ( quatre adultes et un chiot) et pour le bulldog dont ils s'occupent depuis leur placement au refuge en octobre 2020. Aucun ne nie la gravité de l'agression ni la sévérité des blessures infligées à cette retraitée de 71 ans le 15 octobre 2020 à Lamazière-Basse. Mais ils soulignent le comportement exemplaire des molosses depuis leur arrivée au refuge.

Certains s'avouent sceptiques sur la dangerosité de ces chiens, d'autres émettent des doutes sur leur implication dans cette agression. " Je ne suis pas sûr qu'ils soient responsables", s'interroge encore Alexandre Chauvet, le bénévole responsable du refuge. L'enquête de gendarmerie est effectivement toujours en cours alors pour lui "il reste des zones d'ombre dans cette affaire et puis deux des six chiens étaient chez leur propriétaire au moment de l'attaque, alors pourquoi les euthanasier aussi ?" Des arguments qu'il développe longuement dans ce live publié dimanche 11 avril sur Facebook.

 Sur les réseaux sociaux, les soutiens se multiplient. Une pétition en ligne intitulée "stop à l'injustice, oui au droit à la vie des chiens" a été lancée pour empêcher l'euthanasie des six animaux. Elle enregistrait 37237 signatures mardi 13 avril. Un vétérinaire comportementaliste Thierry Bedosa qui a réalisé une contre-expertise des six chiens a proposé de les accueillir dans son refuge Ava. Un sanctuaire pour les animaux qui ont parfois commis l'irréparable et où le vétérinaire et son épouse tentent de les réhabiliter.

Une alternative qui n'avait pas été retenue par le tribunal administratif de Limoges en décembre 2020. Chargé d'examiner le recours en référé déposé par la propriétaire des chiens, le tribunal avait annulé l'arrêté d'euthanasie pris en novembre 2020 par la préfecture de la Corrèze en raison d'un vice de forme. C'était à la mairie de Bort et non à la préfecture de prendre cet arrêté (voir encadré). Mais le tribunal n'avait pas contesté sur le fond la décision d'euthanasier les chiens.  

C'est sur cette base qu'Eric Ziolo le maire de Bort-les-orgues a pris mercredi 7 avril cet arrêté exécutoire d'euthanasie. "C'était difficile de me dissocier de la décision du tribunal" explique le premier magistrat de la commune qui ne s'attendait pas à cet emballement du côté des bénévoles du refuge. "Je ne remets pas en cause leur action, ce sont des gens très investis et qui font énormément pour le refuge et les animaux." Mais ce qu'espère le maire, c'est qu'ils comprennent les raisons pour lesquelles selon lui ces chiens doivent être euthanasiés. 

Je ne desespère pas que les bénévoles comprennent les origines de cette histoire, l'agression gravissime de cette dame et qu'ils consentent à cette euthanasie.

Eric Ziolo, maire de Bort-les-Orgues

Une position soutenue par une majorité des 300 habitants de Lamazière-Basse. Selon le maire Jean-Pierre Delbègue "le village a été choqué par cette attaque" et ne comprend pas le soutien dont bénéficie ces chiens. "Cette dame a failli perdre la vie, alors aujourd'hui les Maziérois sont plus préoccupés par la santé de la victime que par le sort de ces chiens".

Ce que je souhaite, c'est que ces chiens ne reviennent pas sur la commune

Jean-Pierre Delbègue, maire de Lamazière-Basse

 

La victime est actuellement encore en convalescence à l'hôpital Jean Rebeyrol à Limoges, spécialisé notament dans la gérontologie clinique. D'après le maire de Lamazière "elle ne pourra jamais revenir chez elle" car les séquelles de l'agression sont trop invalidantes pour lui permettre de vivre en autonomie. Contacté par France 3 Limousin, la famille de la septuagénaire ne préfère pas témoigner mais un de ses membres confie néanmoins qu'ils sont "choqués par les proportions que cela prend sur les réseaux sociaux. Ça parle de défense de ces chiens et de la cause animale mais on oublie qu'une personne a failli perdre la vie et que ces chiens ont semé la terreur dans le hameau pendant deux mois."

Le refuge appartient à la mairie de Bort-les-Orgues. Si le tribunal administratif de Limoges confirme l'arrêté d'euthanasie, Alexandre Chauvet sait qu'il n'aura plus d'alternative. Pour le bien des chiens, il devra les emmener à la clinique vétérinaire de Bort, l'endroit le plus propice pour une fin dans le calme et les meilleures conditions possibles. Mais il sait aussi que ce sera très mal vécu par tous les bénévoles du refuge. " Je ne peux pas trahir mon équipe. Tout le travail du refuge, c'est les bénévoles. On est une famille, des amis. Si j'emmène les chiens à la clinique pour l'euthanasie, ils ne me le pardonneront pas" se désole tristement le bénévole.

 

 

Chronologie d'une agression

Le 15 octobre 2020, des chiens attaquent une habitante de Lamazière-basse âgée de 71 ans. Les morssures sont extrêmement sévères et nécessitent l'hospitalisation de la septuagénaire en soins intensifs pendant plusieurs mois. En réaction, la préfecture de la Corrèze prend début novembre 2020 un arrêté d'euthanasie. Les animaux ont des antécédents : ils avaient déjà mordu un gendarme, tué un chien et divaguaient régulièrement. Mais la propriétaire des chiens qui a depuis quitté la commune fait un recours en référé devant le tribunal administratif de Limoges. Elle obtient gain de cause non pas sur le fond mais sur la forme. C'est en effet au maire de la commune où les chiens ont été placés de prendre cet arrêté et non au Préfet. Début décembre 2020, l'arrêté est donc suspendu. Le temps passe, les chiens prennent leurs quartiers au refuge animalier bortois et c'est mercredi 9 avril 2021 que le maire de Bort-les-Orgues Eric Ziolo prend cet arrêté exécutoire d'euthanasie. La propriétaire fait de nouveau un recours. Aucune date n'est arrêtée pour l'euthanasie.

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