Le groupe de Tarnac sera-t-il jugé pour terrorisme ? Réponse de la Cour de cassation le 10 janvier

Policiers à Tarnac ( Corrèze),  11 novembre 2008
Quelles seraient les conséquences de l'abandon de la qualification terroriste dans l'affaire Tarnac. Fabrice Bidault journaliste à France 3 Limousin nous répond

La Cour de cassation a examiné ce mardi un pourvoi du parquet général de Paris et
de la SNCF, partie civile, contre l'abandon des poursuites terroristes pour Julien
Coupat et les membres du groupe de Tarnac.  La cour a mis sa décision en délibéré au 10 janvier.

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Pour le magistrat, "il est nécessaire que le terrorisme et l'entreprise terroriste
fassent l'objet d'une définition précise pour éviter de dénaturer cette notion,
la vider de son sens".
Or, dans le dossier Tarnac, il estime qu'il n'a été "mis
au jour aucun élément matériel" montrant que le groupe était engagé dans une entreprise
destinée à "troubler gravement l'ordre public par l'intimidation ou la terreur"
au sens du code pénal.
"Sauf à faire basculer dans le terrorisme un très grand nombre d'actions violentes
commises par des activistes se réclamant de la mouvance anarcho-autonome ou anarcho-situationniste,
il ne nous parait pas possible d'affirmer que l'existence de l'entreprise terroriste
serait caractérisée uniquement par l'adhésion à une littérature révolutionnaire",
a-t-il expliqué.

Pour affirmer le caractère terroriste des faits, le parquet s'est appuyé sur le
fameux pamphlet signé par le Comité invisible, "L'Insurrection qui vient", qu'il
attribue à Julien Coupat. Un texte qui ne laisserait selon lui "aucun doute quant
à la finalité de renverser par la violence l'Etat et détruire la société occidentale
actuelle". Pour le parquet, les actes de sabotage de voies de chemins de fer ne
constituaient que "la phase initiale" du processus.

"Rien ne nous permet de dire qu'ils avaient l'intention d'exercer des violences
contre les personnes", a estimé à l'audience l'avocat général.
En août 2015, les juges d'instruction avaient renvoyé devant le tribunal correctionnel
huit personnes, dont quatre pour association de malfaiteurs. Ils n'avaient retenu
qu'une opération de dégradations sur des lignes TGV dans la nuit du 7 au 8 novembre
2008 à Dhuisy (Seine-et-Marne) à l'encontre de Julien Coupat et de son ex-épouse
Yildune Lévy, qui nient les faits, sans qualification terroriste. Le parquet de
Paris avait fait appel.

La chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris avait confirmé le 28 juin
dernier l'ordonnance des juges. Le parquet général de Paris avait alors formé un
pourvoi en cassation, s'attirant des accusations d'"acharnement" de la part des
avocats de la défense.

Si les inculpés ont choisi de ne pas se présenter ni d’être représentés lors de cette audience, ils ont par contre adressé une lettre à la cour. A retrouver ici 

L’affaire de Tarnac, du nom de ce village de Corrèze, c’était en 2008. Des dégradations sur des lignes SNCF avaient provoqué d’importantes perturbations du trafic et de nombreux retards de trains. Plusieurs personnes avaient été interpellées dont Julien Coupat, qui résidait à Tarnac, sur le plateau de Millevaches. Il était soupçonné d’avoir été un des auteurs mais aussi le commanditaire des opérations de sabotage. Il a pour sa part toujours réfuté avoir commis tout acte de sabotage, et pas plus en être l’inspirateur.

« L'ULTRA GAUCHE MOUVANCE ANARCHO-AUTONOME »

Le parquet de Paris, en charge de l’affaire, a toujours souhaité voir les personnes soupçonnées des faits de sabotage être jugées pour association de malfaiteurs en lien avec une entreprise terroriste. Une lecture du dossier qui n’a pourtant jamais été suivie par les juges.

Sur la vingtaine de personnes interpellées au moment des faits appartenant, selon les termes de la ministre de l’intérieur de l’époque, Michèle Alliot-Marie, à « l'ultra gauche mouvance anarcho-autonome », seules 8 seront finalement mises en cause.

DES ANNÉES D'INSTRUCTION ET UN RENVOI DEVANT LE TRIBUNAL CORRECTIONNEL

Après des années d’instruction, en 2015, les juges décident de renvoyer ces 8 militants de la gauche révolutionnaire en correctionnelle, 4 pour des délits mineurs (dont le refus de se soumettre à des prélèvements ADN), les 4 autres, dont Julien Coupat et son ex compagne Yildune Lévy, pour associations de malfaiteurs, mais sans lien avec une entreprise terroriste, abandonnant toute charge de cette nature.

Le Parquet avait fait appel de cette décision. Mais la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris avait confirmé le 28 juin 2016 l'ordonnance des juges. Le parquet général de Paris avait alors formé un pourvoi en cassation, c’est ce pourvoi qui sera examiné mardi 13 décembre.

"AUCUN ÉLÉMENT MATÉRIEL"

Des sources proches du dossier citées par l’AFP indiquent que le Parquet pourrait, une nouvelle fois, être désavouées, l’avocat général de la Cour de cassation préconisant le rejet de la qualification terroriste.

Il n'a été "mis au jour aucun élément matériel" montrant que le groupe de Tarnac était engagé dans une entreprise destinée à "troubler gravement l'ordre public par l'intimidation ou la terreur" au sens du code pénal, a indiqué l'avocat général dans son avis écrit, a expliqué l'une des sources à l'AFP.

"Sauf à faire basculer dans le terrorisme un très grand nombre d'actions violentes commises par des activistes se réclamant de la mouvance anarcho-autonome ou anarcho-situationniste, il ne nous parait pas possible d'affirmer que l'existence de l'entreprise terroriste serait caractérisée uniquement par l'adhésion à une littérature révolutionnaire", a-t-il ajouté, selon ces propos rapportés par la même source.

Le parquet, pour affirmer le caractère terroriste des faits, s'appuyait au contraire sur le fameux pamphlet signé par le Comité invisible, "L'Insurrection qui vient", qu'il attribue à Julien Coupat. Un texte qui ne laisserait selon lui "aucun doute quant à la finalité de renverser par la violence l'Etat et détruire la société
occidentale actuelle".

A l’issue de cette audience du 13 décembre 2016, les auteurs présumés du sabotage des caténaires ayant entrainé des retards de train pour des milliers de voyageurs, pourraient donc être jugés par un tribunal correctionnel, donnant raison aux avocats de la défense qui n’ont eu de cesse de dénoncer « l’acharnement » dont leurs clients seraient la cible.

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