Plus de 5 ans après la terrible découverte d'un garagiste de Terrasson en Dordogne, le procès de Maria-Rosa Da Cruz, mère de l’enfant de 2 ans trouvée dans le coffre d’une voiture, commence ce lundi 12 novembre. Début du procès cet après-midi au Palais de Justice de Tulle.
Une naissance en secret, et deux ans d'une enfance cachée de tous, mari, enfants, voisinage : la cour d'assises de Corrèze juge à Tulle la mère de Séréna, le bébé dit "du coffre" (de voiture), un cas aux confluents troubles du déni de grossesse, de la dissimulation et de la maltraitance. La première audience a débuté.
Rappel des faits
En octobre 2013, un garagiste de Terrasson (Dordogne) découvrait stupéfait, dans le coffre de voiture d'une cliente, une enfant de près de deux ans dans un couffin, nue, sale, déshydratée, les yeux se révulsant, entourée d'excréments, mais aussi de jouets, le tout dans une odeur pestilentielle.
Combien de temps a-t-elle vécu là ? Quelle a été sa vie ? A-t-elle une identité ? Pompiers puis gendarmes alertés, la mère et son mari sont placés en garde à vue puis mis en examen, alors qu'émerge peu à peu, sidérant les médias et au-delà, l'histoire de Séréna -le prénom donné par sa mère- l'enfant cachée de tous.
Rosa, la mère âgée de 50 ans à présent, laissée libre sous contrôle judiciaire, comparaît à partir de 14h pour violences suivies de mutilation ou infirmité permanente sur mineur de 15 ans par ascendant, privation de soins ou d'aliments compromettant la santé d'un enfant par ascendant, et dissimulation ayant entraîné atteinte à l'état-civil d'un enfant.
#Serena, arrivée de la mère de Serena au TGI de #Tulle. Rosa Da Cruz comparait libre à son procès. Elle est mise en accusation pour violences volontaires ayant entraîné une infirmité permanente sur mineur. Elle encourt jusqu’à 15 ans de reclusion criminelle. @F3Limousin pic.twitter.com/5M8NsJaLv9
— Julie Radenac (@juradenac) 12 novembre 2018
Elle qui n'a pas fait de détention, encourt 20 ans de réclusion. L'affaire est jugée aux assises en raison du caractère "permanent" des séquelles de l'enfant, révélé par les expertises successives. Un "déficit fonctionnel à 80%", un "syndrome autistique vraisemblablement irréversible", a souligné une expertise mi-2016. Et un "lien de causalité" avec l'isolement vécu par l'enfant.
"Pas passée par la case socialisation"
Séréna qui aura 7 ans fin novembre, vit à présent en famille d'accueil. Ses trois frères et soeurs, aujourd'hui âgés de 11 à 17 ans, ont été rendus au couple après avoir été un temps placés. Car le mari a bénéficié d'un non-lieu.
Le procès, prévu jusqu'au 21 novembre, devrait donner lieu à des débats d'experts, d'une part sur les mécanismes par lesquels isolement, confinement, ont pu engendrer la "désorganisation précoce des récepteurs" qui font que l'enfant "n'est pas passée par la case socialisation" et en gardera la trace, comme le résume une partie civile.
Il sera aussi beaucoup, surtout, question de déni de grossesse et de sa portée, voire de ses limites. "On est totalement dans le déni de grossesse", avait estimé, tôt dans le dossier, l'avocate de l'accusée Me Chrystèle Chassagne-Delpech. Néanmoins, sa cliente n'a toutefois pas eu le "geste fatal" qu'ont de nombreuses femmes en déni de grossesse jusqu'au néonaticide, mais l'a "laissée en vie... d'une certaine façon", avait-elle dit.
C'est ce comportement "après" qui sera, lui aussi, interrogé. Cette zone grise entre maltraitance psychologique et émotionnelle, relevée par les experts, et les soins -biberons, câlins- que la mère assure avoir apportés à l'enfant. En secret, "enfermée dans un mensonge, dans un gouffre", comme elle l'expliquera sur TF1.
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