C'est une association atypique, mais indispensable pour ceux qu’elle aide. Hier à Seilhac, aujourd’hui à La Roche-Canillac, toujours en Corrèze, Concienta permet en effet à d'anciens détenus de se reconstruire et de se réinsérer après la prison, avec des statistiques de non-récidive assez exceptionnelles. Mais l’association est aujourd’hui menacée, faute de moyens.
Il nous faut 10 000€/mois de frais fixes, et là, tu vois, on est à 8 800. Donc fin décembre, si on n’a pas d’aides, il est probable qu’on doive fermer.
Marie-Ange NowakDéléguée générale de Concienta
Le constat est sans appel. Fatiguée à force de se battre, mais toujours lucide, Marie-Ange Nowak ne peut, ne veut se leurrer. L’association Concienta, dont elle est déléguée générale, est bien en grand danger.
"Ils sont mieux là à s’accrocher avec moi, à trouver des solutions, plutôt que dans un bar"
L’aventure a débuté en 2020, à Seilhac. Gilles Martin, ancien boxeur professionnel, lui-même passé par la prison, en est à l’initiative. Parce qu’au contraire de tant d’autres, lui a eu la chance d’avoir des mains tendues. De ne pas avoir, à sa sortie, comme seules alternatives, que la rue ou la récidive.
Alors en plus d’un hébergement, il propose, voire impose, la boxe, pour la reconstruction et la restauration, via un restaurant associatif, pour la réinsertion. Parallèlement, chaque ex-détenu accueilli est suivi et accompagné par des professionnels aidants, dans ses démarches de soins, de suivi administratif et de futur projet.
Un accompagnement, dont bénéficient actuellement seize ex-détenus, et que Gilles Martin juge essentiel : "la première protection, c’est la société, ici. Quand ils sont là, on les a à l’œil. Moi, quand je viens le soir et que ça ne va pas, ils sont mieux là à s’accrocher avec moi, à trouver des solutions, plutôt que dans un bar, à s’embrancher avec tout le monde. On désamorce le premier conflit. En deuxième, ils s’ouvrent un petit peu à la société. Et puis en troisième, on les remet dans le contexte d’une vie normale, et ils reprennent position."
Avec des résultats assez probants, selon Marie-Ange Nowak. "On a eu seulement deux récidives pendant le séjour, et deux en dehors du séjour. Donc, ça nous ramène à moins de 10% de récidives sur les quatre ans. Au niveau national, les statistiques à cinq ans, c’est 63% de récidives !"
Courant 2024, Concienta a quitté Seilhac pour La Roche-Canillac, non sans susciter au mieux quelques curiosités, dans ce petit village de 130 habitants. Mais les Tontons Cuisineurs, le nom du restaurant, ont su trouver leur place, et redonner même vie à un lieu et une commune quelque peu en sommeil. "Le restaurant est déjà connu et fréquenté par un public qui dépasse largement celui de la seule Roche-Canillac", pour le maire, Patrick Leresteux, qui se réjouit de l’existence et du fonctionnement d’une telle structure sur la commune.
Appel à l'aide
Tout irait donc dans le (presque) meilleur des mondes, s’il n’y avait la réalité financière, qui rattrape donc durement Concienta. Elle dépense actuellement 210 00 euros par an en frais de fonctionnement, sans aucune aide publique. Selon ses calculs, Marie-Ange Nowak estime qu’il en faudrait 900 000, pour remplir correctement les missions.
Jusque-là, l’association est soutenue par des avocats, des juristes, des thérapeutes, des présidents d'associations, des sportifs et des chefs d'entreprise, et aidée par d'anciens détenus réinsérés et des bénévoles. Mais cela ne suffit plus.
Les prochaines semaines seront donc cruciales pour Concienta, qui a ouvert une cagnotte en ligne, sur son site internet.