Notre dossier santé est un peu éloigné du monde purement médical cette semaine. C'est un exemple réussi d'inclusion par le travail de personnes en situation de handicap. Depuis plus de 30 ans, le restaurant "Le Doux Amer" d'Ahun (Creuse) est tenu par des travailleurs handicapés de l'ESAT de la commune.
12h30, comme dans tous les restaurants, c'est l'heure du coup de feu au Doux Amer. Seule différence, même si rien ne l'indique au premier regard, ici les serveurs comme le personnel en cuisine sont des travailleurs en situation de handicap, porteurs de troubles autistiques, psychiques ou intellectuels. Beaucoup de clients sont des habitués qui apprécient l'endroit comme tout bon restaurant. “Si on revient c’est qu’on le trouve bien. Ils sont sympas, ils sont ouverts, ils servent bien, c’est rapide, donc il n’y a aucun problème.” Cette autre cliente est également conquise : “Je trouve que c’est très valorisant pour eux, le personnel est très agréable, très professionnel, très gentil donc tout se passe très bien.”
Quelques heures plus tôt, en cuisine, tout le monde s'active. Les ouvriers de l'ESAT sont encadrés par un moniteur, à la fois chef cuistot et éducateur. Jean-Philippe Chaussecourte adapte les postes en fonction des compétences de chacun, pour les faire progressivement gagner en autonomie.
“On leur donne plus de temps d’adaptation, plus de temps pour préparer les entrées (...) On sécurise leur poste de travail de manière à ce qu’ils puissent évoluer sans être en stress ni en difficulté par rapport aux tâches à réaliser."
Jean-Philippe Chaussecourte, chef cuisinier
"Je suis mieux ici qu'à l'extérieur"
Frédéric travaille au restaurant depuis 12 ans. Il a trouvé l'activité qui lui plaît : la restauration collective. Il prévoit de faire des stages dans les environs de Guéret pour se rapprocher de sa famille.
Christophe, lui, est le plus ancien de l'équipe. 28 ans de bons et loyaux services. En 2007, il a pu passer une validation des acquis de l'expérience et obtenir un CAP de cuisinier. Mais lui n'envisage pas de partir.
“Je suis mieux ici qu’à l’extérieur… Le milieu ordinaire c’est pas mon domaine…c’est un peu stressant et le rythme de travail, c’est autre chose…”
Christophe, ouvrier restauration à l'ESAT d'Ahun
Aller vers l'autodétermination
Respecter le rythme et le choix de chacun, c'est ce que met en avant l'Adapei, l'organisme qui gère l'ESAT d'Ahun, mais aussi ceux de Guéret et Aubusson. 200 ouvriers au total. La clé pour parler d'inclusion réussie.
“L’Adapei promeut des valeurs comme l’autodétermination, c’est-à-dire de permettre à quelqu’un de faire un choix en mesurant les conséquences heureuses ou moins heureuses et de se positionner par rapport à ce choix" explique Jean-Charles Furlan, le directeur des ESAT. " Par exemple pour une personne autiste : travailler au quotidien au contact de la clientèle et y trouver un épanouissement et un accomplissement.”
D'autres seront en capacité d'évoluer vers une entreprise du milieu dit "ordinaire". C'est le cas d'une serveuse du Doux Amer qui a signé il y a quelques mois un CDI dans un restaurant classique, pour la plus grande fierté de toute l'équipe...