Ce jeudi 17 août, le tribunal de Guéret a entamé une étape supplémentaire dans la saga Bardinon qui dure depuis dix ans. Patrick Bardinon a été jugé coupable de recel successoral, décision à laquelle il fait appel. Et la fortune familiale, l'une des plus grandes collections de Ferrari au monde, va être partagée entre les trois enfants.
Il s'agit de l'une des plus belles collections de Ferrari au monde, et elle risque d'être dissoute. Riche d'une dizaine de voitures de collections du constructeur italien Ferrari, la collection Bardinon conservée en Creuse, va peut-être être disséminée dans le monde entier. Le tribunal de Guéret a désigné un notaire pour partager la fortune entre les trois enfants d'ici à un an, estimée entre 175 et 220 millions d'euros. En cas de litige entre la fratrie, le notaire pourrait mettre les biens aux enchères, ce qui ruinerait la collection de voitures. Patrick Bardinon, lui, a été reconnu coupable de recel successoral par le tribunal de grande instance de Guéret.
Mais avant d'être probablement partagée entre les trois héritiers Bardinon, Patrick, Anne et Jean-Pierre, cette collection est au cœur d'une querelle familiale qui dure depuis dix ans. On fait le point.
Retour sur une bataille familiale longue de dix ans
- 2014
Tout débute en 2014, deux ans après le décès du collectionneur Pierre Bardinon, lorsque son fils, Patrick, décide de vendre l'une de ses Ferrari, une 250 GTO, sans en informer sa sœur et son frère, Anne et Jean-François. Selon lui, leur père lui avait fait cadeau de ce petit bijou et la carte grise était à son nom.
La Ferrari, considérée comme la Joconde de l'incroyable collection, est vendue à un riche Taïwanais de New-York pour un montant de 48 millions de dollars, soit plus de 38 millions d'euros.
Les enfants du riche industriel creusois se sont alors engagés dans un bras de fer judiciaire. Anne et Jean-François accusaient leur frère, Patrick, d'avoir détourné ce bien, ce qui les a décidés à engager une procédure judiciaire contre lui.
- Janvier 2020
En janvier 2020, Patrick Bardinon a été condamné une première fois par la Cour d'appel de Limoges pour avoir "commis une faute civile en vendant la Ferrari qui faisait partie de la succession de son père." Le fils de Pierre Bardinon doit restituer la valeur du véhicule, 38,5 millions d'euros, à laquelle s'ajoute 300 000 euros par mois d'intérêts de retard.
- 17 août 2023 : "Plus de dix ans après, ce n'est toujours pas terminé."
Le 17 août, le délibéré de la chambre civile du tribunal de grande instance de Guéret tombe et condamne Patrick Bardinon pour recel successoral, c'est-à-dire pour avoir "détourné volontairement un bien lié à une succession."
Mon client n'avait pas l'intention frauduleuse dès le départ de retirer ce véhicule de la succession.
Me Thomas Amico, avocat de Patrick Bardinon.France 3 Limousin
Mais selon son avocat, Me Thomas Amico, "l'élément intentionnel du recel n'a pas été étudié. Mon client n'avait pas l'intention frauduleuse dès le départ de retirer ce véhicule de la succession." L'avocat a également annoncé que son client, Patrick Bardinon, allait faire appel de cette décision devant la cour d'appel de Limoges. "Plus de dix ans après, ce n'est toujours pas terminé", conclut-il.
L'une des plus belles collections de Ferrari au monde est dans la Creuse
S'il en est qui ont suivi cette querelle familiale de près, Jean-Pierre Doury en fait partie. Le président de l'association Sport et Collection, au circuit du Val de Vienne s'est passionné pour le sort de cette collection incroyable, non pas pour la question de l'héritage, mais bien pour le devenir la dizaine de voitures Ferrari.
Selon lui, il s'agit de "l'une des plus belles collections de Ferrari au monde. Elle comporte des modèles mythiques, notamment une Ferrari 330P4 de 1967. Seulement deux autres ont été fabriquées au monde."
Enzo Ferrari lui-même avait l'habitude de dire qu'il n'avait pas besoin d'un musée, puisqu'il en avait déjà un dans la Creuse, chez M. Bardinon.
Jean-Pierre Doury, spécialiste des voitures de collection.France 3 Limousin
En effet, la collection détenue par la famille Bardinon qui pourrait être divisée entre les trois enfants, détiendrait aussi la Ferrari 375 Plus, avec laquelle les pilotes Gonzalez et Trintignant ont remporté les 24 heures du Mans en 1954.
"Malheureusement, elles vont partir à l'étranger."
Pire encore que de les séparer de leur collection, ces voitures Ferrari pourraient être vendues à l'étranger selon Jean-Pierre Doury. "Je suis très inquiet pour la collection, si elles sont vendues, ce sera à l'étranger. On va perdre une partie du patrimoine français", se désole-t-il.
Acquises une par une, par passion des belles voitures de collection, les véhicules de Pierre Bardinon pourraient quitter la Creuse, pour l'étranger.