Bassines. À Sainte-Soline, des élus forment une chaîne humaine pour protéger les blessés : "On s'est retrouvés dans une situation où l'écharpe d'élu ne protège plus"

Dans une vidéo publiée sur les réseaux sociaux, des élus LFI et écologistes forment une chaîne humaine en marge de la manifestation contre les bassines à Sainte-Soline, samedi, pour "protéger des blessés en attente d'évacuation". Ils disent avoir été pris pour cible par les forces de l'ordre circulant en quad.

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Deux jours après le rassemblement contre la construction de réserves de substitution en eau à Sainte-Soline (Deux-Sèvres) qui a dégénéré et fait de nombreux blessés (dont deux manifestants entre la vie et la mort, lundi soir), le député de la première circonscription de la Charente, René Pilato, se dit "stupéfait" que "l’on puisse aller jusque-là, dans quelque chose d’aussi inhumain"

Samedi après-midi, le nouvel élu LFI-NUPES de la Charente défilait dans la campagne avec d'autres élus aux côtés de manifestants pacifiques, dans le "troisième cortège qui s'est approché en dernier" du site de la réserve. 

"On était loin du site, près d’une haie. On sentait que ça cognait et là, on a commencé à voir des véhicules en feu. Il y avait des tirs de grenades." L'élu se souvient : "À un moment, on nous a demandé de former une chaine".

De rares images existent de cette chaîne formée par les élus présents "pour protéger les blessés"

Dans le tweet (ci-dessus) du fil insoumis @VertNaïf, on aperçoit plusieurs élus main dans la main avec des manifestants tentant de former un cordon humain.

Sur une photo publiée dans le fil à la suite de la vidéo, on aperçoit, en contrechamps, des personnes assises ou allongées juste derrière les élus. Elles sont décrites par ces derniers comme étant blessées, certaines en attente d'évacuation.

"Pas de provocation ici, c'est protection des blessés !"

À la fin de la vidéo, un homme s'exclame : "Pas de provocation, ici ! C'est protection des blessés !" Cette voix est celle de Benoit Biteau, député européen EELV.

Il confirme que les élus ont formé une chaîne "pour protéger les blessés""J'ai émis l'idée que l'on forme une chaîne humaine", ajoute-t-il.

Clémence Guetté, députée LFI-NUPES du Val-de-Marne et ancienne candidate aux élections régionales de 2021 en Nouvelle-Aquitaine, est également présente.

"Au moment où les quads ont surgi au bout du chemin, on s’est décalés sur le côté droit quand on est face à la bassine, sur une petite route où les street médic (l'équipe médicale de l'organisation, ndlr) ramenaient les blessés avec des plaies plus ou moins importantes, des gens avec des visages ensanglantés et des plaies aux jambes. Certains pouvaient marcher, d'autres ne pouvaient pas bouger. On s’est positionnés devant eux en nous disant que ça signalerait leur présence et que ça éviterait une charge", raconte-t-elle. Dans son souvenir, elle précise : "On nous a dit : les élus, mettez-vous en ligne".

René Pilato ajoute : "Et là, l’indicible s’est produit. Les quads sont arrivés et ils ont visé ceux qui étaient là et nous aussi qui signifions la présence de blessés. Ils nous ont visés. Une grenade a explosé au pied de Clémence."

Clémence Guetté se souvient de la "peur" qu'elle a ressentie à ce moment-là.

"Je n’ai jamais vu tomber autant d'armes au sol, à ce rythme-là, explique-t-elle, et tous ces gens, autant de gens qui revenaient avec des blessures. C'était assourdissant. Au moment d’une charge, il y avait des enfants, des personnes âgées, on était nombreux."

On était dans une situation où l’écharpe n’était pas respectée. On ne voulait pas partir sans que les blessés soient évacués.

René Pilato

Député LFI NUPES de la Charente

L'élue confirme qu'elle et le groupe à ses côtés se trouvaient encore loin de la bassine où des affrontements se déroulaient entre une partie des manifestants et les forces de l'ordre.

"Ils nous ont clairement lancé des grenades et du gaz lacrymogène dessus sans aucune sommation. Les gens sur les quads n’ont pas fait de sommation alors qu’on était visibles avec nos écharpes tricolores", poursuit-elle.

René Pilato l'affirme également : "On n’était pas au contact. On voulait signifier avec l’écharpe que des gens étaient allongés là, derrière nous. Et les gens sur les quads ont tiré quand même."

Puis il poursuit : "Une autre grenade a explosé derrière nous ensuite. On ne voulait pas partir sans que les blessés soient évacués. On était dans une situation où l’écharpe n’était pas respectée."

C'est ce cordon de forces de l'ordre autour de la bassine qui a créé l’affrontement. Dans cette bassine, il n'y avait strictement rien à dégrader.

Clémence Guetté

Députée LFI NUPES du Val-de-Marne

Dix minutes de chaîne humaine

La chaîne humaine n'aura duré qu'une dizaine de minutes. C'est le temps dont se souviennent les deux élus, sans parvenir à être plus précis.

"Une fois que le gaz est là, vous ne voyez plus rien, impossible de savoir d’où se déroule la charge, témoigne Clémence Guetté. Les gens qui pouvaient se déplacer se sont déplacés. Les autres non." L'élue confie que l'"on est tous extrêmement choqués". Au-delà de l'émotion et de ce qu'il s'est passé, elle estime qu'elle "doit une analyse politique".

"Le plan de maintien de l’ordre était disproportionné, piégeux, estime-t-elle. J’ai fait six kilomètres de marche dans la campagne avec personne, avant l’arrivée devant la bassine qui était entourée de gendarmes. Et c'est ce cordon qui a créé l’affrontement. Dans cette bassine, il n'y avait strictement rien à dégrader. Il y avait des grillages, certes, mais pas de bâches. Ça ne vaut pas une personne en urgence vitale, ni des blessés dans les forces de l’ordre ou parmi les manifestants".

Clémenc Guetté a annoncé dans l'après-midi, lundi, demander l'ouverture d'une commission d'enquête parlementaire.

Visiblement lui aussi éprouvé par le déroulé des évènements du week-end, René Pilato formule l'espoir que l'on "(sorte) par le haut de toute cette histoire".

Pour lui, "l’image que ça a donné de la France, n'est juste pas possible". Puis, il conclut : "Macron est dans une dérive inquiétante".

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