Atteinte à la liberté d'association, absence d'éléments suffisants pour justifier le décret, le Conseil d'Etat a estimé que les conditions étaient réunies pour répondre favorablement à la demande de suspension de la dissolution des Soulèvements de la Terre. Une décision provisoire, en attendant de se prononcer sur le fond, à l'automne.
Ce qui est rassurant dans cette décision, c'est que le Conseil d'Etat a le discernement nécessaire. Il considère que les actions des Soulèvements de la Terre sont légitimes.
Benoît Biteaudéputé européen
Membre revendiqué des Soulèvements de la Terre, présent à l'audience du 8 août dernier devant le Conseil d'Etat, le paysan de Sablonceaux (17) et député européen Benoît Biteau se réjouit de la décision annoncée ce 11 août.
Il existe un doute sérieux quant à la qualification de provocation à des agissements violents à l’encontre des personnes et des biens retenue par le décret de dissolution.
Juges des référésConseil d'Etat
Par leur décision rendue ce 11 août, les trois juges des référés du Conseil d'Etat suspendent la dissolution des Soulèvements de la Terre prononcée par un décret en conseil des ministres du 21 juin dernier. "Saisis par ce collectif et par plusieurs associations, partis politiques et particuliers, les juges des référés estiment qu’il existe un doute sérieux quant à la qualification de provocation à des agissements violents à l’encontre des personnes et des biens retenue par le décret de dissolution." indiquent les magistrats.
La demande de dissolution avait été présentée en conseil des ministres le 21 juin dernier. Après les graves événements survenus à Sainte-Soline le 25 mars, le ministre de l'Intérieur avait rapidement annoncé vouloir dissoudre les Soulèvements de la Terre, coorganisateurs avec le collectif Bassines, non merci! de la manifestation anti-bassines.
"On n'a jamais fait de dégradations très importantes, on n'a jamais agressé d'êtres humains, excepté des gens qui n'ont rien à voir avec les Soulèvements de la Terre, qui ont voulu en découdre avec les forces de l'ordre. Mais ça, ce n’est pas les Soulèvements de la Terre. Le Conseil d'État nous a entendus ! " se félicite Benoît Biteau.
Des éléments de preuve insuffisants
Deux conditions étaient nécessaires pour faire droit à la demande de suspension portée les avocats du mouvement, et les recours déposés par Greenpeace, Extinction Rebellion, Notre affaire à tous, Alternatiba, le Syndicat des avocats de France, le Syndicat de la magistrature, l’Union syndicale Solidaires, le Gisti et Droit au logement : l'urgence de la situation, et le doute "sérieux" sur la légalité du décret.
Les juges ont estimé que "l'atteinte à la liberté d'association" portée par la dissolution constituait une situation d'urgence.
Quant aux agissements violents ou qualifiés de trouble à l'ordre public, les juges estiment "les éléments apportés par le ministre de l’Intérieur et des Outre-mer" insuffisants à les démontrer : "ni les pièces versées au dossier, ni les échanges lors de l’audience, ne permettent de considérer que le collectif cautionne d’une quelconque façon des agissements violents envers des personnes", précise leur décision.
Des doutes sur les troubles à l'ordre public
La qualification des actions de désobéissance civile menées par les Soulèvements de la Terre ont fait l'objet d'un long débat lors de l'audience du 8 août devant le Conseil d'État : "sabotage" pour la représentante du ministère de l'Intérieur, "désarmement" pour les Soulèvements, ce qui fait la différence, c'est la violence et la portée de ces actes.
Dans leur décision, les juges soulignent le caractère symbolique, et le nombre limité de ces actes : "les actions promues par les Soulèvements de la Terre ayant conduit à des atteintes à des biens, qui se sont inscrites dans les prises de position de ce collectif en faveur d’initiatives de désobéissance civile, dont il revendique le caractère symbolique, ont été en nombre limité. Eu égard au caractère circonscrit, à la nature et à l’importance des dommages résultant de ces atteintes, les juges des référés considèrent que la qualification de ces actions comme des agissements troublant gravement l’ordre public au sens du 1° de l’article L. 212-1 du Code de la sécurité intérieure soulève un doute sérieux."
Une victoire saluée
Ensemble, nous sommes une force tellurique
Les Soulèvements de la Terre
Le collectif a immédiatement salué la victoire que représente cette décision.
"Peut-être aussi que les citoyens qui se sont laissés endormir par le discours de M.Darmanin qui veut nous taxer d'éco-terroristes vont comprendre que les gens qui se revendiquent des Soulèvements de la Terre s'inquiètent du dérèglement climatique et de ses conséquences, et que plutôt que de les condamner, il faut se dépêcher de les rejoindre" espère le député écologiste.
La décision de ce jour est suspensive, le Conseil d'État rendra une décision définitive, sur le fond, à l'automne.