La réserve zoologique de Calviac présente de nombreuses espèces menacées aux visiteurs. Des espèces discrètes et méconnues. Sensibilisation du public et programmes de reproduction, ce parc lutte à son échelle contre la sixième extinction de masse annoncée par les experts.
Le rapport publié début mai par le groupe d’experts de l’ONU sur la biodiversité a créé beaucoup d’émoi et d’inquiétude : un million d’espèces menacées dans l’immédiat, beaucoup d’autres menacées d’extinction « dans les prochaines décennies ». Le constat est plus qu’alarmant. Les causes de cette sixième extinction de masse sont en grande partie liées aux activités humaines : empiétement sur leur l’espace naturel, changement climatique, pollution des eaux, de l’air ou pesticides. Aucun continent, aucun habitat n’échappe à ce risque, et les conséquences sur notre mode de vie humain seraient désastreuses.
À Calviac-en-Périgord, non loin de Sarlat, la réserve zoologique n’a pas attendu ce rapport pour agir. Depuis 10 ans, elle s’efforce de faire connaître des espèces qui risquent de discrètement s’éteindre. Europe, Océanie, Amérique ou Madagascar, les animaux sont séparés en zones géographiques et en effet, chaque lieu à son lot d’espèces en voie d’extinction : ici, une sorte de pigeon bleu, une grande crinière sur la tête. Un goura, originaire de Nouvelle-Guinée, dont la population décline dramatiquement ; là un lémure aux yeux turquoise, un des 25 primates les plus menacés au monde ; ou encore, Rudolph, le vison d’Europe dont il ne reste qu’une centaine de congénères à l’état sauvage éparpillés dans nos forêts du sud-ouest français, un animal très discret.
Une disparition sans que personne ne s’en aperçoive, ni ne s’en émeuve
C’est beaucoup plus facile de mobiliser pour les grands mammifères, les tigres, panda ou primates. Beaucoup des espèces qui sont en voie de disparition aujourd’hui, risquent de partir sans que personne ne s’en aperçoive, ni ne s’en émeuve, déplore Emmanuel Mouton, directeur du parc.
Des animaux dont le grand public ne se doute même pas qu’ils existent, comme le fossa, un mammifère féli-forme originaire de Madagascar dont l’homme réduit chaque jour l’espace vital. Mais aussi des espèces que l’on n’imagine pas menacées. C’est le cas des lémures couronnés.
Ce sont des animaux assez courants à Madagascar, observe Emmanuel qui a travaillé sur l’île plusieurs années. Les locaux les voient très souvent et ne s’inquiètent pas vraiment. Mais pour vous donner un exemple, je me souviens d’un chemin au bord duquel la forêt grouillait de lémuriens. Lorsque j’y suis retourné plus récemment, tout avait changé : il n’y avait plus aucun arbre, ni aucun animal ! L’homme avait totalement pris possession des lieux.
"Il ne pourra jamais y avoir de réintroduction si le milieu naturel est, lui aussi, en danger."
Pour contrecarrer un petit peu le déclin de ces espèces, la réserve zoologique de Calviac fait partie d’un réseau, l’EAZA (Association européenne des zoos et aquariums), pour mutualiser la surveillance des espèces. Les programmes de reproduction sont mis en commun avec d’autres parcs pour favoriser le brassage génétique, et échanger des animaux si besoin.
Emmanuel Mouton se réjouit : il y a quelques jours, deux bébés lémures sont nés :Cela veut dire que les animaux sont à l’aise ici, c’est très bon signe. Ce genre d’évènement est pour nous l’une des raisons d’exister de la réserve. Si malheureusement, les espèces à l’état naturel déclinent, nous pouvons essayer de faire en sorte qu’elles existent toujours, au moins en captivité.
Les parcs Zoologiques jouent un rôle pour la conservation de ces espèces menacées. Mais ce vers quoi doit tendre l’essentiel de l’action pour contrer cette extinction de masse de la biodiversité doit se faire sur le terrain. Il ne pourra jamais y avoir de réintroduction si le milieu naturel est, lui aussi, en danger.