Avec l'automne, le chasseur de champignons est de retour. Un chasseur 2.0 puisqu'il est désormais équipé d'un téléphone pas encore connecté à la 5G mais suffisamment pour pouvoir vérifier sur une appli dédiée la validité de sa cueillette. Sauf que toutes les applications ne se valent pas. Danger !
Connaissez-vous la "reconnaissance faciale pour champignon " ? Prendre en photo la trombine (chapeau compris) du champignon pour connaître en ligne son pédigree, c'est l'une des possibilités offerte par Champignouf. Il s'agit d'une des applications grand public les plus connues pour reconnaître rapidement le petit trésor qu'on vient de dénicher et que l'on destine à sa casserole.
Des applis qui poussent comme des champignons
Myco, Fungus, Picture Mushrooms, Identificateur de Champignons, il existe plusieurs dizaines d'applications venues de tous les pays, le plus souvent ludiques, gratuites, et facilement téléchargeables.Bien pratique à l'heure où la vraie connaissance transmise de génération en génération se fait de plus en plus rare, où les pharmaciens eux-mêmes hésitent parfois à vous conseiller et où l'on a pas toujours un expert d'une société mycologique sous la main.
Des milliers d'intoxication par an
Mais l'Agence Nationale de la Sécurité Sécurité Sanitaire et de l'alimentation met en garde. L'ANSES assure la surveillance saisonnière des intoxications par des champignons à partir des données des centres antipoison et relève chaque année en France un millier d’intoxications dues à des champignons dont les conséquences sur la santé peuvent être graves voire mortelles. Au deuxième semestre 2019, plus de 2 000 cas d'intoxication liés à la consommation d'une espèce toxique, de champignons comestibles mal cuits ou en mauvais état ont été relevés dans les centres antipoison. Trois d'entre eux ont malheureusement eu une issue fatale. C'est la moyenne annuelle en France.Applis pas toujours rigoureuses
Dans ce contexte, l'ANSES affirme que les applications existantes n'offrent pas suffisamment de garantie pour s'y fier totalement. Certaines applis de reconnaissance de champignons se tromperaient dans les grandes largeurs, parfois de façon bénigne, et parfois potentiellement dangereuse. Il faut dire qu'avec 160 000 espèces différentes en Europe, l'erreur est toujours possible dans des applis plus ou moins fignolées.Certes, risque d'erreur ne signifie pas qu'une application vous enverra ad patres en vous faisant prendre une amanite pour un cèpe. Le plus souvent il s'agit d'erreurs de nom, mais tout de même.Ne pas consommer de champignon identifié au moyen d’une application de reconnaissance de champignons sur smartphone, en raison du risque élevé d’erreur.
Les applis impliquées
Sans avoir de chiffres précis à fournir pour l'instant sur ce phénomène encore récent, l'Anses fait état de quelques cas d'intoxication « favorisés » par ces services sur smartphone. Une recherche a notamment été lancée au centre antipoison de Paris, après l'intoxication sévère d'une famille de trois personnes l'an dernier.L'ANSES précise que dans certains cas « la confusion entre espèces était favorisée par l'utilisation d'applications de reconnaissance de champignons sur smartphone, qui avaient donné des identifications erronées sur les champignons cueillis ». Et de rappeler qu'à moins de connaître déjà parfaitement les espèces que l'on cueille, il faut toujours consulter un spécialiste avant de consommer sa récolte.
Pas totalement inutiles non plus
Pour résumer, si ces applications sont ludiques et pratiques, elle ne constituent pas le Vade Mecum de la cueillette tranquille. Si vous voulez écarter tout risque, vous pouvez certes les consulter pour un premier tri sur le terrain, mais si vous n'êtes pas vous-même un spécialiste, il vous faut encore valider votre récolte auprès d'un "expert" qui maîtrise bien son sujet, pharmacien ou membre d'association et sociétés de mycologie locales.Ce n'est qu'une fois que vous serez vous-même un pro du champi que vous pourrez cueillir sans crainte celui dont vous êtes absolument sur.
Vous pouvez aussi vérifier auprès des gens qui savent et qui ont (champ) pignon sur rue. Il existe ainsi, par exemple, le "Guide de poche de mycologie officinale" (Médecine Sciences Publications) rédigé par François Pouchus, professeur de mycologie et de botanique à la faculté de pharmacie de Nantes. De nombreux autres ouvrages en image et en couleur sont également en librairie. Préférez ceux rédigés par des sommités telles que Guillaume Eyssartier, et qui ont été réédités à de multiples reprises. Ils sont généralement purgés de toute erreur.
Enfin, 9 conseils pour éviter l'accident bête :
- Vérifiez que vous n'êtes pas chez un particulier susceptible, ou dans une zone où la cueillette est réglementée
- Évitez les zones polluées (les champignons concentrent certains produits toxiques), telles que bords de routes passagères ou terrains désaffectés.
- Cueillez les champignons entiers et en bon état afin de les identifier clairement.
- Déposez-les dans un panier aéré pour éviter le pourissement très rapide, jamais en sac plastique fermé.
- Ne les mélangez pas dans le panier sous risque de consommer un morceaux vénéneux même après l'avoir écarté au retour.
- Lavez-vous les mains ou portez des gants pour la récolte.
- Ne consommez pas les champignons crus
- Consommez les champignons dont vous êtes sûrs rapidement, deux jours maximum en les ayant conservé au réfrigérateur.
- Évitez de les faire consommer aux personnes fragiles (âgées, femmes enceintes ou jeunes enfants)