Prévue initialement le 26 juillet, la venue de la Garde des Sceaux Nicole Belloubet dans la ferme-école et le centre de détention de Mauzac-et-Grand-Castang a été reportée à ce mercredi. Une prison très particulière au régime de sécurité adapté aux différents types de délinquance
Bien qu'il date de plus de 30 ans, le centre de détention de Mauzac-et-Grand-Castang dans le Bergeracois fait toujours figure de pionnier. L'idée en avait été lancée par le garde des Sceaux de l'époque Robert Badinter, celui-là même qui avait aboli la peine de mort en 1981. Le centre, lui, fut construit entre 1984 et 1986. Deux centres de détention d'une capacité de 370 places y sont installés. A côté d'une prison assez "traditionnelle" c'est le deuxième centre plus récent qui va à l'encontre de notre conception habituelle de ce genre d'endroit.
Une prison des champs sans murs où les détenus possèdent la clé de leur cellule
C'est en effet l'un des deux seuls établissements pénitentiaires de France sans murs, au milieu d’un domaine agricole de près de cent hectares traversé par le canal de Lalinde. Des champs à perte de vue, mais pas de murs.
Le centre de détention jouxte une ferme-école. Un lieu conçu comme un véritable petit village de 21 pavillons comportant chacun 12 cellules individuelles, réparties sur deux étages. Ici, des détenus "sélectionnés" relativement âgés et généralement en fin de peine y sont formés en horticulture dans l'optique d'acquérir un niveau professionnel suffisant pour pouvoir s'intégrer à leur sortie de détention.
Les 252 détenus occupant ces pavillons ont tous la clé de leur cellule. En journée, ils peuvent circuler librement. Ici il n'y a pas de murs d'enceinte, pas de couloirs, de sas, de caméras, ni de serrures électriques. Un espace collectif ouvert aux personnels comme aux détenus est situé sur une place arborée. A l'inverse d'une prison traditionnelle, on essaie ici de redonner aux individus des repères sociaux
Un projet-pilote jamais suivi
Mauzac initiait dans les années 80/90 une voie jusqu'alors inédite en faveur de la réinsertion des détenus, plutôt qu'une incarcération purement punitive. Une idée originale dans la ligne des concepts de Robert Badinter qui aurait pu ouvrir des alternatives au carcéral traditionnel dont on connaît les limites aujourd'hui.
Un mode d'incarcération moins coûteux également qu'une prison traditionnelle, en partie grâce à une économie de besoins de surveillance.
Mais victime de la surpopulation des autres centres de détention, Mauzac ne peut pas se permettre d'accueillir uniquement les détenus en aménagement de peine pour lequel il est conçu. Ainsi seulement 10% des détenus pourraient actuellement accéder à la ferme-école. Et les conditions d'hébergement dans ce centre "modèle" souffrent comme ailleurs du manque de moyen global du système carcéral. Pas de quoi obtenir un retour sur expérience suffisamment satisfaisant sans doute pour que l'expérience ait donné naissance à d'autres tentatives du même type jusqu'alors.
La Garde des Sceaux avait une idée en tête lors de cette visite particulière : la recherche de solutions alternatives. A l'heure où les prisons françaises sont en surchauffe, la question d'une autre solution, d'autres solutions se pose. Et Nicole Belloubet ne cache pas que le projet initié par Robert Badinter il y a une trentaine d'années reste une piste des plus intéressantes selon elle.