C'est la réponse populaire, économique, écologique et durable à la frénésie de consommation des fêtes de fin d'année. Les vide-greniers de Noël connaissent un succès grandissant.
La salopette trop petite, le jouet oublié au fond de l'armoire, la peluche délaissée par le petit dernier, rien ne se perd, tout se transforme. Ou du moins, tout se vend. Il n'est qu'à se promener dans l'un de ces nombreux vide-greniers du dimanche "spécial Noël" pour s'en convaincre. Vide ta chambre, bourse de Noël, bourse aux jouets ou même brocante puériculture, ces ventes de particuliers à particuliers sont particulièrement nombreuses en Dordogne et à l'approche des fêtes, elles se spécialisent dans les articles juniors.
Mieux que le Black Friday
Ici, on regarde, on soupèse, on tâte, on marchande, on discute. Chaque euro est longuement pesé avant de changer de main. Mais le jeu en vaut la chandelle. Mieux que des prix cassés, on est plutôt ici dans le - 70 à - 80 %. Une poignée d'euros pour une figurine devenue introuvable, quelques pièces pour un jouet hors de prix en magasin. À condition de renoncer à l'emballage et au zéro défaut, l'affaire est garantie.
Au plaisir de faire une affaire s'ajoute le plaisir de la chasse. Parcourir les étals à la recherche de la carte Pokémon, du personnage Lego qui complète la collection, du petit ours de notre enfance, de la BD qui vient meubler l'étagère, ou tout simplement du joujou dont on sait qu'il va allumer des étoiles dans les yeux de nos enfants.
Le marché de l'occasion, un nouveau marché
Si la formule a autant de succès, c'est que le regard sur l'occasion a changé. Dans le monde, le marché de l'article d'occasion a fait un bond de 20% en quelques années, pour atteindre 105 milliards d'euros l'an dernier. Le Français aussi a su dépasser ses à-priori. Désormais, l'achat d'occasion n'est plus seulement banalisé, il est tendance et les Français seraient même plus motivés que d'autres pays européens. Plus de 20 millions de personnes consultent Leboncoin chaque jour, et Vinted, site de vente d'habits d'occasion en ligne, est devenu le premier site de vente de textiles en France.
La seconde main, affaire de jeunes familles
En 2021, 46% des Français avaient pris l'habitude d'acheter des articles d'occasion et trois sur quatre en avaient au moins acheté un. Le phénomène concerne surtout les générations des 30-40 ans, révèle une étude publiée début 2023 et encore plus les familles ayant un enfant de moins de 15 ans. Exactement le public visé par ces vide-greniers. 71 % des moins de 45 ans achètent d'occasion, contre 47 % des plus de 60 ans.
L'argent, mais pas que
Les particuliers qui se lèvent à 5h du matin pour étaler leurs jouets sur un étal qu'ils ont payé deux euros le mètre ne visent pas la fortune à court terme. "Je mets des petits prix exprès pour que ça parte," explique cette jeune maman, "c'est vraiment pour vider les placards ! ". Le vide-grenier fonctionne évidemment sur l'attrait financier chez l'exposant comme chez le badaud. Le vendeur rentrera chez lui avec quelques euros en poche, l'acheteur aura obtenu une marchandise à prix réduit et l'ensemble aura profité à l'association organisatrice. Mais à lui seul, l'argument ne suffit pas à expliquer le succès de ces manifestations.
Joujoux d'enfance
Il y a tout d'abord la curiosité. Nulle part ailleurs, on ne peut trouver un tel étalage d'objets personnels, voire intimes. Chaque étal résume la vie des vendeurs, chaque objet est un souvenir, possède sa propre histoire, qui se mêle souvent avec la nôtre. Le badaud qui ne part pas à la recherche d'une idée originale s'engage volontiers dans une chasse aux souvenirs. La nostalgie pour quelques euros et l'idée peut-être de voir ses propres enfants jouer avec ce qui a bercé son enfance.
L'aspect pratique, c'est pour les exposants de vendre plutôt que de jeter et de faire de la place pour les jouets à venir. Pour les acheteurs, c'est de pouvoir se montrer généreux à moyens réduits, en offrir plus pour le même prix.
Facteur humain
Ensuite vient le contact. Le parent-vendeur a acheté puis testé ce jouet avec ses enfants. Il sait de quoi il parle. Généralement mieux qu'un vendeur de magasin. Ce jouet a une histoire, il a été essayé et le plus souvent, assure le vendeur, approuvé. Une marque de confiance qui s'établit en face-à-face, ce que n'ont pas encore réussi à modéliser les plateformes de vente.
Chasse au gaspi
Enfin, le sentiment de ne pas gaspiller entre pour la part restante de la motivation. "Pourquoi jeter ou acheter un objet neuf, alors qu'il y en a qui prennent très soin de leurs affaires ?" s'interroge cette jeune maman. Le choix se fait par conscience écologique de plus en plus souvent, par besoin d'économie fréquemment, par réalisme toujours. Le jouet n'aura de valeur que le temps de l'intérêt de l'enfant, rares sont ceux qui tiennent la distance plus de quelques mois...