Du football à la justice, les dessous du transfert de Naoufel Khacef aux Girondins de Bordeaux

Entre Mehdi Aït-Ahmed, l'agent du défenseur algérien lors de son transfert fin janvier, et un dirigeant du club Eduardo Macia, le match devient judiciaire. L'ancien représentant du joueur assure avoir été floué financièrement lors de la transaction au profit d'autres intermédiaires. 

L'affaire Naoucel Khacef, parce qu'il faut bien l'appeler comme ça désormais, est une plongée dans les eaux opaques du football 
business international. Une affaire dans laquelle un agent de joueurs, détenteur de la licence officielle pour exercer, Mehdi Aït-Ahmed se bat depuis plusieurs mois pour récupérer la commission qu'il devait, affirme-t-il, percevoir sur le transfert de son joueur aux Girondins et qu'il n'a jamais vu venir.
Cela représente un préjudice de 7500 euros pour le prêt de six mois de Khacef et 54 000 euros, toujours hors taxes, pour un contrat de trois ans une fois l'option d'achat levée fin juin (NDLR : elle ne l'a finalement pas été).

Plainte contre plainte

Le 5 juin, le Parquet de Bordeaux a officiellement enregistré le plainte envoyée par les avocats de Mehdi Aït-Ahmed  le 25 mai pour "exercice illégal du métier d'agent" et "escroquerie en bande organisée".

Plusieurs personnes sont ciblées, dont un dirigeant bordelais, Eduardo Macia. 
Depuis, le directeur du football et responsable du recrutement, a contre-attaqué sur le terrain judiciaire.
L'Espagnol a récemment déposé plainte contre X auprès du Procureur de la République de Bordeaux pour "tentative de chantage et d'extorsion de fond" et "dénonciation calomnieuse". Il s'estime à tort mis en cause.
Mehdi Aït-Ahmed : "je n'a rien à me reprocher. Le chantage c'est ce qu'ils font pour négocier le retrait de ma plainte. J'attends d'être entendu par les enquêteurs. 
Quand M.Longuépée m'a appelé, je lui ai dit que ni lui, ni le club n'étaient concernés par ma plainte, contrairement à Eduardo Macia". 

Khacef signe un mandat exclusif à Aït-Ahmed

Tout commence le 23 décembre dernier. A l'époque, Naoucel Khacef  évolue au Nasr Athletic Hussein Dey, un club d'Alger.
Précédé de la mention lu et approuvé, le joueur signe avec Mehdi Aït-Ahmed "un mandat de représentation exclusif". 
Les négociations avec Bordeaux commencent et quelques semaines plus tard, elles aboutissent à un accord. L'international espoir algérien s'engage donc aux Girondins sur un prêt de six mois avec option d'achat pour trois ans supplémentaires. Au départ, il est destiné à évoluer en équipe réserve avant d'intégrer l'équipe professionnelle. Une somme de 300 000 euros est évoquée pour le transfert entre Bordeaux et le club algérien, au-dessus de sa clause libératoire fixée à 190 000 euros.
 

Pas de doute pour la Ligue

Le 30 janvier, Bordeaux envoie dans un email à Mehdi Aït-Ahmed la proposition de contrat avec les avenants à signer par son joueur. Avec un salaire de base de 15 000 mensuels, évolutif ensuite. Toujours à cette époque, dans différents messages entre Khacef et son représentant que nous avons pu consulter, le joueur demande à son agent où il doit signer les différents documents. Ce qui accrédite la thèse qu'il est bien son représentant.
Enfin, dernier élément important, le contrat enregistré à la Ligue du Football Professionnel, le 31 janvier.
En page 2, il est écrit noir sur blanc que Naoucel Khacef a eu recours "aux services de Aït-Ahmed Mehdi comme agent sportif".
Autre précison majeure "le club n'a pas eu recours aux services d'agents sportifs et n'a pas été représenté par un avocat".
Tout semble transparent mais ça ne va pas durer. 
Car Mehdi Ait-Ahmed ne va jamais voir la couleur de l'argent. A ce jour, il n'a pas touché la commission pour ce transfert comme cela aurait dû être le cas.

D'autres intermédiaires s'en mêlent

Quelques jours avant la conclusion du dossier, Mehdi Ait-Ahmed déplore dans un email adressé à la direction des Girondins que l'opération "prenne  une tournure assez inattendue et regrettable à cause d'interférences provoquées par des intermédiaires ayant des intérêts divergents et pas forcément habilités légalement à effectuer ce type de transactions ".  
De qui s'agit-il?
Selon nos informations, il y a entre autres une ressortissante espagnole, proche d'Eduardo Macia, Raquel Herraiz Del Moral. Cette ancienne coiffeuse est devenue agent de joueurs en Espagne. Mais elle n'a pas le droit d'exercer en France. Cela ne l'aurait pas empêché d'obtenir des mandats de joueurs Bordelais actuels ou passés . 
Autre personnage du dossier, Yahia Hamri, surnommé" Bob", qui se serait rendu au Consulat de France à Alger pour obtenir un visa permettant à Naoufel Khacef  de venir en France. On peut le voir sur une photo posant au Haillan avec le joueur lors de sa signature.
De son côté, Eduardo Macia avait signé un courrier à en tête des Girondins de Bordeaux pour demander au Consulat un visa dans le cadre d'un stage que devait effectuer le joueur au Haillan entre le 29 janvier et le 3 février.  Dès le 22 janvier, Bordeaux avait pourtant adressé à son agent une proposition écrite de contrat. Mais rien n'empêche un stage de déboucher sur un emploi à durée déterminée, dans le football aussi visiblement.
Le précédent club de Khacef en Algérie avait donné le 3 octobre dernier mandat exclusif à un autre agent officiel affilié à la fédération française Badreddine Guasmi et à ses associés Marc Roger, Yahia Hamri et Raquel Herraiz Del Moral, pour le représenter auprès des clubs professionnels européens pour effectuer son transfert.
Les deux parties auront donc pu collaborer. Les uns s'occupant de la partie club, l'autre, à savoir l'agent, de la partie joueur. 
Mais l'intermédiaire espagnole aurait également souhaité être sur le mandat joueur. Or le système du double mandat est interdit en France. 
Quoi qu'il arrive, personne dans cette transaction ne pouvait contourner Mehdi Aït-Ahmed car il possédait le mandat exclusif de son poulain.
 

Un courrier à Frédéric Longuépée

L'agent franco-algérien qui n'a rappelons-le rien touché dans la transaction, estime avoir été écarté au moment de sa conclusion au profit des autres intermédiaires. 
Dans un courrier de quatre pages daté du 7 mai, adressé à Frédéric Longuépée, Mehdi Ait-Ahmed fustige l'attitude "inacceptable" à son encontre d'Edouardo Macia et l'accuse d'avoir travaillé " dans l'illégalité" sur ce transfert. 
Ensuite et après divers échanges plus ou moins cordiaux entre les avocats des deux parties, l'agent basé à Lille a donc déposé plainte à Bordeaux.

Le joueur n'a plus de club

A l'issue de son transfert, Naoufel Khacef a refusé de signer un mandat exclusif de représentation longueur durée en faveur de son agent, contrairement à son engagement verbal. Il a préféré confier ses intérêts à la fameuse Raquel. 
Aujourd'hui, son option d'achat n'a pas été levée par les Girondins. S'il séjourne toujours à Bordeaux, le jeune algérien de vingt-deux ans, qui n'a jamais évolué en Ligue 1, est sans club.
Dans une interview accordée au site de supporteurs bordelais Web Girondins, il a indiqué ne pas exclure de se retourner vers son ancien représentant.
Khacef assure que c'est à cause de la plainte de Mehdi Aït-Ahmed que le club ne veut pas le garder. Et il s'estime victime de cette situation.

Qui a touché la commission?


Parmi les nombreuses questions posées par cette affaire, il en reste une intéressante, quelles que soient les responsabilités des uns et des autres : 
qui a touché la commission du transfert? 
C'est à la justice de le déterminer lorsqu'elle instruira les plaintes déposées par Mehdi Ait-Ahmed et Eduardo Macia.
Quant aux Girondins de Bordeaux, même s'ils ne sont pas visés à ce stade de la procédure, ils n'avaient pas besoin de ça, notamment en terme d'images. 
Car Eduardo Macia est un personnage clé de leur politique sportive.

 

 





 
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