Ostréiculteurs et propriétaires de La Pointe sont en alerte depuis quelques semaines face à l'ampleur du phénomène d'érosion qui menace le Mimbeau. Les courants venus d'Arcachon et de Piquey se rejoignent à cet endroit et viennent creuser la fosse sous-marine qui longe le chenal. Une partie des parcs ostréicoles sont en train de s'effondrer et l'érosion pourrait concerner le banc de sable, voire menacer les habitations dans un futur proche.
Sur la plage bien connue des vacanciers, le Mimbeau est aujourd'hui réduit à sa plus simple expression après des décennies de recul et d'érosion. Mais malgré les tempêtes hivernales et surtout grâce au réensablement régulier, une langue de sable est préservée à la pointe de la Presqu'île du Cap-Ferret avec une vue imprenable sur la Dune du Pilat.
Ça, c'est la carte postale. Un équilibre entre terre et mer le temps du cliché. Mais la configuration même du bassin d'Arcachon et de ses courants qui entrent et sortent non loin du Mimbeau n'agit pas en sa faveur. À tel point que les professionnels comme les propriétaires de la conche s'en inquiètent. Ils se sont réunis le 22 août dernier auprès de trois associations.
Une digue sous-marine
Ce que les touristes et même les habitants connaissent moins, c'est l'existence de cette digue sous-marine. Construite il y a plusieurs décennies devant les parcs ostréicoles, comme un "matelas" de rochers, la digue du Mimbeau censée les protéger, s’affaisse désormais. Ces jours-ci, à la faveur de forts coefficients qui découvrent plus de parcs, il est possible de l'apercevoir à marée basse.
Benoît Bartherotte, président de l'association de défense de la pointe du Cap Ferret (ADPCF), connu également pour avoir construit sa propre digue pour protéger son domaine, explique que la conjonction des courants à cet endroit est dévastatrice. "Cet ouvrage est sous-marin, donc les gens en ignorent l’existence. Le chenal passe devant et il vient taper directement, pile à l’endroit du courant". On parlerait de 12 000 m³ de perdus sur 400 mètres en un an. Mais la "digue" sous-marine n'est plus entretenue depuis une trentaine d'années...
Aussi, il insiste sur le fait que, bien que peu visible, le phénomène s'accélère. Cartes à l'appui, il montre les mesures de la fosse sous-marine à cet endroit qui ont triplé depuis 2009.
Des parcs perdus
Les ostréiculteurs qui avaient déjà essuyé des pertes lors des tempêtes de décembre, notamment sur le Banc d'Arguin, accusent le coup aujourd'hui et veulent limiter la casse sur ce site "de qualité" que représente le Mimbeau. “Les parcs sont beaucoup chahutés", témoigne l'ostréiculteur Yoan Godichaud. "La digue de rochers s’est affaissée. Il faut imaginer qu'après les parcs, en tombant des rochers, il y a entre 10 et 20 mètres de fond qui descend tout droit..."
C'est pourquoi il insiste sur l'attente des ostréiculteurs qui souhaitent "continuer cet entretien dans les règles de l'art en respectant l'environnement". Des négociations qui ont déjà commencé avec les pouvoirs publics pour, en urgence selon lui, pouvoir "protéger (leur) outil de travail, nos parcs à huîtres…”
Alerter les pouvoirs publics
Cyril Treuil, président association de sauvegarde et protection du Mimbeau et de la Lugue alerte sur le "caractère d’urgence qui n’est peut-être pas mesuré par les pouvoirs publics", expliquant qu'il faut une prise de conscience collective, "pour qu’on puisse commencer les premiers travaux.”
"Pour le moment, notre projet ce n'est pas du tout de faire des grands travaux", précise Benoît Bartherotte, "c'est reprendre l'entretien pour faire des bouche-trous "!
Bien sûr, il s'agit de mobiliser des fonds car le projet serait coûteux. Une première dotation de 50 000 euros est espérée d’ici fin septembre, en partie fournie par les propriétaires des maisons "en première ligne", le long du Mimbeau.
Car, selon CYril Treuil, cette "digue" qui protégeait les parcs, protège aussi la plage et les villas juste derrière. Une soixantaine pourrait être concernée. "Notre survie immobilière dépend de l'entretien de cette digue qu'il faut reprendre d'urgence". Les maisons sont impactées par la digue et le bon fonctionnement de la digue…” assure Lionel Clamadieu, de l'association des 44 hectares.
C'est pourquoi ces trois associations ont adressé à la préfecture un courrier conjoint avec président du comité régional de conchyliculture Arcachon-Aquitaine Olivier Laban. Encore une fois, le sujet est sensible sur la Presqu'île où les enjeux politiques, économiques, les intérêts personnels et le bon vouloir de Dame Nature ne répondent pas aux mêmes horloges. Mais les ostréiculteurs comme les gens de la Pointe semblent attendre des décisions rapides.