La préfecture de la Gironde accuse l’association "Rassemblement des musulmans de Pessac", gestionnaire de la mosquée, de promouvoir un islam radical. Et d'inciter à ne pas respecter les lois de la République. Elle a lancé une procédure de fermeture temporaire.
"Des prêches et des propos ont régulièrement incité à ne pas respecter les lois de la République, justifié les attentats et valorisé la mort en martyr"
Communiqué de pressePréfecture de la Gironde
La préfecture de la Gironde a décidé de réagir fermement face à des propos qui auraient été tenus par des membres de l'association du "Rassemblement des musulmans de Pessac".
"Islam radical" , "idéologie salafiste"
Propos qui auraient tendance à "promouvoir un islam radical" et à "véhiculer une idéologie salafiste" indique un communiqué diffusé jeudi 24 février 2022 en fin de journée.
Le Rassemblement des musulmans de Pessac est l'association gestionnaire de la mosquée Al Farouk installée dans cette commune de l'agglomération de Bordeaux.
Elle a immédiatement réagit sur sa page Facebook évoquant une décision "grave et injuste". Son président, AbdouRahmane Ridouane, dit vouloir apporter des "arguments de fond" et faire "confiance à la justice divine ainsi qu'à celle de notre pays la France".
Il a également réagi au micro de France 3 Aquitaine, ce vendredi 25 février 2022, au sujet de ces accusations : "Ce n’est pas notre discours. Au contraire, on dit aux gens: "Exprimez-vous, manifestez votre citoyenneté en vous engageant sur les questions sociales, publiques, politiques. (...) Aujourd’hui c’est devenu l’accusation (l'islam radical ndlr) fourre-tout pour éliminer une voix qui dérange."
AbdouRahmane Ridouane dénonce une "chasse à l'Homme (...) contre les structures associatives musulmanes, les lieux de culte, les écoles, qui ont une certaine liberté de ton, qui sont critiques et exigeants envers la République."
On ne demande pas des lois spécifiques pour nous on demande que celles qui concernent tous les citoyens nous soient accordées tout simplement.
AbdouRahmane RidouanePrésident de la mosquée de Pessac et de l'association "Rassemblement des musulmans de Pessac"
Regardez le reportage de V. Gascouat et C. Arfel
Aucun protagoniste interrogé
"Ce sont des accusations particulièrement graves" dénonce Sefen Guez Guez l'avocat de l'association, "alors que personne n'a été convoqué ni interrogé".
Pour lui cette procédure administrative menée sans "le filtre d'une procédure judiciaire" est choquante. "La préfecture peut faire ce qu'elle veut !" regrette t-il.
La préfecture, soumise à un devoir de réserve alors que la procédure est en cours, ne donne aucun détail sur les propos qu'elle estime condamnables.
Elle indique toutefois que la mosquée est sous surveillance depuis plusieurs années et que des faits contraires à la loi y ont été constatés.
La préfète a par conséquent "engagé une procédure contradictoire en vue de prononcer une fermeture temporaire de la mosquée Al Farouk à Pessac".
10 jours pour se défendre
L'association a dix jours pour apporter des éléments contradictoires aux accusations portées.
La préfète Fabienne Buccio, en concertation avec le ministère de l'Intérieur, décidera alors s'il y a lieu d'ordonner ou non une fermeture temporaire pouvant durer jusqu'à six mois.
Elle s'appuie sur la loi de 1905 et du code de la sécurité intérieure précisant que "l’ensemble de ces faits pourrait constituer des propos tenus, des idées et théories diffusées, ou des activités incitant à la violence, à la haine ou à la discrimination, provoquant à la commission d’actes de terrorisme ou faisant l’apologie de tels actes et justifieraient une telle fermeture temporaire".
Sefen Guez Guez, qui a été saisi du dossier jeudi soir, assure qu'une réponse sera apportée dans le délai imparti. Et que si, malgré tout, une fermeture temporaire est ordonnée, le tribunal administratif sera saisi.
Il déplore qu'une telle action ait lieu à quelques semaines du ramadan, une période particulièrement importante pour les musulmans, durant laquelle de nombreux fidèles se rendent à la mosquée.
"Qu'on prenne des sanctions contre ceux qui ont tenu ces propos si jamais ils sont avérés mais qu'on ne punisse pas toute une communauté" s'indigne l'avocat.
Une partie des locaux de la mosquée est louée par la mairie de Pessac. Franck Raynal maire (DVD) de Pessac, a indiqué qu'"à partir du moment où la préfecture prendra une décision administrative de fermeture il est évident que les locations que nous sommes amenés à consentir cesseront au même moment."