Grève du 13 janvier dans les écoles : le quotidien "intenable" des directeurs et enseignants

Depuis bientôt deux ans, ils font face à la pandémie de Covid-19 et aux multiples changements de protocole sanitaire dans les écoles. A la veille d'une mobilisation des syndicats contre la politique menée par le ministère de l'Education Nationale, voici le témoignage de plusieurs directeurs d'établissements scolaires en Gironde. Ils sont en première ligne.

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" C'est intenable !" regrette Pierre Leroy. Ce directeur de l'école primaire de Salleboueuf en Gironde nous confie ses difficultés. Ses journées sont rythmées par la crise sanitaire et elles sont longues, très longues : 

Je consulte mes mails dès mon réveil à 5 heures 40 et le soir jusqu'à minuit, pour vérifier que je n'ai pas oublié de noter un cas contact. C'est épuisant !

Un sentiment de lassitude et de colère qu'il résume ainsi:  "J'ai parfois l'impression de travailler pour l'agence régionale de santé. Je passe mon temps à faire de la veille, du contrôle sanitaire. Je fais de la gestion épidémique. Et je me sens bien seul à gérer le "contact tracing" du Covid dans mon école. "
Pierre Leroy gère un établissement de dix classes. En temps normal, il y a 255 élèves. En ce moment, beaucoup sont absents à cause du Covid-19, cas contacts ou positifs.

De l'énergie, ce jeune enseignant n'en manque pas. Lui qui travaille dans l'Education Nationale depuis 2017. "J'ai choisi de faire ce métier pour éduquer et former des citoyens libres et éclairés. Ce n'est pas vraiment ce que je fais depuis la pandémie".

Dans ce contexte, "la tension sur le terrain est extrêmement forte", met en garde Samantha Fitte, co-secrétaire départementale du SNUIPP ( syndicat du primaire - FSU ) en Gironde.

Le protocole sanitaire est chronophage et ingérable par les enseignants. Certains directeurs d'école passent plus de temps à envoyer des messages aux parents qu'à faire cours. C'est une véritable machinerie administrative, ce n'est pas ça l'école!". Et de préciser: "Ce n'est pas une grève contre le virus mais contre le ministre de l'éducation que nous faisons demain !

Samantha Fitte - syndicat SNUIPP Gironde -

France 3 Aquitaine

En colère aussi, Emmanuel ,directeur d'une petite école du sud Gironde. Il gère depuis trois ans une classe de 25 élèves. "Le pire, c'est tous ces changements de protocole sanitaire à appliquer. Ces injonctions que l'on découvre dans la presse, sans que les enseignants n'aient été consultés. Trois protocoles sur une semaine, c'est très compliqué ! On a vraiment  l'impression d'être méprisés". Voilà pourquoi il a décidé de faire grève.

Frédéric Vidalenc est directeur d'école à Val De Virvee en Gironde depuis six ans, il fait partie du SNUIPP. Trois classes, 55 enfants et une contamination au Covid-19 qui a explosé depuis la rentrée de janvier. 

On est en difficulté permanente. Avec tous ces changements de protocole sanitaire, on a l'impression d'avoir l'information au dernier moment. C'est agaçant et stressant.

Frédéric Vidalenc - directeur de l'école à Val De Virvee en Gironde

France 3 Aquitaine

Avec seulement une journée de décharge pédagogique toutes les trois semaines, ses journées sont bien remplies. "Je passe mon temps à faire tout autre chose que de l'enseignement. Monter un projet, lancer de nouveaux apprentissages, c'est devenu impossible ! On a l'impression de faire de la garderie, ce n'est pas le rôle de l'école, conclue-t-il.

Les directeurs d'école doivent aussi rassurer les parents "car les relations avec eux sont de plus en plus tendues. Les parents ne comprennent pas, on doit leur expliquer les nouvelles règles sanitaires qui changent sans cesse ! Cela me met souvent en porte-à-faux avec eux".

Pour Samantha Fitte, la politique menée par le ministère de l'Education Nationale provoque une désorganisation massive du système scolaire. Plusieurs syndicats demandent le retour de l'ancien protocole, qui consistait à fermer une classe dès qu'un cas positif était détecté chez les élèves. Il faut "renoncer aux allègements successifs du protocole mis en œuvre depuis fin novembre".

"Ce qui m'aide à tenir, c'est que j'aime mon métier quand même"

Travailler dans de meilleures conditions sanitaires et pédagogiques, c'est aussi le souhait de cette principale de collège dans la métropole bordelaise. 271 élèves absents sur 900, c'est un tiers des effectifs. "Je ne vais pas vous dire que c'est le paradis, mais ce n'est pas non plus catastrophique". Philosophe, elle s'adapte aux différents changement de protocole sanitaires.

On prend les choses comme elles viennent mais c'est vrai que c'est compliqué.

Principale de collège en Gironde

France 3 Aquitaine

Cette pandémie fragilise encore plus les élèves les plus vulnérables. Notamment sur le plan psychologique. Il y a de plus en plus d'élèves qui souffrent de phobie scolaire. Autre constat : " On n'a plus la possibilité d'avoir des moments de convivialité au sein du collège. L'ambiance générale est morose, c'est dommage. Ce qui m'aide à tenir, c'est que j'aime mon métier quand même".

Bref, une situation chaotique constatée sur le terrain par ces directeurs d'établissements scolaires. Submergés, résignés et ou en colère. Nombre d'entre eux ont décidé de faire entendre leurs voix ce jeudi 13 janvier.

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