L’aura du Général De Gaulle est née de son appel le 18 juin 1940 lancé sur les ondes de la BBC. En quelques jours, cet officier réputé austère désobéissait et entrait dans la légende. Il a quitté l'hexagone depuis l'aéroport de Bordeaux-Mérignac en Gironde.
La fin de la « drôle de guerre »
Le 10 mai 1940, après huit mois où soldats français et allemands se sont observés, les Allemands envahissent les Pays-Bas, le Luxembourg et la Belgique et pénètrent en quelques jours en France. C’est la débâcle.
Les états-majors sont dépassés par les événements, les régiments sont désorganisés. Les populations, pour fuir l’ennemi, se jettent sur les routes, en voiture, à cheval, à vélo ou à pied. Les gares sont prises d’assaut. Près de 10 millions de personnes sont en fuite.
C’est dans cette panique générale et cet effondrement moral que Charles De Gaulle joue en quelques jours son destin.
D’abord à Montcornet dans l’Aisne. Mission lui est confiée avec la division de chars qu’il commande de barrer la route vers Paris aux Allemands pour faciliter l’arrivée des renforts. Il passe à l’action le 17 mai. Les Allemands sont pris au dépourvu mais reprennent le contrôle de la situation.
Quelques jours plus tard, sa division reçoit l’ordre de reprendre le combat aux abords d’Abbeville à plus de 200 kilomètres de Montcornet dans la Somme. Les 28 et 29 mai, elle parvient à faire reculer les Allemands mais le lendemain ils reprennent le contrôle. La division française se replie. Même s’il n’a pas été victorieux, Charles De Gaulle reçoit les félicitations du haut-commandement et est nommé Général de division à titre temporaire.
Moins d’une semaine plus tard il entre au gouvernement.
Entrée au gouvernement et plusieurs allers retours pour Londres :
Le 5 juin, De Gaulle est nommé sous-secrétaire d’Etat à la guerre dans le gouvernement de Paul Reynaud. Il s’envole pour Londres le 9 juin à la demande du Président du conseil qui le charge de rassurer les Britanniques sur les intentions françaises de poursuivre la guerre.
Le 14 juin, le gouvernement quitte Tours pour se rendre à Bordeaux d’où De Gaulle repart pour Londres une deuxième fois. Il tente avec l’aide du gouvernement britannique de proposer une fusion complète entre les deux nations pour lutter contre l’Allemagne. Rentré à Bordeaux le 16 au soir, il apprend la démission de Paul Reynaud remplacé par Pétain qui est partisan de cesser le combat avec les Allemands.
Le projet de fusion est donc mort-né.
Le lendemain matin, Paul Reynaud lui fournit 100.000 francs sur des fonds gouvernementaux et à 9 heures un avion l’emporte pour une troisième fois en Angleterre pour ne revenir en France que quatre ans plus tard à l’occasion du Débarquement allié en 1944.
Ce 17 juin 1940, il est accompagné d’un jeune diplomate Geoffroy de Courcel et d’un officier supérieur britannique.
Mais c’est un homme seul, peu connu des Français qui aura été 11 jours sous-secrétaire d’état à la guerre d’un gouvernement démissionnaire et qui part pour un destin incertain et périlleux.
L’appel qu’il lancera le lendemain 18 juin sur les ondes de la BBC pour inciter chaque Français à le rejoindre pour continuer le combat sera à l’époque peu entendu. Mais par cet acte considéré par le gouvernement de Pétain de rébellion De Gaulle portera pour la postérité le titre de « l’homme du 18 juin ».
Je m’apparaissais à moi-même, seul et démuni de tout, comme un homme au bord d’un océan qu’il prétendait franchir à la nage.
Mémoires de guerre Charles De Gaulle lorsqu’il part le 17 juin à bord de l’avion qui le transporte pour l’Angleterre.
Julian Jakson est spécialiste de la France du 20ème siècle et professeur d’histoire à Queen Mary, Université de Londres. Il est l’auteur de la dernière biographie sur le Général De Gaulle paru en 2019 : « De Gaulle une certaine idée de la France ».
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L'historien Dominique Lormier apporte son éclairage sur le contexte de l'époque, ses relations avec Chaban-Delmas, résistant devenu maire de Bordeaux.