Un vent de révolte a soufflé sur Bordeaux. D'abord des défilés pacifiques où salariés et étudiants s'unissent puis vient la nuit des barricades. Il reste les souvenirs de ceux qui l'ont vécu et ont vu le tournant opéré dans la société.
"La France s'ennuie" a écrit une grande plume dans le Monde en mars 68, Bordeaux aussi. Ce sont les prémices d'un mouvement unique en son genre qui a aussi eu son ancrage dans la capitale girondine. Dèjà, les grands sites ouvriers, Dassault, notamment connaissent des grèves dès fin 66/67.
Début 68, le climat social se dégrade, annonçant la suite.
Dans les facultés aussi, la marmite bout. Les étudiants sont à l'étroit, leur nombre ne fait que croître.
Il y a surtout une contestation du pouvoir qui traverse la communauté étudiante comme le rapporte Joëlle Dusseau, étudiante à l'époque à Bordeaux, devenue historienne et co-auteur d'un ouvrage de référence " Mai 68 à Bordeaux " sorti pour le cinquantenaire.
Ca a été un moment hors du temps, quelque chose qui se passait intellectuellement où tout était remis en question, tout ce qui relevait des hiérarchies.
A Bordeaux, la journée du 13 mai sera un tournant. Grève générale... et rassemblement. Un long cortège estimé à 20 000 personnes avec la fragile jonction entre les salariés et les étudiants.
Occupation des facultés, déjà !, manifestations se poursuivent puis un nouveau tournant les 24 & 25 mai. Alors que tout s'est déroulé dans le calme jusqu'à présent, les défilés se terminent dans la violence.
24 mai : devant le grand Théâtre, les CRS présents massivement, les étudiants qui tentent de pénétrer dans ce haut-lieu culturel et les incidents éclatent. La nuit va être longue. Les barricades, les courses-poursuites dans les rues du centre. 48 heures d'émeutes, les étudiants se retranchent dans fac de lettres. Bilan : 180 blessés et 90 interpellations.
Voilà les moments marquants dans la capitale girondine, et les seules traces filmées de ce mai si particulier à Bordeaux. Reste les souvenirs de cette période et l'impact fort dans la société comme l'a constaté Joëlle Dusseau.
A ce moment-là, la structure du pouvoir patriarcal, de l'homme dans le couple, dans la famille a commencé à être ébranlé.
Toutes les grandes luttes féministes se sont brutalement développées autour de la contraception, l'avortement, égalité des salaires, débat sur le viol...
Écoutez l'analyse qu'elle a livrée à Hélène Chauwin :
Plongée dans le monde de mai 68 : A revoir notre émission spéciale avec en plateau :
- Philippe MADRELLE, sénateur de la Gironde, élu depuis 50 ans
- Joëlle DUSSEAU, co-auteure du livre "Mai 68 à Bordeaux" en duplex de Dax
- Jean PETAUX, politologue de Sciences Po Bordeaux, accompagné d'une étudiante.