La maladie hémorragique épizootique (MHE) gagne de l'ampleur dans le Sud-Ouest. Une maladie transmise par un moucheron aux bovins et cervidés, mais qui n'affecte pas les hommes. Quels sont les dangers, pourquoi se répand-elle ? Le point sur cette pathologie.
C'est une maladie qui semble gagner du terrain chaque jour. Ce vendredi 6 octobre, la FDSEA des Landes signale un premier cas détecté de la maladie hémorragique épizootique (MHE), sur un taureau d'un élevage au nord-est du département. Cette détection intervient seulement deux semaines après l'apparition des premiers cas en France.
La MHE a été repérée pour la première fois dans l'Hexagone le 21 septembre, dans des élevages de Hautes-Pyrénées et Pyrénées-Atlantiques. En une semaine, une centaine de cas étaient déclarés dans ces deux départements, répartis en 19 foyers. Depuis, les Hautes-Pyrénées et les Pyrénées-Atlantiques sont placés sous surveillance, comme les Landes, ainsi qu'une partie de la Gironde et du Lot-et-Garonne.
Qu'est-ce que la maladie hémorragique épizootique (MHE) ?
Cette maladie détectée chez les bovins en France était d'abord qualifiée de maladie hémorragique épizootique des cervidés, car c'est chez les cerfs qu'elle est d'abord repérée aux Etats-Unis dans les années 1950. "Dans nos régions, on trouve essentiellement des signes cliniques chez les bovins, c'est pour cela qu'on a réduit le nom", explique Stéphan Zientara, virologue et vétérinaire à l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses).
"C'est une maladie causée par un virus transmis par des moucherons piqueurs, les culicoides, détaille le spécialiste des maladies infectieuses animales et des maladies vectorielles [transmises par un vecteur]. Ces moucherons se nourrissent de sang, et font passer le virus pendant la piqûre."
Cette maladie n'est cependant pas contagieuse : les bovins infectés ne peuvent pas se contaminer entre eux, "sauf si on opère un échange sanguin". En revanche, un moucheron sain peut contracter le virus en piquant une bête infectée, puis transmettre le virus à une autre bête saine, et ainsi de suite. "Les moucherons sont des vecteurs biologiques, ils restent infectés à vie", ajoute le chercheur.
Cette maladie est-elle dangereuse ?
C'est chez les cervidés que la MHE fait le plus de dégâts, avec jusqu'à 90 % de taux de mortalité observé pour certaines espèces. Mais chez les bovins, "le taux de mortalité est très faible, moins de 1% en Europe, précise Stéphan Zientara. La maladie provoque chez eux des symptômes, comme des lésions des cavités buccales, de l'hyperthermie, un état général affaibli durant quelques jours, voire quelques semaines. Mais dans la grande majorité des cas, les animaux retrouvent un état de santé normal."
"Ce n'est ni une maladie très grave, ni hautement mortelle", rassure le spécialiste. De plus, elle n'est pas transmissible à l'homme, ni par piqûre, ni par contagion orale, ni par consommation de produit animal (viande, lait) venant d'un animal infecté. "Les recherches n'ont jamais mis en évidence de franchissement de la barrière des espèces, développe le chercheur de l'Anses. Le virus de la MHE ne fait pas partie des virus à risques chez l'homme."
Comment expliquer son arrivée en France ?
Arrivée depuis l'Espagne, cette maladie a franchi la frontière par le biais de ses vecteurs, les moucherons. "Généralement, ceux-ci ne se déplacent que de quelques kilomètres autour d'un foyer, mais ils peuvent aussi être transportés par des vents, avance Stéphan Zientara. On pense que son arrivée en Europe, depuis la Tunisie où le virus était présent dès 2021, vient soit des vents, soit de transports d'animaux, comme des bovins, porteurs du virus." Ce déplacement d'animaux virémiques expliquerait l'émergence de nouveaux foyers de contamination.
Si le dérèglement climatique n'est pas directement responsable de l'apparition de la MHE en France, pour le spécialiste de l'Anses, les hausses des températures participent à "une augmentation de la durée de présence des insectes vecteurs, ce qui va donc augmenter le nombre de moucherons infectés" et donc, augmenter mathématiquement la transmission du virus.
"Avec la zone de surveillance et l'obligation d'un test PCR pour que les animaux puissent quitter la zone, l'objectif est de confiner l'infection en évitant le transport d'animaux virémiques." Confiner l'infection en attendant le retour du froid et de l'hiver, qui feront disparaître les moucherons et avec eux, la MHE. "On a l'espoir que l'infection reste localisée [sur le Sud-Ouest], mais nous sommes dépendants des conditions climatiques", concède Stéphan Zientara.
Et si la MHE devrait disparaître avec l'hiver, rien ne garantit que la maladie ne refera pas son apparition l'année prochaine, lorsque les températures se radouciront. "Il est très dur de prédire ce qu'il va se passer, mais la probabilité que le virus réapparaisse est importante. On ne peut pas considérer qu'il disparaisse facilement avec l'hiver", conclut le virologue.