Pierre Hurmic, candidat des Verts et de la gauche, parviendra-t-il à enlever Bordeaux à la droite, au pouvoir depuis 75 ans ? Arrivé 96 voix derrière le maire Nicolas Florian, tous les espoirs sont encore permis pour son équipe, même si l'alliance du maire avec LREM ajoute à l'incertitude.
Quatre-vingt seize petites voix. C'est l'écart qui a donné de l'espoir à Pierre Hurmic et son équipe écologiste et socialiste au soir du premier tour le 15 mars. À ce moment-là, ils restent quatre dans la course. Ils ne sont plus que trois depuis l'alliance du maire sortant Nicolas Florian, qui a pris la suite d'Alain Juppé en 2019, avec le candidat LREM Thomas Cazenave, dans la dernière ligne droite le 1er juin dernier.
Si l'on aditionne les voix de ces deux listes, elles sont en capacité de gagner, mais c'est sans compter sur le fort taux d'abstention du premier tour, 63 % et le choix des électeurs qui ne suit pas forcément celui du candidat et les alliances. Plus qu'un danger, l'équipe de Pierre Hurmic y voit un mérite à cette fusion :
Ça rebat les cartes et ça présente de façon beaucoup plus simple le paysage politique bordelais. Maintenant, vous avez deux projets politiques en compétition. Le projet très conservateur du maire sortant, la ville est gérée par la même famille politique depuis 75 ans, présente un modèle de ville dépassé, sans aucun souci d'innovation.
Pierre Hurmic - liste "Bordeaux respire " -
Depuis la crise sanitaire et ce soir du premier tour, l'équipe du maire sortant a été dans l'action pour gérer la situation. Elle a aussi donné d'autres inflexions à son programme comme la place du vélo dans la ville ou la relocalisation alimentaire sur lesquels Nicolas Florian insiste maintenant. Pierre Hurmic est dubitatif : " Ils n'auront aucun problème à péréniser ce qu'ils ont fait car ils en ont fait très peu. c'est une politique cosmétique mais pas à la hauteur des enjeux "
C'est très superciel, c'est verdir la carte postale. Nous, on veut une ville verte à habiter, on ne veut pas verdir la carte postale. On veut pas du coloriage, on veut un changement de modèle de ville. Une ville qui
choisit résolument la voie de la transition écologique.
Pierre Hurmic - liste "Bordeaux respire " -
L'argument du vote utile
Pierre Hurmic mise sur son projet mais aussi sur le rejet que peuvent avoir les électeurs du candidat LREM, Thomas Cazenave, de cette fusion avec le maire sortant. Il insiste dans sa campagne fortement sur ce point. Parlant du candidat rallié au maire, il se rappelle : " Il disait : Je ne m'allierai pas avec le maire sortant. Nous ne partageons pas les mêmes convictions et les mêmes valeurs. Voilà un candidat qui s'est beaucoup engagé en disant qu'il était incompatible avec le maire sortant, et puis du jour au lendemain, on a découvert qu'il y avait un accord qui avait été signé sur un coin de table à la veille du dépôt des listes. Ce qu'on a découvert aussi, et c'est malvenu en terre girondine, c'est que c'était un accord électoral qui a été imposé par le national, ce qui a été fait dans toutes les grandes villes où il y avait une menace, Lyon, Bordeaux, Strasbourg et Tours. Ce sont des moeurs politiques d'une autre époque. C'est assez illisible pour son électorat. "
Au deuxième tour, Pierre Hurmic espère donc qu'une partie des électeurs de la liste Renouveau Bordeaux ( Thomas Cazenave LREM) se tournera vers lui. Idem pour le concurrent Philippe Poutou et sa liste Bordeaux en luttes qui réunit les sensibilités d'extrême-gauche. "Les électeurs du premier tour choississant Poutou ont voulu marquer le coup." Pour Pierre Hurmic, au second tour, ils pourraient bien voter utile et pour le changement, donc pour lui. Encore une raison de croire en la victoire.
Le rendez-vous manqué avec le vote jeune au premier tour
Constat au soir du 15 mars dernier, il y a eu cette surprise. " On a réalisé que contrairement à ce que nous pouvions penser, il y a eu beaucoup d'abstentionnistes chez les jeunes. on est allé regarder les listes d'émargements. On n'a pa réussi à mobiliser les 18-34 ans, or c'est notre électorat privilégié, auprès d'eux qu'on fait les meilleurs scores. Ils ne sont pas assez sentis mobilisés pour cette élection. "
Depuis que nous sommes repartis en campagne, on fait tout pour mobiliser cette tranche d'âge. Les jeunes de notre liste, car on en a des très jeunes, sont très actifs pour aller mobiliser cet électorat. On a fait un document de campagne spécifique pour eux.
Pierre Hurmic - liste "Bordeaux respire " -
Idem pour certains quartiers traditionnellement favorables au vote écologiste, les dernières élections européennes sont une référence, où l'abstention a aussi été forte. Alors, le travail sur le terrain et ces secteurs est reparti de plus belle.
L'évolution des priorités
Secoué comme tous les candidats par la crise sanitaire, confronté à l'évolution des priorités pour répondre aux besoins de la population, l'équipe de " Bordeaux respire " a ajouté des mesures de soutien qu'elle n'avait pas dans son programme initial. Cap aussi donc sur le social et l'économie.
Notre programme du premier tout était très orienté autour de l'urgence climatique. Ce que nous a apporté la période difficile que l'on vient de vivre, c'est qu'il fallait davantage insister sur la dimension sociale et économique de la crise. Cette crise a révélé des misères importantes dans notre ville et maintenant le besoin d'accompagnement des entreprises, des artisans et des commerçants.
À court, moyen et long termes pour aller vers une économie décarbonnée, c'est un nouvel axe qui a vu le jour et un slogan qui a aussi évolué quelques jours avant le premier tour pour devenir " Le monde change, changeons Bordeaux. " comme s'il y avait déjà les prémices d'un monde d'après post-covid en vue.