Le 2 juillet 2021, Sandra Pla, 31 ans était mortellement poignardée par son ex-conjoint. Elle avait pourtant porté plainte et signalé, à plusieurs reprises, sa dangerosité. Trois ans après le drame, sa famille assigne l'État pour faute lourde.
Une plainte pour faute lourde. Trois ans après la mort de Sandra Pla, tuée par son ex-conjoint à Bordeaux le 2 juillet 2021, sa famille poursuit l'Etat et lui reproche son inaction. La trentenaire avait pourtant porté plainte et signalé la dangerosité de l'accusé.
"Sandra Pla a dénoncé des faits de violence psychologique, de harcèlement à plusieurs reprises. L'objet de cette assignation, c'est de démontrer les fautes de l'État", explique Me Elsa Crozatier, avocate de la mère, du beau-père et du demi-frère de la jeune femme.
Elle a écrit différents courriers. Et en fin de compte, elle n'a jamais eu la protection qu'elle souhaitait.
Elsa CrozatierAvocate de la famille de Sandra Pla
Plainte et signalements
C'est en décembre 2020, que Sandra Pla, qui vivait dans le quartier Saint-Augustin à Bordeaux, fait part à son compagnon, Mickaël Falou, de sa volonté de le quitter. Ce dernier devient alors violent envers lui-même et terrorise son ex-compagne. La 6 janvier 2021, Sandra Pla porte plainte. Elle fait part de son inquiétude pour elle et pour leur fille, âgée de 4 ans à l'époque. "Elle a ensuite fait des compléments de plainte et saisi le juge aux affaires familiales pour solliciter une ordonnance de protection. Tout ça a été refusé", rappelle l'avocate de la famille.
"Elle a senti que c'était vraiment très grave et que la situation dégénérait complètement : elle avait besoin de l'aide de la police et de l'État. Elle a écrit au parquet et au président de la République une lettre très explicite : on voyait venir le drame", poursuit Me Crozatier.
Elle a demandé si elle devait, comme d'autres femmes, finir assassinée par son ancien compagnon.
Me Elsa CrozatierAvocate de la famille de Sandra Pla
Mortellement poignardée chez elle
Le 2 juillet 2021, des voisins de Sandra entendent des cris et préviennent la police. Vers 10h, son corps sans était retrouvé par les forces de l'ordre. Elle avait été poignardée à une vingtaine de reprises. Son ex-conjoint sera interpellé à Mérignac quelques instants plus tard.
"Si on avait expliqué à son ex-compagnon que ses actes étaient inadmissibles, qu'il fallait qu'il arrête, on aurait potentiellement pu éviter ce drame", maintient Me Crozatier. L'avocate considère que l'Etat est à l'origine de nombreux manquements : "une fois, on lui a refusé sa plainte et on lui a demandé de déposer une main courante. Une autre fois, alors que son ex-compagnon la harcelait, on lui a répondu : on ne peut rien faire, il est dans la rue, vous n'avez qu'à appeler des Corses ou des Roumains".
Pression permanente
Inquiets de la situation et voyant que la réponse policière tardait trop, la mère et le beau-père de Sandra emménagent alors chez elle, dans son petit appartement. Ils installent un système de vidéo surveillance devant sa porte. Les enregistrements en témoignent : Mickaël Falou se rendait chaque jour devant le domicile de son ex-compagne. "Les voisins aussi ont pu attester qu'il était là en permanence, il mettait en place un système de pression et de menace permanente", poursuit l'avocate. Dans une unité médico-judiciaire, la trentenaire fait constater son état et se voit attribuer 15 jours d'ITT.
C'est dramatique 15 jours d'ITT. Mais la police n'a pas bougé.
Elsa CrozatierAvocate de la famille de Sandra Pla
Eviter de nouveaux drames
C'est dans ce contexte qu'intervient ce dépôt de plainte, à l'image de celui déposé par les proches de Chahinez Daoud, tuée en mai 2021 à Mérignac. "Aujourd'hui pour Sandra, c'est trop tard. Mais sa famille veut que ça n'arrive plus jamais à d'autres", résume Me Crozatier.
"Il faut que la police soit apte à voir la dangerosité de certaines personnes et à mettre en place des systèmes de protection. Ce que Sandra a demandé à de nombreuses reprises, sans que ce ne soit suivi d'effets".
Mickaël Falou sera jugé en décembre 2024 devant la cour d'assises de la Gironde. Il encourt la réclusion criminelle à perpétuité.