Marion Larat, lourdement handicapée après un AVC qu'elle impute à la prise d'une pilule de 3e génération, a bien été victime d'un "accident médical", sans toutefois que ne soit établie la responsabilité du laboratoire Bayer qui commercialise le contraceptif, selon un jugement au civil publié mardi.
En 2011, le lien causal entre la prise de la pilule Méliane et l'accident de la jeune femme avait déjà été reconnu par la commission régionale de conciliation et d'indemnisation des accidents médicaux, mais c'est la première fois que la justice se prononce sur ce lien.
Un "accident médical non-fautif"
Une chambre civile du tribunal de grande instance de Bordeaux, qui a rendu son jugement le 8 février, a ainsi estimé que l'AVC dont a été victime en 2006 la jeune femme, restée handicapée à 65%, "constitue un accident médical non fautif", à savoir imputable à la prise du médicament, mais sans qu'aucune "faute" du laboratoire pharmaceutique allemand ne soit établie.
L'accident médical reconnu, le tribunal a condamné l'Office national d'indemnisation des accident médicaux (Oniam) à verser à la jeune femme une provision de 550.000 euros pour les préjudices subis qui devront être précisément évalués par une nouvelle expertise.
il est décevant de constater l'absence de toute condamnation à l'égard du laboratoire
"Si nous pouvons être satisfaits du lien d'imputabilité reconnu pour la première fois par un tribunal, il est cependant décevant de constater l'absence de toute condamnation à l'égard du laboratoire", a réagi dans un communiqué l'avocat de Marion Larat, Me Jean-Christophe Coubris
"Les magistrats ont estimé que la simple indication dans la notice d'utilisation, de la possibilité de la survenue d'un tel accident, suffisait à les exonérer de toute responsabilité", a-t-il déploré.
130 plaintes déposées après celle de Marion Larat
Lors de l'accident, il avait été découvert que Marion Larat présentait au moment de la prescription de la pilule des pathologies cardiaque et génétique jamais diagnostiquées et qui constituaient des contre-indications absolues.
Elle avait été la première à déposer plainte en décembre 2012. A l'époque, l'affaire avait poussé les autorités sanitaires à accélérer le déremboursement des "mini-pilules". Au total, 130 plaintes avaient été déposées.
En juin 2017, le parquet de Paris a classé l'enquête concernant 29 marques de pilules contraceptives de 3e et 4e générations accusées de favoriser de graves troubles artériels et veineux, ainsi que huit laboratoires et l'Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM).
Les magistrats avaient conclu qu'il n'était pas possible de prouver "avec certitude" à l'échelle individuelle que l'accident médical était dû à la prise des pilules.
Trois plaintes avec constitution de partie civile pour "atteinte involontaire à l'intégrité de la personne humaine" visant le laboratoire Bayer et l'ANSM ont été déposés depuis devant le pôle de santé publique du TGI de Paris entraînant la désignation d'un juge d'instruction.