L’exposition « ¡ Libertad ! » retrace l’histoire de ces femmes, ces hommes et ces enfants, qui ont fui l’Espagne et le franquisme et se sont réfugiés en Gironde entre 1936 et 1939. C’est une histoire racontée jusqu’au 19 avril aux Archives départementales de Bordeaux.
À l’occasion du 80e anniversaire de la fin de la Guerre d’Espagne, les Archives départementales rappellent l’implication et l’importance de la Gironde dans cette guerre civile qui a opposé le gouvernement républicain du « Frente Popular », au mouvement nationaliste dirigé par Francisco Franco. De par sa proximité géographique, l’Aquitaine est rapidement impliquée dans ce conflit qui aura fait au total plus d’un million de victimes.
Un fait historique méconnu
Qu’ils soient arrivés par bateau ou qu’ils aient seulement transité par les ports girondins, le département a accueilli 10 000 réfugiés espagnols entre 1936 et 1939. Un événement marquant de l’histoire de la région qui reste néanmoins méconnu. Pourtant, le point de départ de cette guerre civile se situe à Irun, proche de nos frontières du Pays Basque.Tout ça s’était un peu estompé dans nos mémoires. Agnès Vatican, directrice des Archives départementales de la Gironde.
À partir de 1937, les relations entre le gouvernement français et les réfugiés espagnols se durcissent. À cette époque, la communauté espagnole est déjà bien ancrée sur les terres girondines et en constante progression, ce qui favorisera l’insertion de certains réfugiés. D’autres n’ont pas eu cette chance, et ont été internés dans des camps, comme celui de Gurs dans les Pyrénées-Atlantiques. Certains hommes furent contraints de repartir en direction de la Catalogne, pour transiter vers ce qui restait de l’Espagne républicaine.Après le déclenchement de la guerre et l’arrivée de l’exode, il y a une pression forte qui est faite sur ces espagnols qui deviennent de plus en plus indésirables. Agnès Vatican, directrice des Archives départementales de la Gironde.
Quant aux femmes, aux enfants et aux personnes âgées, ils avaient la possibilité de rester en France et d’être hébergés dans des centres, souvent insalubres.
La Gironde, base arrière de soutien aux républicains Espagnols
L’implication du département dans cette guerre s’illustre aussi par l’engagement de près de 200 Girondins aux côtés de l’Espagne républicaine ou dans les Brigades internationales. Beaucoup ne revinrent pas de ce conflit, d’autres comme Roger Allo ou Charles Nancel Pénard se lancèrent dans la résistance à leur retour. Pendant trois ans, des réseaux d’acheminement d’armes ont été mis en place depuis les ports de Bordeaux, pour la plupart clandestinement, et ce malgré la neutralité annoncée par le gouvernement français dans cette bataille.Bordeaux, un point d’ancrage pour l’organisation des secours
Ce conflit a engendré un nombre important de victimes qui ont été acheminées vers la région pour se faire prendre en charge par les services de soins. Les archives de l’Hôpital Saint-André (Bordeaux) et celles de la Maison de Santé Protestante de Bagatelle (Talence) nous renseignent sur les blessés qui ont été soignés sur ce territoire. Sur les quais de Bassens à Bordeaux, un ancien paquebot espagnol, le « Habana », avait été transformé en « navire-hôpital » pour y soigner les enfants ainsi que les soldats blessés.Un long travail de recherches pour faire parler l’histoire
L’exposition s’est construite à partir des fonds conservés par les archives de la région, celles des autorités sanitaires, des administrations et de quelques souvenirs de particuliers.Cette rétrospective vient appuyer le travail de recherches de l’historien Bernard Lavallé et de son épouse Francine Agard-Lavallé. A ce sujet, ils ont écrit un livre : « Car ce combat est aussi le nôtre », un ouvrage qui s’attache à étudier les rapports entre la Gironde et l’Espagne, durant la période de guerre civile qui a fait sombrer le territoire espagnol dans le nationalisme.