Collège de Coutras : des toilettes mixtes pour les petits d’un côté et les grands de l’autre, une mesure pas si anodine

Derrière cette mesure appliquée depuis la rentrée se cachent de vrais enjeux. Des toilettes non genrées, mais séparées entre petits et grands, permettraient une plus grande propreté des lieux, et une sécurisation nécessaire. Les toilettes peuvent en effet être un lieu de harcèlement à l’école.

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C’est une mesure qui peut paraître anodine mais qui, aux yeux de certains professionnels, a de nombreux effets vertueux. Pour la première fois en Gironde, un établissement a décidé de faire ce choix.
C’est une initiative de la directrice du collège Henri de Navarre à Coutras . Depuis la rentrée scolaire, filles et garçons partagent les mêmes toilettes. En revanche, une segmentation par tranche d’âge a été mise en place. C’est-à-dire que toutes les toilettes sont mixtes, par contre les petits et les grands ne partagent les mêmes toilettes.
Une mesure visiblement bien acceptée par les élèves et qui aurait visiblement plus de vertus qu’il n’y parait.

L’habitude est prise

« C’était un peu bizarre », explique Chérine. « Nous, les filles on avait notre intimité. On était entre nous. Mais au final on s’est habituées, on n’avait pas trop le choix. Mais personnellement ça n’a rien changé. On s’est habituées et pour nous, c’est normal ».
Au collège Henri-de-Navarre, la mesure semble avoir été finalement acceptée. « Cela m’a un peu surpris tout de même », dit Robin, élève de 5eme. « Durant mes années au primaire, j’ai toujours connu les toilettes pour garçons et les toilettes pour filles. Alors cette année, cela m’a surpris mais pas forcément choqué. Parce qu’on s’est habitués et au final, c’est plutôt sympathique et je pense que cela peut limiter les problèmes dans les années à venir ».

« Les élèves qui étaient un petit peu stressés au début, notamment les jeunes filles qui se demandaient si les garçons n’allaient pas venir les embêter, et bien au bout d’une semaine ces questions ne se posaient plus », se réjouit Jacques-Olivier Nicot, le principal adjoint. Un souci d’intimité qui n’est pas l’exclusivité des filles. Les urinoirs ont donc été supprimés.

Plus de propreté

Autre changement, la mixité aurait apporté un peu plus de propreté. « Avant, les toilettes des garçons étaient moins propres », dit Léoncine. « Ça sentait l’urine et tout. Et maintenant que c’est mixte, c’est mieux ».

C’est vrai , quand on rentrait dans les toilettes, ça sentait pas bon du tout. Maintenant les toilettes sont plus propres.

Ahmadou, élève de 5e

Faute de toilettes propres, bon nombre d’élèves français se retiendraient de faire leurs besoins. Ils iraient « le moins possible ». Ce qui n’est pas sans poser des problèmes sanitaires. Cette capacité à se retenir déclencherait des infections urinaires. Et puis aller aux toilettes, c’est aussi se laver les mains ce qui permet de ne pas propager certaines épidémies du type grippe ou gastroentérites.

Les toilettes : une zone propice au harcèlement

Séparer les toilettes pour les petits, « c’est une idée de la principale », explique Jacques-Olivier Nicot. « Le constat chaque année, comme dans la plupart des collèges de France, est que les toilettes sont un endroit un petit peu compliqué à gérer notamment avec les petits qui sont malmenés ou qui peuvent l’être dans tous les cas. Et l’image qu’ils ont lorsqu’ils arrivent au collège, c’est que les toilettes sont un endroit compliqué et certains élèves ne sont plus aux toilettes car ils ont peur. On a la chance d’avoir ici deux blocs sanitaires importants », explique le principal adjoint. 
"On s’est dit pourquoi pas mettre d’un côté les 6e et 5e garçons et filles, et de l’autre côté, les 4e et 3e garçons et filles aussi pour éviter cette différence. Et du coup par extension, on s’est dit que ça serait une bonne idée de mixer les garçons et les filles et de voir ce qui serait positif dans cette expérience ».

Les toilettes seraient le lieu le plus sensible et difficile à surveiller. Pour que les toilettes ne deviennent pas des zones de non-droit, le collège Henri-de-Navarre a donc décidé de séparer les toilettes réservées aux petits et ceux dédiés aux grands.

Au début, ça partait d’une inquiétude de la part des 6e et 5e, pour lesquels les toilettes, c’est un lieu qui pouvait générer de l’angoisse (…) ».

Josepha Ruiz, CPE.

« Les toilettes sont un point névralgique, c’est-à-dire qu'on a régulièrement des enfants qui n’osent pas passer par les toilettes de peur de se faire embêter", poursuit la CPE. "C’est une zone qui peut être un peu considérée comme une zone de non droit. Il n’y a pas tout le temps des adultes de surveillance même si on a des assistants d’éducation qui font un travail de surveillance dans ce poste-là ».

« Apprendre à vivre mieux ensemble »

Cette mesure est donc loin d’être anodine. Elle participe à un meilleur bien-être des enfants. Mais jusqu’où cela va-t-il ? A écouter les encadrants du collège Henri-de-Navarre, c’est une première étape pour faire sauter les barrières.

« On est dans une période de la vie qui est primordiale », dit Josepha Ruiz, « où les changements doivent être importants et portés par des éducateurs qui ont des certitudes. Et les toilettes, cela fait partie de quelque chose d’un peu plus global. Car on a des projets qui portent sur l’égalité entre les filles et les garçons (…). Permettre cette mixité dans les toilettes, on y aurait pas cru à la rentrée et avec le recul on s’aperçoit qu’ouvrir les lieux, enlever des barrières, cela permet d’apprendre à mieux vivre ensemble ».

« Oui, cela nous apprend qu’on est tous à égalité filles et garçons », abonde Léoncine. « Il n’y ’a pas de problème entre les filles et les garçons », poursuit Ahmadou.

Ils ont fait ça pour dire qu’on avait tous la même égalité.

Chérine

« Cela pose les jalons d’une plus grande mixité », affirme Jacques-Olivier Nicot. « Cela ouvre un peu la société sur une réflexion, sur un problème de genre, qui ne se pose pas. A vrai dire chez les élèves de cet âge-là, je n’ai pas l’impression que cette question soit prégnante. Cela nous permet de nous poser les bonnes questions. Est-ce que ce n’est pas nous, adultes, qui posons des barrières ? »  Dans tous les cas, cette expérience a engagé une réflexion sur la mixité au sein de l’établissement tant du côté des élèves que des encadrants.

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