A Villenave-d'Ornon, près de Bordeaux, les forces de gauche, ont réussi à jouer collectivement derrière une femme, Stéphanie Anfray face au maire sortant Patrick Pujol qui a raté le podium le 15 mars.
C’est une victoire qu’ils ne veulent pas manquer et qui serait inédite selon eux après un quart de règne de la droite. Dans la cinquième ville de la métropole ,socialistes, France Insoumise, écologistes, radicaux de gauche, communistes n’ont pas hésité : ils feront bloc.
Union à gauche
Les deux listes "Villenave écologique, solidaire et citoyenne" (socialistes et écologistes) qui a obtenu 31,4 % des suffrages et celle de "Changer" (France Insoumise et Générations) créditée de 11,23% repartent unies.
A la tête de cette nouvelle liste : la socialiste Stéphanie Anfray. C’est elle qui se réjouit de faire face au maire sortant Patrick Pujol, qui a obtenu 48,37 % des voix.
Notre rassemblement est une chance historique. Nous voulons tourner une page, mettre fin à 25 ans de règne, notre liste est le signe d’un renouveau générationnel et politique.
Stéphanie Anfray, tête de liste à Villenave d'Ornon
Certes, ils le savent bien sur le papier le compte n’y est pas mais qu’importe les cartes sont rebattues et la détermination de Stéphanie Anfray et ses coéquipiers est encore plus forte.
Le taux d’abstention de 64,61% au premier tour leur laisse penser qu’il y a un réservoir et une marge de progression très importante dans cette ville qui s’est sociologiquement modifiée au fil du temps et où la population a augmenté de 12% en 5 ans.
Leur ville d’après, ils l'imaginent avec un pôle de santé, un urbanisme raisonné et un budget municipal participatif. Une femme maire dans cette ville de 33 000 habitants, ce serait du jamais vu, une vraie respiration selon ses colistiers.
Démocratie participative
Stéphanie Anfray, ne cache pas son enthousiasme : " Nous voulons une ville d’après, il y a urgence et la crise sanitaire nous a conduit à revisiter nos objectifs qui allaient déjà dans la bonne direction."
La candidate évoque, entre autres, trois axes majeurs : santé, urbanisme et démocratie participative.
Miser sur la santé
" Sur le site de l’hôpital Robert Picqué, il faut un pôle de santé environnementale, de gérontologie, et d’épidémiologie", poursuit la candidate. Pour la liste de gauche qui s’opposait déjà au transfert de l’hôpital des armées Robert Picqué sur Bagatelle avant la crise, pas la peine de faire de grand discours, les faits parlent d’eux-mêmes. "Notre volonté de défendre un pôle de santé publique sur ce site est renforcée par la crise. C’est la garantie d’avoir un soin de proximité".
Stéphanie Anfray se justifie :
Nous voulons mettre en place sur ce site un pôle de santé environnementale, un pôle de gérontologie qui serait en lien avec une maison des aidants et un pôle de recherche et d’épidémiologie.
Stéphanie Anfray explique qu’il s’agit d’une urgence sanitaire pour une population à la fois vieillissante et une autre plus jeune : " Nous comptons travailler avec l’ARS et l’Université pour que ce site vienne en complément de Bagatelle", ajoute-t-elle.
... et maîtriser l'urbanisme
Stéphanie Anfray qui voudrait voir un "urbanisme maîtrisé et des territoires dédiés à l’agriculture", évoque une autre urgence, environnementale celle-là, et observe une ville qui s’est développée de façon anarchique .
Il faut mettre un terme à tout ce qui est sorti de terre ces dernières années c’est trop. On peut presque tendre la main à son voisin quand on ouvre sa fenêtre… Il faut aérer, il faut un urbanisme agencé et nous proposerons un habitat responsable.
"Il faut avoir une mobilité douce, des espaces verts et bien sûr une logique de circuits courts rendus essentiels par la crise des espaces dédiés à l’agriculture que nous allons mettre en place pour l’alimentaire, notre ville en a tous les moyens. "
Référendum d’initiative citoyenne
Cette unique liste de gauche veut en finir avec les décisions arbitraires prises par un maire, comme on a pu le vivre pendant la crise et contraires à l’avis de la préfète. Stéphanie Anfray rappelle qu’administrer la cité, c’est faire participer tous les citoyens.
Nous mettrons en place le référendum d’initiative citoyenne et le budget participatif. Les citoyens doivent pouvoir choisir, c’est une question de légitimité.
A cela nous ajouterons une vraie politique qui implique les jeunes avec une offre culturelle diversifiée.
"Aider les acteurs économiques d’abord, je le fais tous les jours "
Le maire sortant Patrick Pujol est arrivé premier (avec 48, 37% des suffrages) à la tête d’une liste divers droite. Il n’a envisagé aucun changement dans sa liste. Pas question de négocier quoique ce soit. Le temps n’est plus selon lui aux jeux politiciens.
Vous savez moi, tous les noms comme République en Marche, Socialiste ou autres, je ne sais pas ce que cela veut dire, ce qui compte c’est l’envie des gens, ce ne sont pas les étiquettes.
Patrick Pujol - maire sortant de Villenave d'Ornon.
Comme tous les maires sortants, Patrick Pujol joue la prime à la gestion de la crise. La messe est dite et le maire insiste :
La campagne pour moi, c’est secondaire. Aujourd’hui je travaille et du travail, il y a en a. Pas pour dans deux ans mais pour tout de suite, et pour demain, car la crise sanitaire a laissé des gens en grande difficulté.
Le maire n’a donc pas une minute à perdre, " Nous sommes sur le terrain depuis le début et nous ne le quittons pas".
La droite mise sur l'emploi et l'économie
Sa priorité explique-t-il est de se pencher sur les problèmes économiques et sanitaires à commencer par ceux notamment des artisans et des commerçants :
Je les reçois, j’essaie de comprendre leurs préoccupations et après je les aide à résoudre leurs problèmes. Je les défends auprès des propriétaires, de la Chambre de commerce de tous les acteurs avec qui ils doivent traiter. Vous savez il y a des gens qui vont perdre leur boulot, il faut préserver les activités de quartiers, c’est primordial.
Être aux manettes et continuer de gérer les difficultés de ses administrés, voilà le crédo de Patrick Pujol.
« Les personnes âgées, c’est aussi une autre priorité »
Sur la commune, nous avons trois ou quatre établissements pour personnes âgées dont un municipal. Mon souci est de leur apporter toute l’aide nécessaire comme on l’a fait pendant la crise du Covid19.
Faire en sorte que les EHPAD ne connaissent pas de nouveaux problèmes, c’est l’autre souci de Patrick Pujol.
Une chose est sûre, le maire sortant privilégie l’action et semble faire confiance aux liens qu’il entretient avec les populations pour résister à ses compétiteurs de gauche.
En Marche appelle au vote blanc
Reste à savoir ce que feront les électeurs de Denis Delhoume le candidat de la République en Marche qui a fait 6,80%. Interrogé, le marcheur de la première heure répond dans un communiqué dont voici un extrait :
"Les votes RenouVo démontrent tout à la fois qu'un nombre grandissant d'habitants veulent revoir la gestion municipale moderne et mutualisée avec Bordeaux Métropole et avec davantage de démocratie participative. (....) La liste menée par Stéphanie Anfray a fait le choix de s'allier avec la liste "Changer" représentant la France Insoumise. Nous ne pouvons soutenir une liste ayant dans ses rangs des reprrésentants de l'extrême gauche. Ne partageant pas la vision du maire sortant qui considère l'électeur comme objet éphémère, nous n'appelerons pas à voter pour sa liste. La liste RenouVO se positionne pour le vote blanc tout en respectant le libre choix des personnes ayant voté pour sa liste au premier tour."
Aucun doute que le vecteur déterminant sera l’abstention, rappelons que la participation n’était que de 35,49 % au premier tour le 15 mars 2020.