Un Girondin a inventé un système de bâche automatique. Elle se déploie en cas de pluie ou de chute des températures. L'expérimentation menée depuis 4 ans montre que la vigne est protégée des maladies. Sans subir aucun traitement.
L'idée, toute simple, trottait dans la tête de Patrick Delmarre depuis de longues années.
Un parapluie géant pour éviter le recours aux pesticides
Ce conseiller viticole indépendant cherchait une alternative aux produits phytosanitaires dans la lutte contre les maladies.
"Là, vous voyez les feuilles, les futures grappes sont contaminables par le mildiou, une maladie qui peut occasionner jusqu'à 90% de pertes mais qui a besoin de pluie pour s'étendre".
Je me suis dit, si on empêche la pluie de tomber, on va empêcher les maladies de se développer
Patrick Delmarre - l'inventeur du VititunnelFrance 3 Aquitaine
Il a donc mis au point un système de bâche automatique qui se déplie à la moindre goutte d'eau et se replie aussitôt l'averse terminée.
"Au début on me prenait un peu pour un fou !" sourit l'inventeur du Vititunnel.
Expérimentation dans dix châteaux girondins
Il a réussi à convaincre dix châteaux girondins de tester son dispositif. Au bout de quatre années d'expérimentation, il n'est pas peu fier du résultat.
"Sur ces quatre ans, on a eu deux années de pression exceptionnelle du mildiou. Et sous le Vititunnel, on a eu quasiment aucun dégât, même moins que sur les rangs d'à côté qui ont eux été traités".
Des résultats confirmés par l'Institut français de la Vigne et du Vin qui suit de près l'invention de Patrick Delmarre.
"Toutes les semaines on passe noter les maladies qui se développent sur la vigne. On regarde quel est l'effet du Vititunnuel, s'il y a une véritable différence de protection" explique l'un des experts de l'IVV, Nicolas Avline.
On voit que sur les dix parcelles équipées du dispositif en Gironde on protège aussi bien avec le Vititunnel que si on faisait une dizaine ou une quinzaine de traitements
Nicolas Avline - Institut de la Vigne et du VinSource : France 3 Aquitaine
Sortir du tout traitement
L'INVV cherche à accompagner les viticulteurs vers une moindre utilisation des produits phytosanitaires. "Il faut chercher de nouveaux systèmes, on travaille sur énormément de pistes à l'IVV et là c'est très très innovant et très efficace en plus. C'est une de nos meilleures alternatives avec l'utilisation de nouveaux cépages résistants".
Au cœur du Médoc, sur le prestigieux domaine de Château Margaux, trois rangs ont été équipés. Blandine de Rouffignac, la responsable Recherche et Développement du site, observe aussi avec beaucoup d'attention les résultats.
"On a accepté de se lancer dans l'expérimentation parce que c'est aujourd'hui le seul système qui nous permet de n'utiliser aucun produit pour lutter contre le mildiou. Et on souhaite trouver la meilleure alternative à l'utilisation du cuivre".
Une solution pour les zones sensibles
Château Margaux a accepté de prolonger l'expérimentation deux ans de plus. Et pourrait être l'un des premiers acquéreurs de l'outil une fois mis sur le marché. "On n'imagine pas mettre ce Vititunnel sur tout notre vignoble, c'est pas possible. Mais sur certaines zones, en bordure de points d'eau par exemple, où il est interdit de traiter à moins de 15 mètres, ça pourrait être une solution intéressante".
C'est en effet l'utilisation visée par Patrick Delmarre.
Je pense par exemple aux vignobles situés à côté de lotissements, de stades, d'écoles, de maisons de retraites etc... là c'est une solution pour faire une zone de sécurité de 50, 100 mètres où il y aurait zéro pesticide
Patrick Delmarre - Inventeur VititunnelSource : France 3 Aquitaine
Coût estimé : entre 50 000 et 150 000 euros l'hectare couvert.
L'abri amovible se déploie aussi dès que les températures chutent à 4,5 degrés et s'avère là aussi efficace. Le constat a été fait suite aux fortes gelées d'avril dernier, feuilles et grappes se sont développées sans perte. Un autre atout pour son inventeur.
Il veut maintenant affiner son prototype, le rendre plus discret et plus design avant de le commercialiser. Ce ne devrait pas être avant 2025.
Voir le reportage réalisé par Cendrine Albo-Reichert et Jean-Michel Litvine, montage Robin Nouvelle :