Dom Juan ou le Festin de pierre: Carnet de bord #3

Dom Juan ou le Festin de pierre est le nouveau spectacle proposé par le théâtre de l'Union et l'académie supérieure professionnelle de théâtre du Limousin. Voici le carnet de bord numéro 3 de cette. création Une adaptation originale et audacieuse présentée du 19 au 29 mars. 

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C'est l'histoire d'une création que nous vous proposons de suivre ici même. Voici le troisième épisode des carnets de bord de Dom Juan ou le Festin de pierre.  Cette nouvelle création de Jean Lambert-wild, le directeur du Théâtre de l'Union de Limoges et de Lorrenzo Malaguerra sera présentée sur scène du 19 au 29 mars à Limoges. 
Ce spectacle revisite le mythe de Dom Juan. Quatre des dix-sept jeunes comédiennes et comédiens de l’Ecole Supérieure Professionnelle de Théâtre- l’Académie de l’Union joueront également tour à tour et en alternance Don Elvire, Charlotte, Don Carlos et le Mendiant.

Carnet de bord #3


Ses modèles sont Jean Gabin et Lino Ventura – « la vieille école, c’est la classe », dit Steve Tientcheu. Et comme il n’avait pas le bon pied pour être footballeur, il est devenu comédien. Et honnêtement, on se dit que nous avons eu de la chance. Après une formation théâtrale, il est aujourd’hui en pleine ascension cinématographique et on le retrouve à l’affiche de nombreux films français récents. Avec Dom Juan, Steve Tientcheu revient à ses premiers amours, le théâtre. Dire qu’il excelle en Sganarelle n’est donc pas surprenant mais il ne faut pas non plus trop en dire parce que l’homme est timide. On se contentera donc d’écrire que Steve Tientcheu a bien la classe de ses illustres aînés.

Nous avons découvert l’acteur en regardant le documentaire qu’Alice Diop lui avait consacré alors qu’il suivait le Cours Simon. Nous avons été marqués par son acharnement au travail bien que le film racontait beaucoup d’autres choses, dont le regard que posaient sur lui les professeurs et les élèves bien policés du Cours. Cet acharnement ne s’est pas démenti durant les répétitions : travail sur la diction et le sens, entraînement physique pour tenir le choc d’un Sganarelle virevoltant sur scène pendant près de deux heures, construction d’une partition très précise du personnage afin que l’ensemble des actions de jeu, des émotions et de la parole soit concret.

En engageant Steve Tientcheu, l’idée était aussi de marquer une différenciation physique maximale avec le Don Juan de Jean Lambert-wild. La taille, la corpulence, la couleur de peau, la voix, tout oppose l’un et l’autre. Et c’est là aussi un ressort comique que nous exploitons dans le spectacle, notamment quand Sganarelle impose sa présence physique, renversant ainsi le rapport du maître et du valet. Il est ainsi apparu au fil des répétitions que Sganarelle n’était pas du tout le faire-valoir comique de Don Juan. On pourrait même dire qu’il est le personnage principal de la pièce, tant les situations qu’il traverse sont nombreuses. Le Sganarelle de Steve Tientcheu est émotionnellement ballotté de la joie à l’épouvante, de la colère à la candeur, de l’amour à la haine. On voit là à quel point il est important de comprendre un personnage par ses émotions, par l’histoire qui le constitue, par son passé, son enfance, la maison où il a habité et une foule de détails qui permettent d’investir pleinement un caractère. Comme le dit Steve : « Aujourd’hui, je vois plus de Doms Juans que de Sganarelles : dans la rue, haut placés dans l’administration, haut placés dans des lieux de culte, qui contrôlent pas mal de monde… C’est eux aujourd’hui qui ont la parole, dans les médias, un peu partout… Au temps de Molière, c’était Sganarelle la star, Dom Juan était seul. Enfin, ils étaient beaucoup mais ils ne se montraient pas comme aujourd’hui. La manière de penser de Dom Juan est écrite dans les scènes, dans la façon dont il parle ! C’est incroyable que Molière ait pu voir ça. » Le parcours de Steve Tientcheu au cinéma l’a sans doute très bien préparé à accomplir ce travail-là.

Hors du plateau, on le voit aussi parler aux académiciens. Leur donner quelques conseils pour améliorer leur jeu, partager les petites astuces du métier. Il ne le fait jamais en maître, plutôt en grand frère qui sait à quel point il est difficile de résister dans le métier. Comme il le dit : « la scène doit vous faire vibrer, sinon ce n'est pas la peine ! » et encore « Le théâtre, c’est le vrai truc : c’est le kiff, c’est là où on s’éclate, là où on doit envoyer… La pression est énorme! Moi je préfère le théâtre au cinéma, même si le cinéma ce sont les étoiles, les gens nous reconnaissent dans la rue, ce sont les paillettes ! Mais c’est un autre travail. On ne peut pas mentir quand on est sur les planches, on a le public et ses réactions en face de nous. »

Par Jean Lambert-wild, Lorenzo Malaguerra et Marc Goldberg
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