Depuis une quinzaine d'années, Jeannette Brin est restauratrice de tableaux en Haute-Vienne. Diplômée d’une école parisienne, elle travaille pour les particuliers, les antiquaires et les collectivités territoriales. Portrait.
Dans la pénombre, à l’aide d’une lampe à rayons ultraviolets, Jeannette Brin inspecte minutieusement un tableau détérioré. Avec ses mains gantées, elle effleure délicatement la toile pour y percevoir des détails pouvant l'aider dans son enquête. Son œil avisé parvient à extirper quelques informations du fond des âges. "Je vois que quelqu'un d'autre, une autre main, a apporté à ce tableau, indique-t-elle. Je vois très clairement des petits traits mais aussi des grosses tâches qui ne sont pas d'origine."
Cette analyse ne représente que la première étape d'une longue chaîne de travail. Un travail constitué de patience et de passion : Jeannette Brin est restauratrice d'œuvres d'art en Haute-Vienne. Depuis une quinzaine d'années, elle remet en état des peintures et en assure la conservation. Diplômée d'une école parisienne, cette Allemande d'origine répond aux demandes de particuliers, antiquaires et collectivités territoriales. Aujourd'hui, sa réputation dépasse largement les frontières de Nouvelle-Aquitaine.
Son atelier situé à Bosmie-l'Aiguille ressemble à une réserve de musée. Des dizaines de toiles s'accumulent. Ici, un portrait en provenance d'Australie. Là, un tableau de Juliette tombant dans les bras de Roméo. Un peu plus loin, un paysage immense, plus grand que Jeannette, attend que celle-ci lui offre une seconde jeunesse.
"Les fibres de jute sont extrêmement cassantes, se brisent toutes seules", commente la restauratrice. Pour illustrer son explication, elle tire doucement quelques fils drus qui jaillissent de la toile en épis. "Il va falloir que je les consolide, poursuit-elle. C'est un tableau qui est arrivé d'une collection privée du Limousin. Il a été fixé dans le mur. C'est une difficulté pour moi car le mur est resté collé sur le revers. Ses propriétaires en ont fait don à la ville de Saint-Junien."
Des icônes religieuses... aux scènes plus frivoles
Régénération de vernis, enlèvement de repeint par voie chimique ou mécanique, pose de protection, greffe de toiles pour renforcer des déchirures, traitements antibactériens, comblement des écaillages... Des dizaines de techniques doivent être maîtrisées pour convenir aux différents besoins des œuvres d'art et réparer les ravages du temps. Parfois, restaurer signifie également prendre le pinceau : cela demande d'appliquer une maigre sous-couche de peinture ou de réintégrer certaines couleurs manquantes.
Des icônes religieuses aux scènes orientalistes plus familiales, Jeannette Brin déambule à travers le temps, la matière et la palette chromatique. Si son savoir-faire consiste à ressusciter le passé, pour elle, il s'agit avant tout de penser à l'avenir : "Le but d'une restauration, c'est de sauvegarder une œuvre que quelqu'un d'autre a créée, pour qu'elle soit lisible dans le futur."