Ce 11 octobre est le troisième jour de ce procès, où un homme de 62 ans est jugé pour tentative d'assassinat en récidive, devant la Cour d'assises de Haute-Vienne. Après avoir étudié le déroulement de la nuit du crime et recueilli la version de l'accusé, les jurés ont cherché à comprendre sa personnalité. La victime, qui a reçu une balle en pleine tête, est toujours en vie.
À la Cour d'assises de Haute-Vienne, ce mercredi 11 octobre, c'est le troisième jour d'un procès pour tentative d'assassinat en récidive. Alors qu'il connaissait Marie-Hélène Michaud depuis trois mois seulement, Eric Talavéra, âgé de 58 ans au moment des faits, est accusé de lui avoir tiré une balle en pleine tête le 1ᵉʳ juillet 2019. Laissée pour morte dans un chemin sans issue, la victime a survécu, mais est aujourd'hui gravement handicapée.
Après que les deux premiers jours ont été consacrés au déroulement de la nuit du crime et à la version de l'accusé, afin de savoir s'il y a eu préméditation ou non, c'est la personnalité de l'accusé qui est abordée ce mercredi.
Décrit comme beau parleur, impulsif, dans l'hyper contrôle
Au fil des jours, on comprend les contrastes de sa personnalité. Il est décrit comme jovial, serviable, cumulant les relations amoureuses, pouvant se montrer même romantique et poète à ses heures. Mais cet homme, costaud et corpulent, est aussi qualifié de sanguin, impulsif, aimant mener son monde.
À la question de la présidente : « Comment en êtes-vous venu à utiliser une arme contre elle ? Parce qu’on n’a toujours pas compris ! », la cour n’obtiendra pas vraiment de réponse, mais un flot de paroles, détails et considérations sans rapport. Lorsque la présidente le recadre, il réagit en lui tournant le dos, l’ignore et se plaint à son avocat qu’on ne cesse de lui couper la parole.
Quelques témoins se succèdent à la barre, convoqués à la demande de la défense ou des parties civiles. Chacun exprime son ressenti personnel sur la relation de l’accusé avec la victime : « Marie-Hélène était une femme forte, gaie, quelqu’un de très gentil, trop même. Eric Talavéra est un beau parleur, on boit ses paroles. Si on n'est pas vigilant, on rentre dans son jeu », estime un témoin.
Il ressort de l’enquête que sa rencontre avec la victime lui avait changé la vie. « Il la trouvait belle, active, dynamique, il l’appelait mon diamant », souligne un témoin. Jean-Christophe Romand, avocat de l’accusé, complète : « Il l'a décrite comme quelqu'un d'exceptionnel. Si c'est quelqu'un de hors norme pour lui, la question est de savoir s'il sera à la hauteur de cet amour. Manifestement, il va tomber amoureux et peut-être que cela n'a pas été réciproque et que cette rencontre ne s'est pas faite aussi bien qu'il le souhaitait. »
Il est beau parleur, impulsif, veut être maître de tout. On a tout le profil de l'homme violent, capable d'aller jusqu'à pouvoir tuer. C'est ça qui est terrible dans cette affaire. Cette femme a essayé de lui expliquer de ne pas revenir et il est quand même revenu.
Jean Valière-Vialeix, avocat de la famille de la victimeà France 3 Limousin
« Il m'a enlevé toute ma vie. Mais qu'est-ce que j'ai fait de mal ? »
Puis vient à la barre avec grandes difficultés Marie-Hélène Michaud, soutenue par la psychologue de l'association France Victimes et son avocate. « Il m’a tout enlevé, toute ma vie. Mais qu’est-ce que j’ai fait de mal ? », répète-t-elle. « Parce que j’étais en vacances ?
Je voudrais qu’il le dise, pourquoi il a fait ça ! Je n’ai plus de vie, je ne peux plus prendre ma voiture, moi qui aime tant lire, je ne peux plus lire, écrire, non…
Marie-Hélène Michaud, victimeà la barre ce mercredi
La victime, âgée de 56 au moment des faits, était responsable d'un bureau d'un poste. Décrite comme très active, pleine de vie, aimant les voyages, elle était partie en Tunisie lors d'un voyage familial, comme elle le faisait depuis vingt ans. Un voyage que son ancien compagnon n'aurait pas supporté.
La victime ne se souvient plus de la nuit des faits
De la soirée, elle n’a quasiment plus aucun souvenir. Quelques flashes lui reviennent sur certaines questions de la présidente, comme les coups reçus dans la nuit à son appartement. Mais elle répond aussitôt : « Je voyais le grillage, je voulais juste courir vite, très vite, c’est tout. »
« C'est tout le problème de ce procès. M. Talavéra se sert justement de l'état de santé de la victime pour pouvoir évoluer dans ses versions qui sont différentes, encore aujourd'hui », affirme Jean Valière-Vialeix, avocat de la famille de la victime.
« Ma cliente rentre de vacances. Elle est harcelée par cet ex-amant par mail et par SMS depuis plusieurs jours. Il arrive chez elle et à ce moment-là, malheureusement ma cliente ne s'en souvient pas. Mais ce qui est certain, c'est qu'on va la retrouver quelques heures plus tard dans un endroit isolé, en tenue de nuit, sans portable, sans chaussures, sans rien. Avec une balle dans la tête. Et on sait qu'elle est arrivée à cet endroit dans le coffre de sa propre voiture », relate Marie Golfier-Rouy, avocate de la victime.
L'accusé a tiré trois fois autour de la victime pour lui faire peur
Lorsque la présidente demande à l’accusé ce que le témoignage de Marine-Hélène Michaud lui fait ressentir, celui-ci répond : « Je suis navré, je pourrais lui présenter mes plus plates excuses, mais ça ne servirait à rien, on ne peut pas revenir en arrière. Elle s’est levée comme un ressort ! », comme si la balle dans la tête qu'elle a reçue était sa faute, et justifiant ce drame qui lui vaut d’être, une nouvelle fois, dans le box des accusés d’une Cour d’assises.
Jusqu'à présent, beaucoup d'explications techniques - sur la trajectoire et la distance du tir en pleine tête de la victime - ont été fournies. Mais aussi sur la façon dont s'est pris Eric Talavéra, à trois autres reprises, à tirer autour de la victime pour lui faire peur. Néanmoins, peu d'explications sur tout le contexte de violences qui a précédé le drame.
Le débat se poursuivra avec le témoignage des deux filles de la victime. Le verdict est attendu ce vendredi 13 octobre.
L'accusé encourt la réclusion à perpétuité.