Elle s'appelle Lara Dumas, elle est étudiante en biologie à Limoges. Son identité transgenre, elle en est fière, et souhaite la revendiquer. Rencontre avec la première dauphine de Miss Haute-Vienne.
Les rues de Limoges étaient colorées samedi 9 septembre 2023. Deux mille personnes ont défilé pour la marche des fiertés, qui met en avant toutes les identités de genre et les différentes sexualités.
Parmi les drapeaux éclatants et les visages joviaux, Lara Dumas. Cette étudiante en biologie, actuellement en deuxième année de licence, est l'officielle première dauphine de Miss Haute-Vienne. Sur sa poitrine, elle arbore un drapeau aux couleurs rose, bleu et blanc. Son drapeau. Lara Dumas est une jeune femme transgenre.
"Battez-vous pour ce que vous êtes réellement, et ne changez pas pour plaire aux autres, affirme la Limougeaude de 21 ans. Soyez fier de qui vous êtes. Acceptez-vous, et croyez en vos rêves."
Le rêve d'enfant
Croire en ses rêves, Lara l'a fait. "Quand j'étais un petit garçon, je me voyais comme une fille garçon manquée, se remémore-t-elle. Au fond, je savais qu'il y avait quelque chose. Il y avait un mal-être."
Pour elle et ses proches, sa transition n'a pas été simple à gérer. Mais depuis, Lara Dumas se sent enfin "elle-même". "Je suis épanouie, heureuse, souffle-t-elle. J'ai un travail, un copain, des amis, mes études... Une vie normale."
L'année dernière, l'étudiante décide de s'inscrire au concours officiel Miss Haute-Vienne. Pour se donner confiance en elle, rendre fière sa famille, donner tort à celles et ceux qui l'ont moquée… Les raisons sont nombreuses.
"Je voulais pouvoir me dire que je suis une jeune femme. Je peux être jolie, être désirée, plaire."
Enfant, Lara n'osait même pas rêver d'une récompense attribuée par un concours de beauté féminin. Le 25 avril dernier, elle décroche pourtant le titre de deuxième dauphine, puis prend celui de première après le retrait d'une candidate. Le public, lors des votes, n'était pas au courant de sa transidentité.
Ce résultat est une délivrance pour la jeune femme. Elle se souvient de la réaction de sa famille. "Ma sœur était à fond, elle criait. Mon frère s'est déplacé pour me voir. Mon père n'a pas pu venir, mais je sais qu'il est fier. Ça n'a pas été tout le temps facile. Le jour où j'ai annoncé ma transidentité, ce fut un bouleversement au sein de la famille. Mais avec le temps, on a su se relever tous ensemble."
Encore tabou dans le monde des Miss
Sa transidentité, Lara ne l'a jamais cachée. Lors de son inscription au concours officiel Miss Haute-Vienne, elle n'en a pas parlé. Quelle utilité ? Elle coche toutes les cases. C'est une femme, y compris aux yeux de l'État.
Ce n'est que plus tard qu'elle en parle. Le comité du concours était au courant, mais a choisi de ne pas partager l’information aux médias et partenaires. Contacté, son président Hervé Mérigaud n’a pas souhaité répondre à nos questions.
"Parmi tous les partenaires, il y a des personnes qui n'acceptent pas, lâche Lara. Au final, c'est bien de forcer la chose. De montrer qu'une femme trans peut être miss ou dauphine. Car pendant le concours, des parents se sont plaints auprès des présidents. Heureusement, le comité a pris ma défense. J'ai entendu quelqu'un dire "ah, mais c'est un homme ça". J'ai eu envie de lui dire : "ouai, et l'homme, il est première dauphine". Il faut arrêter avec ces tabous et ces méchancetés. Il faut inculquer des valeurs de tolérances, d'acceptation."
Le changement, c'est pour quand ?
À la suite de notre reportage, le comité du concours officiel Miss Haute-Vienne a annoncé à Lara certaines décisions. Sa présidence a proposé à l'étudiante de faire une future vidéo pour parler du sujet de la transidentité et des interventions en milieu scolaire.
"Ils se sont un peu excusés de ne pas avoir bien compris ma particularité, relate la première dauphine. C'est super. C'est ce que je voulais lorsque j'ai décidé de participer à ce concours. Beaucoup de gens sont dans l'incompréhension et l'intolérance."
Depuis un mois, Lara Dumas est ambassadrice de l'association limougeaude Warrior Colors. Son but, promouvoir toutes les identités de genre. La jeune femme espère ainsi contribuer à faire bouger les choses.