Nexon, l'un des camps d’internement oubliés du Limousin

Durant l’Occupation, une cinquantaine de camps de regroupement, de surveillance, d’internement et de travail furent créés par l’administration française en Limousin. Celui de Nexon en Haute-Vienne fut l’un des plus importants. Une exposition retrace cet épisode peu glorieux et oublié de l’histoire de la Seconde Guerre Mondiale en Limousin.

On les a oubliés, disparus ou effacés de la mémoire collective.

En Limousin, les camps n’ont pas été des camps de concentration ou d'extermination comme les nazis en construisirent en Allemagne, en Europe de l'Est ou même en Alsace. Mais ils ont bel et bien existé.

Durant toute la période de l’Occupation, ils ont servi à réprimer les opposants au régime de Vichy puis les victimes de l’occupant nazi.

Parmi eux, le camp d’internement de Nexon en Haute-Vienne. Il n’en reste plus rien aujourd’hui, juste une stèle commémorative à l’entrée d’un quartier pavillonnaire qui recouvre exactement le périmètre du camp disparu.

Un camp d'internement créé par l'administration française sous les ordres du maréchal Pétain

Le camp d’internement de Nexon fut créé en novembre 1940, par l’administration de Vichy dirigée par le maréchal Pétain. Il comptera jusqu’à 845 détenus et 173 gardiens pour une population de 2 583 habitants dans la commune.

Les détenus du camp de Nexon étaient des gens qui avaient fui l’Allemagne, fui le nazisme, qui étaient venus chez nous. Ils pensaient être protégés par la République, par la France pays des droits de l’Homme. Ce qu’a fait ce gouvernement de Pétain c’est qu’il les a rendus à leur prédateur ...

Guy Perlier, historien, spécialiste des camps du Limousin

 

L’emplacement du camp, à côté de la gare et légèrement à l’écart du bourg, ne devait rien au hasard. Il permettait d’assurer un embarquement rapide et discret vers d’autres lieux comme la déportation dans les camps de concentration et d’extermination nazis.  

Les ressortissants étrangers de race juive pourront … être internés dans des camps spéciaux par décision du préfet de leur résidence.

Décret-loi du gouvernement de Vichy - octobre 1940

D’une surface d’environ 3 hectares, le camp de Nexon contenait une zone pour les internés et une zone pour l’administration et le personnel. Il était doté d’une prison et d’un chemin de ronde intérieur qui longeait un treillage en fil de fer de 3,5 mètres de haut.

A l’extérieur, un double réseau de fils de fer barbelés reliait des miradors aux quatre coins du camp et des guérites. Une haute palissade obstruait la vue du camp aux personnes qui passaient sur la route de Limoges.

Des conditions de détention terribles

Selon l’historien Guy Perlier, spécialiste de l’histoire des camps du Limousin et auteur de plusieurs ouvrages sur le sujet, la durée des internements à Nexon a souvent aggravée la dureté du régime carcéral.

Les internés pouvaient manquer de l’essentiel et souffrir particulièrement des atteintes du froid, de la boue et de la pluie. Durant l’hiver 1942 on comptera dans le camp de Nexon 76 décès en 5 mois.

Pour Guy Perlier « ce camp hôpital se révéla être finalement un mouroir ».

Ici, on ne meurt pas dans l’hôpital, peu souvent dans l’infirmerie du camp, presque toujours dans la promiscuité impudique des baraques ...

Lettre d'un détenu du camp de Nexon à sa famille

Le 29 août 1942, 450 Juifs dont 68 enfants de la région de Limoges furent rassemblés à Nexon, livrés aux nazis et déportés à Auschwitz.

En octobre 1942, le camp devint un camp hôpital pour remplacer celui de Récébédou dans la banlieue de Toulouse, puis celui de Gurs dans les Pyrénées-Atlantiques en novembre 1943.

Le 11 juin 1944, l'attaque du camp par les Résistants FFI de Georges Guingouin permit à 54 détenus de s'évader. Les autres internés furent transférés à Limoges au camp du Grand Séminaire par la Milice de Limoges. Ceux qui ne parvinrent pas à s’évader furent frappés et maltraités par les miliciens français aux ordres de Pétain. Le camp de Nexon fut définitivement fermé en 1945.

Un système répressif organisé autour des camps

Dans son ouvrage « La main de Pétain » (Ed Les Monédières) l’historien Guy Perlier explique qu’ « il y avait bien dans la France de Pétain un système cohérent de gestion des populations jugées suspectes inspiré de sa lecture xénophobe et antisémite du monde » … « un système répressif organisé autour des camps de séjour surveillés, comme celui de Nexon, chargés de retenir les individus de toutes nationalités jugés dangereux » … « Ce système s’avèrera très utile pour organiser des rafles, puis regrouper et déporter les victimes des nazis vers les camps de concentration et d’extermination d’Europe Centrale, notamment au départ de Nexon »

Une exposition

À l’occasion du 80e anniversaire de la Déportation, la municipalité de Nexon, en partenariat avec l’AFMD (Amis de la Fondation pour la Mémoire de la Déportation) de Limoges, présente l’exposition « Camps d’internement en Haute-Vienne » du samedi 16 avril au samedi 30 avril (informations au 05 55 58 33 34).

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