Au fil des ans, le réchauffement climatique augmente. Avec 24 500 étangs, le Limousin a deux fois plus de plans d'eau que la moyenne nationale. Des scientifiques estiment que ces bassins contribuent à diminuer le volume d’eau disponible. Faut-il ou non en effacer certains ? Éléments de réponse...
Dans les années 60, le grand-père de Martine Lévêque et ses deux frères avaient creusé un petit étang de 1 000 m², à Chaillac-sur-Vienne en Haute-Vienne.
On y faisait des pique-niques, des parties de pêche, les enfants jouaient. C'étaient de beaux après-midi.
Martine Lévêque, co-propriétaire d'étang
24 500 étangs en Limousin
Après-guerre, on dénombrait 2 000 étangs en Limousin. Dans les années 1950 à 1970, plus de 20 000 autres ont été construits. Aujourd’hui, en Limousin, on recense 24 500 étangs, soit un par km².
Martine et ses deux frères ne peuvent plus entretenir le leur, alors ils ont pris une décision qui leur fend le cœur : effacer l’étang.
Ils se sont adressés à l’Établissement Public Territorial du Bassin de la Vienne qui organise les travaux et donne une prime à l’effacement.
L'E.P.T.B. nous propose une petite aide d'un millier d'euros. Cela paye à peu près 1/3 des travaux.
Martine Lévêque, co-propriétaire d'un étang
"L'intégralité de ces sédiments vont se minéraliser et nous allons avoir une zone humide qui existait déjà avant la construction de cet étang. Une zone a fort intérêt, notamment en hydrologie", appuie Sébastien Gros, technicien de l'Etablissement Public Territorial du Bassin de la Vienne.
Zone humide, qu'es aquò ?
À titre d'exemple, près de Saint-Jouvent en Haute-Vienne, six propriétaires ont effacé leurs étangs, aidés par le Syndicat d’Aménagement du Bassin de la Vienne.
Comme avant, le ruisseau traverse de nouveau cette zone humide qui relargue l’eau en période de sécheresse. Un étang, lui, évapore presque ½ litre par seconde et par hectare. Pour mieux comprendre, Yoann Brizard, directeur du Syndicat d'Aménagement du Bassin de la Vienne, compare les étangs à des assiettes :
"Il suffit de mettre une assiette au soleil dans votre jardin et vous regardez un litre d'eau s'évaporer très rapidement. Vous mettez cette même quantité d'eau dans une petite bassine protégée par de la pelouse. Vous allez voir que l'évaporation va être beaucoup plus lente. C'est la multiplicité de ces assiettes au soleil qui pose un souci sur la qualité de l'eau en Limousin."
Les opposants à l'effacement
Il existe un point de vue diamétralement opposé : celui du Syndicat des propriétaires d’Étangs. Il souhaite conserver tous les étangs et refuse l'idée des zones humides comme solution.
"Il y a de la biodiversité dans une zone humide, soit, tant qu'elle a de l'eau. Quand elle est sèche, la zone humide, il n'y a rien, affirme Frédéric Garraud, président du Syndicat des Étangs de Haute-Vienne. On se ressource autour d'un étang. Personne ne va se ressourcer autour d'une zone humide. Avec un étang, on peut faire plein de choses, se promener autour... on peut pêcher. Il y a des étangs où l'on peut se baigner. Il y en a d'autres dont on peut se servir pour éteindre un incendie. On peut produire du poisson."
Une utilité aux étangs partagée par Lydie Laurent, directrice adjointe à la Direction Départementale des Territoires de Haute-Vienne.
Les plans d'eau, ça peut être vraiment des ressources pour l'eau potable, pour du soutien d'étiage en été quand les cours d'eau sont à des débits très faibles et bien sûr aussi pour sécuriser l'agriculture.
Lydie Laurent, directrice adjointe à la Direction Départementale des Territoires Haute-Vienne
Selon la D.D.T., effacer un gros étang peut coûter entre 10 et 100 000 €. " À la D.D.T., nous n'avons pas comme politique, d'emblée, d'effacer les étangs, explique Lydie Laurent, mais plutôt d'identifier quel est l'usage qu'ils peuvent avoir aujourd'hui ou dans le futur."
L’effacement d’autres étangs est programmé, notamment vers la Briance. Un phénomène qui reste marginal, malgré les subventions des collectivités, leur suppression reste faible. En Haute-Vienne, la D.D.T. n’a instruit que quatre dossiers d’effacement en 2022.
Récit de Cécile Descubes