Des jeans indéchirables fabriqués dans les Landes dans une démarche écologique

Du vendredi 11 au dimanche 13 mars 2022, Bordeaux reçoit pour la toute première fois le salon Made in France. L'occasion de découvrir des entrepreneurs locaux. Rencontre avec l’un d’entre eux, Pierre-Henry Servajean, fondateur d’une marque de jeans ultrarésistants à Capbreton (Landes).

Il a créé l’un des jean les plus résistants au monde. Le Bordelais Pierre-Henry Servajean a inventé un tissu capable de protéger efficacement les motards en cas de chute. Ce fan de motos et professionnel du textile est aujourd’hui à la tête de la marque Bolid’ster, à Capbreton (Landes), garantissant une production en circuit court et respectueuse de l’environnement. Il sera présent au salon du Made in France de Bordeaux du 11 au 13 mars.

Choisir la sécurité ou le confort

Il faut revenir en 2001 pour comprendre la genèse de cette aventure entrepreneuriale. Féru des deux-roues, Pierre-Henry Servajean tombe de sa moto. Il se rend compte que sa tenue n’est pas suffisante pour le protéger : son jean se perce au contact du goudron, il est blessé. À la recherche du pantalon idéal, il fait face à un dilemme : choisir la sécurité, avec un pantalon très lourd et peu confortable, ou le confort, avec un pantalon classique mais qui ne protège pas.

“Je ne trouvais pas le pantalon qui répondait à mes critères, alors je me suis lancé dans la recherche d’un tissu”, raconte-t-il. Cela tombe bien, c’est son domaine, puisqu’il vend tous les jours du tissu aux grandes marques de prêt-à-porter. Mais il ne trouve rien. Ni tissu, ni fil.

En 2003, l’invention de l’Armalith

Pierre-Henry Servajean finit par trouver une fibre non-textile très résistante : le polyéthylène, issu du domaine aérospatial et militaire. Il n’y a plus qu’à l’assembler avec une fibre de coton pour en faire un tissu. C’est ainsi qu’il invente l'Armalith et que le premier brevet d’une longue série naît en 2003. 

L’armalith résiste à l’abrasion, aux accrocs, et à la déchirure. Une matière innovante. “J’ai eu de la créativité et de la chance”, relate modestement, Pierre-Henry Servajean. “Mon approche n’était pas celle d’un textilien, c’est peut-être pour cette raison que j’ai eu l’idée d’assembler des fibres de cette façon pour avoir le meilleur des deux mondes : monde technique et monde du confort et de l'esthétique”.

“Un jean 501 qui protège comme un cuir”

Avec son nouveau tissu, Pierre-Henry Servajean se rend chez BMW à Munich. “Ils me disent que c’est bien trop cher, que je n’ai aucune chance de vendre ce tissu. Je rentre un peu triste”, relate-t-il. En 2005, il remporte un concours d’innovation qui lui finance une étude de marché de l’Armalith. Une aubaine pour le jeune entrepreneur.

“Cette étude révèle qu’il y a une clientèle demandeuse : le motard rêve d’un pantalon qui ressemble à un jean 501 mais qui le protégerait comme un cuir d’une chute à moto”.
D’après l’étude de marché, les consommateurs sont prêts à dépenser plus de 300 euros pour un jean haute performance.

En 2006, Pierre-Henry Servajean crée la marque Esquad et commercialise ses premiers jeans de moto : 70 % des jeans sont exportés à l’étranger. Mais sa start-up est vite balayée par la crise des subprimes en 2008.

“ L’usine a mis au point mon armalith selon mes rêves”

Pendant quatre ans, Pierre-Henry Servajean renoue avec son premier métier de vendeur dans le textile. Il garde en tête son projet de marque et sécurise son brevet. En 2011, il participe à un concours sur le réseau social professionnel LinkedIn pour trouver un industriel capable de mettre au point la version n°2 de l’armalith.

Le concours est remporté par Tejidos Royos, fabricant de tissus dans le sud de Valence, en Espagne. En 2014, l’usine met au point un premier prototype. “Je m’en rappellerai toute ma vie”, raconte, ému, Pierre-Henry Servajean. “Ils m’appellent en me demandant de venir à Valence, rien de plus.” Quand il voit le jean, il a du mal à réaliser. “Je n’arrivais pas à croire que c’était de l’armalith ! Là j’ai compris qu’il y avait quelque chose d’extraordinaire. L’usine a mis au point mon armalith selon mes rêves.”


L’aventure commence pour Pierre-Henry Servajean. Il part dans le monde entier et vend son tissu aux plus grandes marques de motos : Harley Davidson, Triumph, Belstaff, Dainese…

Une confection française et respectueuse de l’environnement

Mais l’entrepreneur ne s’arrête pas là. Il regrette l’absence d’une marque française sur le marché du jean motard “plus éthique, écologique et qui propose une expérience plus urbaine” et tout cela Made in France. En 2015, il crée Bolid’ster. 

“Le Made in France n’a pas été une volonté marketing”, affirme-t-il. “Il a une utilité de proximité pour développer le produit par itération. Je voulais ouvrir une nouvelle voie qui n’avait jamais existé : le jean à haute performance et à haute fiabilité.” Le point fort de la marque Bolid’ster, réside dans la garantie : dix ans avec réparations possibles.

“On répare les faiblesses du produit dans la même usine qui les fabrique. Donc on progresse très vite. C’est ça le gros avantage du Made in France.”


Depuis 2017, les opérations de coupe, de confection, de contrôle qualité et de conditionnement sont entièrement réalisées à Capbreton, dans les Landes. Ainsi, l’empreinte carbone d’un jean Bolid’ster est réduite par rapport à un jean classique : “La fabrication se fait dans un circuit de 1.000 kilomètres seulement”, explique l’entrepreneur bordelais, “puisque la matière première, l’armalith, est produite en Espagne par Tejidos Royo”. 

Toujours dans une démarche éco-responsable, la marque utilise un processus de teinture bien particulier. “La teinture indigo est faite à sec dans l’usine en Espagne, c’est un choix de notre part pour ne pas polluer l’eau.”

Une fois le produit découpé et assemblé, il est envoyé à Bordeaux : modification de la chromie, rétrécissement de la toile, et application d’une résine naturelle qui va durcir le tissu. L’usure finale n’est pas faite en atelier. “Lors de la première utilisation, la résine va craquer aux pliures, c’est donc le consommateur qui fait l’usure de son jean. L’armalith se patine avec le temps”.

Un concept qui semble avoir trouvé son public, comme le montrent les avis sur la page Facebook de la marque...

Le reportage de E. Galand, J-M Litvine et O. Pallas

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